Je veux tout d'abord dire à M. Blisko que le Gouvernement considère qu'une proposition de loi n'est pas moins noble qu'un projet de loi. C'est d'ailleurs pour cette raison qu'il a proposé au Parlement une révision de la Constitution qui renforce l'initiative parlementaire en matière législative.
Je veux aussi apporter des précisions qui – j'en suis désolé – vont à l'encontre de certaines affirmations de M. Blisko.
Tout d'abord, le Conseil d'État sera bien sûr saisi de toutes les modalités d'application de cette proposition de loi si elle devient une loi de la République. S'agissant précisément de la constitution de la base TES, qui vous inquiète, monsieur Blisko, le Conseil d'État a déjà rendu un avis sur l'application aux passeports.
Je précise par ailleurs qu'il ne s'agit pas d'un fichage général de la population. Comme vous l'avez du reste indiqué au détour d'un autre développement, la détention de la carte d'identité électronique n'est pas une obligation.
Il ne s'agit pas non plus de constituer un fichier de police : il s'agira d'un fichier administratif. Cela signifie que les empreintes prises seront, comme pour les passeports, des empreintes de huit doigts à plat et non pas, comme pour le FAED, des empreintes de doigts roulées. Le FAED devra donc bien entendu être maintenu puisque c'est un fichier de police.
Dernière observation factuelle, il ne s'agit pas d'un fichier « éternel » puisque les données seront systématiquement détruites au bout de quinze ans.
S'agissant du fond de la proposition de loi, il est évidemment hors de question, pour le ministère de l'intérieur, de s'immiscer dans le contenu des échanges commerciaux ou de chercher à en savoir quoi que ce soit. Le ministère de l'intérieur n'interviendra que pour garantir la fiabilité du système, sa sécurité, c'est-à-dire, d'une part, la sécurité des boîtiers électroniques et, d'autre part, la sécurité des transmissions.
J'ajoute que, compte tenu du développement des transactions électroniques, sujet que vous connaissez manifestement très bien, monsieur Blisko, la proposition qui vous est soumise est de nature à renforcer les garanties en la matière. Le ministère de l'intérieur est préoccupé par le développement des fraudes en tout genre qui se développent dans les transactions électroniques, et ce texte offre une sécurité à ceux de nos concitoyens à qui ce mode d'échange convient.
Fondamentalement, il s'agit de savoir si l'usurpation d'identité est un sujet sérieux ou non. Je prétends que le fait que 80 000 usurpations d'identité soient recensées chaque année par le FAED, alors même qu'il n'est pas saisi à titre principal – il les découvre à l'occasion de recherches sur d'autres infractions –, mérite vraiment d'être considéré, car l'usurpation d'identité – tout le monde l'a dit ; vous-même, monsieur Blisko – est extrêmement grave pour ceux qui en sont les victimes.
La technique du lien faible ne permet pas de remonter à l'usurpateur ; Philippe Goujon a été particulièrement précis et éloquent à ce propos. Le ministère de l'intérieur a d'ailleurs reçu une lettre de l'inventeur de la technique, qui indique très clairement qu'il ne peut garantir qu'elle permette de remonter à l'usurpateur.
Si nous avons la possibilité technique de remonter à l'usurpateur et, par conséquent, de faire cesser immédiatement l'usurpation, pourquoi donc préférer détenir une liste de 100 noms sur lesquels les services de police devront faire des enquêtes systématiques ? Je parle de 100 noms, mais certaines évaluations sont plus pessimistes et évoquent 140 ou 160 noms. Pourquoi, alors que nous voulons tous enrayer le fléau gravissime de l'usurpation d'identité, ne pas utiliser ce qui nous permettra d'y parvenir ?
Le Gouvernement souhaite donc le rejet de la motion.