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Intervention de Sandrine Mazetier

Réunion du 7 juillet 2011 à 15h00
Protection de l'identité — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSandrine Mazetier :

Cette proposition de loi simplifiera-t-elle la vie des Français, ainsi que l'a annoncé le ministre, et leur fournira-t-elle une double sécurité ? Nullement. Au contraire, pendant quinze ans au moins, ceux dont l'identité aura été usurpée par quelqu'un qui aura déposé ses propres empreintes avant eux vivront un véritable enfer. Quinze ans, c'est la durée que vous nous avez indiquée avant la destruction des données, monsieur le ministre, durée qui ne figure d'ailleurs pas dans la proposition de loi.

Non, cette proposition de loi sert à créer un fichier généralisé de la population française, satisfaisant ainsi le vieux fantasme nourri par certains dans ce pays. Elle sert, comme l'ont souligné les précédents intervenants du groupe SRC, à contourner les avis du Conseil d'État et de la CNIL, mais également à surmonter trois échecs : celui du projet de loi INES en 2005 et des avant-projets de loi « Protection d'identité » et « Identité » en 2006 et 2008. N'ayant abouti à rien avec vos projets de loi, vous tentez, avec cette proposition de loi, d'entrer par la fenêtre.

Le double objectif de cette proposition de loi est très clair. Il est d'abord policier, et vous devez l'assumer. L'utilisation policière des données de ce fichier a été explicitement mentionnée en commission et figure dans le rapport.

La vérification d'identité n'est plus aujourd'hui l'apanage des policiers. Pas plus tard qu'hier, en commission des affaires économiques, à l'occasion de l'examen du projet de loi sur les droits, la protection et l'information des consommateurs, les agents de la DGCCRF ont ainsi été autorisés à vérifier l'identité d'un éventuel ou présumé contrevenant. Les agents habilités à procéder à des vérifications d'identité et qui auront demain accès à ces fichiers sont donc de plus en plus nombreux.

Au-delà de cet objectif policier, cette proposition de loi vise aussi clairement à servir des intérêts privés, quelle que soit d'ailleurs la technologie retenue. Le Sénat a privilégié la technologie des liens faibles, ce qui n'a pas empêché que soit nommément citée, dans le rapport et au cours des débats, une entreprise française, qui se reconnaîtra fort bien.

Quant aux liens forts, technologie qui a la préférence de notre rapporteur Philippe Goujon, c'est Noël ! Je vous remercie d'ailleurs, monsieur le rapporteur, pour la sincérité dont vous faites preuve dans votre exposé des motifs, qui mentionne un « enjeu industriel majeur ». Vous nous expliquez que le groupement professionnel des industries de composants et de systèmes électroniques vous a fait savoir que les principales entreprises mondiales du secteur étaient françaises, qu'elles comptaient trois des cinq leaders mondiaux des technologies de la carte à puce et réalisaient 90 % de leur chiffre d'affaires à l'exportation, qu'il était donc urgent de ficher l'ensemble de la population française, car ce choix d'une carte nationale d'identité électronique serait un signal fort en faveur de notre industrie.

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