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Intervention de Philippe Folliot

Réunion du 11 juillet 2011 à 17h00
Modification de l'ordre du jour — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Folliot :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission de la défense, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, les tragiques événements survenus récemment à Fukushima, sans parler de ceux d'Haïti, nous rappellent à quel point il est impératif pour tout État de disposer de forces d'intervention efficaces dotées d'effectifs suffisants et disponibles à tout instant.

Nous savons tous que le rôle des réservistes est capital en cas de crise majeure, tant les potentiels classiques et normaux peuvent paraître sous-dimensionnés, voire dérisoires, pour faire face à des événements exceptionnels. Je tiens, au nom du groupe Nouveau Centre, à saluer la motivation de ces femmes et de ces hommes jeunes et moins jeunes, dont l'engagement citoyen et responsable dans la réserve montre qu'ils sont véritablement pétris de valeurs républicaines.

Las, les conclusions de mission d'information du Sénat sont claires : la réactivité des réservistes militaires et civils est insuffisante en cas de crise. L'enjeu de la proposition de loi qui nous rassemble aujourd'hui est précisément d'y remédier.

Je souhaite, dans un premier temps, voir avec vous pourquoi il est urgent de résoudre ce problème.

Faciliter l'utilisation des forces de réserve civiles et militaires est un enjeu majeur. Nous évoluons aujourd'hui – qui peut en douter, mes chers collègues ? – dans un contexte où le déclenchement de crises majeures est plus probable que par le passé.

Le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale publié en 2008 analyse les nouveaux risques auxquels nous sommes exposés, risques qui requièrent toute notre attention et toute notre vigilance. Parmi eux figurent désormais le terrorisme et les attaques contre les systèmes d'information. Dans un contexte de densification de nos zones urbaines, et compte tenu de notre dépendance toujours croissante vis-à-vis des modes de communication numériques, le risque de telles attaques sur notre territoire est particulièrement préoccupant et doit indéniablement être pris en compte. Il convient d'évoquer aussi le risque de catastrophe naturelle : s'il pèse souvent sur les départements et collectivités d'outre-mer, il concerne également le territoire métropolitain, comme l'a tragiquement démontré la tempête Xynthia.

Ces différents risques appellent une réponse ferme du législateur : nous devons faire en sorte que l'ensemble du potentiel des forces actives, mais aussi de réserve, soit exploité en cas de crise majeur. Les réservistes jouent un rôle crucial dont nous ne saurions nous passer. Lors de chaque crise majeure sur notre territoire, les forces de réserve civiles et militaires accomplissent un réel travail de soutien et permettent une inscription dans la durée de l'action menée. En plus d'offrir un renfort précieux aux opérations mises en oeuvre, les forces de réserve prennent la relève des forces d'active. Parfois, elles agissent même dans l'après-crise, en contribuant, par exemple, aux opérations de déblayage et de soutien aux personnes.

Comme le rappelle notre rapporteur; au-delà de la polémique sur les coûts et d'une application peut-être excessive du principe de précaution, l'épisode de la pandémie grippale H1N1 de 2009-2010 a été l'occasion d'une intervention salvatrice des médecins et infirmiers réservistes, qui ont pallié la pénurie de personnels des services médicaux et paramédicaux d'unité.

Il est donc indéniable que les réservistes nous permettent, grâce à leur action particulièrement efficace, de répondre à des situations de crise dont la fréquence va certainement s'accroître à l'avenir.

Venons-en maintenant aux aspects novateurs du texte.

Tout d'abord, il tend à créer une réserve de sécurité nationale. Le Premier ministre pourra, en cas de circonstances exceptionnelles, y faire appel par décret et convoquer ainsi l'ensemble des réservistes dans de très courts délais : trois jours au maximum. Il nous est donc proposé, mes chers collègues, de doter l'exécutif d'un nouvel outil lui permettant de faire face à une crise. Certes, des outils analogues existaient antérieurement, mais ils étaient essentiellement conçus dans la perspective de crises d'ordre militaire, pour faire face à des atteintes à la sécurité nationale. Qu'il soit désormais possible de répondre à un plus large spectre de menaces ne peut que nous ravir.

