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Intervention de Serge Blisko

Réunion du 7 juillet 2011 à 15h00
Protection de l'identité — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSerge Blisko :

Nous avons compris que nous avions des positions incompatibles. Le plus étrange, c'est que nous sommes tous d'accord pour lutter sévèrement contre l'usurpation d'identité et les dégâts économiques, humains et bien évidemment judiciaires qu'elle peut entraîner pour des dizaines de milliers de personnes. Que cela en concerne 80 000 ou 200 000 par an, peu importe pour le moment. C'est trop de toute façon, et il faut trouver des solutions.

Pour ce faire, vous avez utilisé le biais de cette proposition de loi, en évitant donc les passages obligatoires que sont, en matière de libertés publiques, la CNIL et, surtout, le Conseil d'État. Un tel raccourci nous paraît peu satisfaisant, et l'ensemble des débats de cet après-midi ont montré que nous n'étions absolument pas sur la même longueur d'onde.

Vous voulez créer une base de données informatisées généralisée qui permettra, lors du renouvellement des cartes d'identité, de passer de la carte plastifiée à la carte biométrique, comme on était passé du carton – il doit rester de telles cartes chez les personnes âgées – au plastique. Vous avez donc franchi un pas important, qui ne laisse pas de nous inquiéter, d'autant plus que vous avez cru bon d'ajouter une puce dite de services qui me paraît totalement inadéquate et inopportune quand il s'agit de fonctions régaliennes et de la délivrance d'un titre que l'on a dans son sac à main ou dans son portefeuille et dont on a besoin pour un grand nombre des actes de la vie courante. Il suffit d'aller retirer un recommandé à la poste pour le savoir. Nous regrettons donc la création d'un tel fichier.

M. le ministre essayé de nous rassurer en nous expliquant que les fichiers n'étaient consultables que sur réquisition judiciaire, et nous sommes tout à fait d'accord, mais la question essentielle est bien l'étendue de ce fichier. Le FNAEG ou le FAED sont des fichiers de personnes criminelles, de personnes suspectes, de personnes s'étant trouvées au centre d'affaires de délinquance ou de criminalité. Là, et c'est un changement culturel total, un saut quantitatif qui exprime un saut qualitatif, nous créons au ministère de l'intérieur un fichier centralisé de la population française à partir de données biométriques, données qui, on le sait, sont en constante évolution et pourront permettre demain des échappées que nous pouvons entrevoir. En avoir connaissance peut entraîner des conséquences très graves pour les libertés individuelles ou tout simplement la tranquillité des personnes. Quand votre numéro de téléphone est dans l'annuaire et que c'est la énième fois qu'un vendeur de fenêtres vous explique qu'il est dans votre quartier et vous propose de changer vos huisseries, ce n'est qu'un énervement de plus. Là, ce sera beaucoup plus pernicieux et ce sera beaucoup plus compliqué que de raccrocher en disant que cela ne vous intéresse pas comme nous le faisons tous. On risque de rentrer dans notre vie privée et familiale.

Ce texte aurait dû nous rassembler pour nous permettre de lutter contre une très lourde délinquance, il n'aurait pas dû dériver vers cette vieille utopie des ministères de l'intérieur successifs, un fichier certifié de toute la population pour avoir une base de données regroupant pratiquement l'ensemble des Français.

Un tel changement, nous ne pouvons que le contester, et nous espérons fermement que le Conseil constitutionnel comme le Conseil d'État sauront protéger les Français de cette extension inopinée.

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