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Intervention de Gilles Carrez

Réunion du 6 juillet 2011 à 15h00
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGilles Carrez, Rapporteur général :

La répartition de l'impôt sur les sociétés, qui est le deuxième point abordé dans ce rapport, est un sujet très important et très complexe.

Le premier constat est que les grandes entreprises payent leur part en termes de prélèvements obligatoires, en englobant à la fois l'impôt sur les sociétés, la C3S, la taxe sur les salaires, la taxe professionnelle, les prélèvements sociaux. Mais, si l'on s'en tient à l'IS, la répartition est beaucoup moins équilibrée, et les grandes entreprises contribuent proportionnellement moins à cet impôt que les petites entreprises. Cela avait déjà été mis en évidence par le Conseil des prélèvements obligatoires l'an dernier et cela a été confirmé par la note de la direction du Trésor rendue publique la semaine dernière.

C'est notre capacité à protéger nos recettes qui est en cause : on ne peut pas se permettre, dans la situation actuelle, de voir le produit de l'IS s'étioler. Cela est d'autant plus vrai que, si l'impôt sur les sociétés représentera en 2011 une recette de près de 45 milliards d'euros, cette recette est volatile : elle est descendue à 20 milliards d'euros en 2009 et n'a connu qu'un redressement lent en 2010 avec un niveau de 34 milliards d'euros.

Le débat sur la répartition de l'IS soulève la question d'un impôt à taux élevé et à assiette trouée. Si l'on considère l'excédent net d'exploitation, qui est calculé avant imputation des charges financières, le taux implicite de l'IS, rapporté à cet excédent net d'exploitation, s'élève à 39,5 % pour les petites entreprises et à 18,6 % pour les grandes entreprises. Il convient toutefois de tempérer l'analyse menée à partir de cet agrégat économique, qui a le défaut d'exclure les entreprises du secteur financier.

De manière plus détaillée, on peut constater que plus une entreprise est internationalisée, plus elle peut bénéficier des règles de réduction de l'assiette de l'IS. Il est en effet possible d'attraire vers la maison mère imposée en France les charges liées au développement à l'international, cette attraction étant d'autant plus avantageuse que l'écart d'imposition entre la France et les pays étrangers concernés est important. Il lui est également possible d'expatrier des produits sur ses filiales.

Trois autres dispositifs sont, à mon avis, moins problématiques. Le régime mère-fille, qui permet de ne pas taxer les dividendes perçus par une société détenant une participation supérieure à 5 % dans la société versant les dividendes, n'est pas une niche fiscale, car il s'agit tout simplement d'éviter la double imposition. Le régime de l'intégration fiscale quand une filiale est détenue à plus de 95 % n'est pas non plus choquant : il est normal d'agréger les résultats de la société mère et de ses filiales. Enfin, le régime du bénéfice mondial consolidé ne concerne qu'un très faible nombre de grandes entreprises.

Par rapport à l'Allemagne, l'une des principales différences tient à la déductibilité intégrale des charges financières, qui a un effet pervers sur la structure financière des sociétés françaises. En Allemagne, cette déductibilité est limitée, même si la limite est fréquemment modifiée.

Le mécanisme de report indéfini des pertes et de carry back possible sur les trois années précédentes conduit aussi à accumuler des stocks de pertes importants, qui sont désormais de l'ordre de 315 milliards d'euros. Ces stocks joueront défavorablement sur le produit de l'IS les prochaines années.

Le sujet demeure très sensible, car les grands groupes sont en compétition sur les marchés internationaux. Toutefois, il n'est pas possible d'attendre plus longtemps l'harmonisation européenne pour réfléchir à des pistes de réforme de l'IS. D'ailleurs, fin 2010, nous avons fait un premier pas, en limitant la déductibilité des intérêts quand un prêt est accordé à une filiale par un établissement bancaire avec une garantie apportée par la société mère.

Comme pour l'impôt sur le revenu ou pour la taxe professionnelle, le moment est venu d'engager un travail de réflexion sur l'IS, nécessaire pour assurer une bonne répartition de cette fiscalité entre les entreprises.

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