Ce texte n'a pas pour seul objet d'accroître la vélocité de mobilisation des réservistes : il fait également en sorte qu'aucun obstacle ne vienne freiner cette mobilisation. Ainsi, lorsqu'il sera recouru au dispositif de réserve de sécurité nationale, les réservistes seront tenus de répondre à leur convocation, faute de quoi ils seront sanctionnés par une contravention. Je souhaite attirer votre attention, monsieur le ministre, sur ce point : en la matière, la coercition est-elle la solution ? Si le texte de la proposition de loi dispose effectivement que « lors du recours au dispositif de réserve de sécurité nationale, les réservistes sont tenus de rejoindre leur affectation », il ne fait, contrairement au rapport, aucune référence à une sanction de nature contraventionnelle. Je vous demande donc, monsieur le ministre, de bien vouloir nous indiquer si l'on recourra à la coercition ou à l'incitation.

De surcroît, les réservistes pourront désormais être mobilisés jusqu'à trente jours sans l'autorisation de leur employeur, durée bien plus longue que celle prévue par le régime actuel. Celui-ci n'autorise en effet que cinq jours d'absence sans l'autorisation de l'employeur pour les membres de la réserve militaire opérationnelle et de la réserve sanitaire, dix jours pour les membres de la réserve civile de la police nationale. Cela mérite tout de même réflexion, car vous savez, mes chers collègues, quelles difficultés peut causer, pour les employeurs, le cas des pompiers volontaires, notamment dans certaines communes rurales. Nous devrons faire de grands efforts de pédagogie pour ne pas compromettre le dispositif et faire en sorte qu'il soit jugé suffisamment attractif ; un réserviste ne doit notamment pas craindre d'être victime d'une discrimination à l'embauche.

En cas de crise majeure, il est indispensable, vous en conviendrez, d'assurer la continuité de l'action des entreprises et services publics dont l'inactivité mettrait en danger la sécurité ou la bonne marche de la nation. Le service de défense, dispositif visant à assurer cette continuité, a été jugé trop difficile à mettre en oeuvre. C'est pourquoi le texte qui nous est soumis tend à mettre en place d'un service de sécurité nationale qui remplacera le service de défense et présentera des avantages importants.

Deux dispositions doivent être mentionnées. Tout d'abord, les conditions de déclenchement de ce dispositif seront plus larges. Ainsi, le service de sécurité nationale pourra être déclenché en cas de recours à l'état d'urgence ou de recours à la réserve de sécurité nationale. Ensuite, le texte lie ce nouveau service de sécurité nationale aux opérateurs d'importance vitale. Rappelons qu'il s'agit d'opérateurs exerçant des activités ayant trait à la production ou à la distribution de biens ou services indispensables à la survie de la population, à l'exercice de l'autorité de l'État ou au fonctionnement de l'économie, de la défense ou de la sécurité de la nation. Cette catégorie comprend également les opérateurs dont les installations constitueraient un danger grave pour la population si elles étaient détruites ou endommagées. Ces secteurs stratégiques, qui comprennent par exemple la distribution de l'eau ou le nucléaire, doivent absolument être préservés ; c'est pourquoi ils devront obligatoirement mettre en place des plans de continuité d'activité afin de répondre aux crises majeures.

Ces dispositions techniques constituent une réponse efficace au risque de crise majeure, plus présent que par le passé.

Aux yeux du groupe Nouveau Centre et apparentés, ce texte comporte donc, mes chers collègues, des dispositions judicieuses et équilibrées.

Au vu du caractère indispensable de la force d'intervention que constituent les réservistes et de l'omniprésence du risque de crise majeure à l'heure actuelle, il était urgent de réformer les mécanismes de réaction à ces situations mais, au-delà des dispositions soumises à notre examen, cette proposition de loi nous encourage à mener à l'avenir des réformes de plus grande envergure des réserves. Comme je l'ai exposé en commission, l'intérêt de ce texte réside dans l'impulsion qu'il donne à un effort de mutualisation d'un certain nombre de moyens pour faire face à ces situations de crise. L'intervention des sapeurs-pompiers volontaires dans le sud-est de la France pour lutter contre les incendies importants offre un exemple de cette mutualisation, qui pourrait permettre aux départements et collectivités d'outre-mer qui éprouvent des difficultés à mobiliser les moyens venus d'autres régions ou de métropole de mieux répondre à de telles situations de crise.

Pour ces différentes raisons, mes chers collègues, le groupe Nouveau Centre et apparentés, sous réserve de l'adoption d'un amendement rédactionnel, votera en faveur de ce texte. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

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