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Intervention de Henri Emmanuelli

Réunion du 12 juillet 2011 à 10h30
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHenri Emmanuelli, rapporteur spécial :

Alors que la LOLF avait été conçue pour améliorer le contrôle du budget et en faciliter l'analyse, comme sa création a coïncidé avec la réduction des crédits, elle est utilisée non sans cynisme par les gouvernements successifs pour mener à bien la révision générale des politiques publiques, à laquelle elle finit par être identifiée. Dans les préfectures, on va jusqu'à vous répondre que les postes sont supprimés en raison de la LOLF, alors que cela n'a aucun rapport.

Que le Gouvernement ait choisi de ne pas remplacer un fonctionnaire sur deux résulte d'un choix politique : on ne saurait en rendre la LOLF responsable. Le fait que la LOLF soit devenue synonyme de RGPP a semé la confusion chez nos compatriotes et fait peser une ambiguïté sur l'application de cette loi organique.

Je partage le point de vue de M. Martin-Lalande sur les commissions élargies : il ne faut pas maintenir leur existence si elles nuisent au contrôle parlementaire. Les rapporteurs peuvent à peine s'y exprimer !

J'observe que, quelle que soit la couleur politique du Gouvernement, chaque fois que l'État se lance dans une aventure informatique, celle-ci tourne au fiasco. En quelque vingt ans, combien de milliards d'euros sont-ils ainsi partis en fumée ? Alors que nos hauts fonctionnaires reçoivent une formation de qualité, d'où leur vient cette inaptitude à manier l'informatique ? La mise au point du programme Copernic du ministère des Finances, qui devait prendre deux ans, en a demandé huit à dix ! Ne conviendrait-il pas de se pencher sur la question, par exemple dans le cadre d'une mission installée auprès du Premier ministre ? Ces programmes informatiques de l'État paraissent en tout cas constituer une véritable aubaine pour les sociétés de services informatiques.

Les indicateurs de performance sont-ils tous pertinents et doit-on essayer de les homogénéiser alors qu'il n'y a pas d'homogénéité entre les tâches des ministères ? Je me méfie, du reste, du transfert de la culture de l'entreprise privée au fonctionnement de l'État, car cela débouche le plus souvent sur de la « bureaucrassouille ». Les critères sur lesquels reposent les statistiques ne sont pas fiables, comme nous pouvons aujourd'hui le constater en matière de sécurité. Dans le département des Landes, il semble qu'on n'arrête plus aucun voleur : en revanche, le nombre des contrôles routiers explose, surtout là où ils peuvent rapporter ! La statistique bureaucratique n'est pas le contrôle de performance. Les indicateurs de performance sont-ils toujours adaptés ? J'en doute, car ce qu'on attend du ministère de la Culture n'est pas forcément ce qu'on attend du ministère de l'Éducation nationale ou de celui de la Justice.

Je suis, moi aussi, choqué de la façon dont les hauts fonctionnaires répondent aux commissions parlementaires. Trois fois sur quatre, et cela n'est pas propre à la période récente, nous en apprenons plus en lisant les journaux que par ces auditions ! Un ministre ou un haut fonctionnaire entendu par une commission parlementaire se sent dégagé de tout devoir. Ou il biaise ou il ment par omission. Le Parlement devra mettre un jour les choses au point. Conviendrait-il de sanctionner le fonctionnaire, détenteur d'une information, qui ne l'a pas communiquée alors qu'il était interrogé sur le sujet ? Je l'ignore, mais c'est un fait que l'audition du directeur général des Finances publiques ne nous a rien appris. Il s'est contenté de phrases évasives et de généralités ; il ne savait pas, il n'avait pas tous les éléments… Nous avons eu le sentiment de perdre notre temps, et ce n'est qu'un exemple parmi d'autres. Il faudrait songer à une charte des auditions devant les commissions parlementaires.

Enfin, j'ai lu hier dans Le Monde que la mesure de la RGPP sur le non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux, loin de conduire à des économies, allait peut-être coûter au budget de l'État, cependant que les mêmes règles n'étaient pas appliquées d'un ministère à l'autre – ici on redistribue 70 % des économies réalisées et là 38 % seulement. À l'arrivée, on évoque une économie de 250 millions d'euros ! Supprimer, pour un si médiocre résultat, 100 000 emplois dans la fonction publique me semble contre-productif. Il en résulte en effet un démantèlement des services extérieurs de l'État : dans la région Aquitaine, comme il n'y a plus que deux fonctionnaires pour instruire les dossiers de police de l'eau, il faut six mois d'attente, ce qui bloque, par exemple, des investissements de 30 à 40 millions d'euros dans les infrastructures routières.

Il conviendrait donc de mener un travail, un peu plus approfondi que celui du Monde, sur les résultats de la politique de non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux.

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