L'ONISR, créé par un décret du 8 novembre 1993 modifiant le décret du 15 mai 1975 ayant institué le comité interministériel à la sécurité routière (CISR), fait partie de la délégation à la sécurité et à la circulation routières (DSCR), elle-même placée sous l'autorité conjointe du ministère chargé des transports et du ministère de l'intérieur. Il fonctionne comme un service ordinaire de la DSCR, à laquelle il est rattaché, qu'il s'agisse de la logistique ou des ressources humaines.
Aux termes du décret, l'ONISR est chargé de « rationaliser et d'unifier la collecte des données statistiques provenant des différentes sources nationales et internationales, d'assurer leur mise en forme, leur interprétation et leur diffusion ; d'effectuer ou d'assurer le suivi des études générales ou sectorielles sur l'insécurité routière ; d'évaluer les mesures de sécurité routière prises ou envisagées. »
Pour remplir ces missions, l'Observatoire s'appuie largement sur le réseau scientifique et technique du ministère chargé des transports : le service d'études sur les transports, les routes et leurs aménagements (SETRA), le centre d'études sur les réseaux, les transports, l'urbanisme et les constructions publiques (CERTU), l'Institut français des sciences et technologies des transports, de l'aménagement et des réseaux (IFSTTAR), issu de la fusion de l'Institut national de recherche sur les transports et leur sécurité (INRETS) et du Laboratoire central des Ponts et chaussées (LCPC).
Nous travaillons en priorité à l'intention des gestionnaires de voirie chargés de prendre les mesures de sécurité routière nécessaires. Nous collaborons donc avec l'Association des sociétés françaises d'autoroutes (ASFA), pour les autoroutes concédées, la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM), pour le réseau routier national, mais aussi avec les départements, notamment au travers de l'Association des départements de France – le réseau départemental est, de loin, le plus accidentogène –, les communes et les structures intercommunales, pour les autres réseaux.
Ne comptant que sept agents, l'ONISR s'appuie sur un petit réseau d'observatoires locaux de la sécurité routière, placés au niveau régional auprès des directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) et au niveau départemental auprès des directions départementales des territoires (DDT) mais aussi parfois directement auprès des préfectures. Ce réseau représente environ 200 ETPT (équivalent temps plein travaillé) répartis dans l'ensemble des régions et des départements. Certains postes ne sont pas pourvus et dans un département standard, cela représente un poste, parfois moins. Ce réseau nous est indispensable pour la correction et la vérification des données, ainsi que l'analyse locale des enjeux pour le compte des préfectures et des collectivités.
L'ONISR est aussi chargé de conduire des études et des recherches dans le domaine de la sécurité routière. Il s'appuie là encore très largement sur le réseau scientifique et technique du ministère chargé des transports, notamment sur l'IFSTTAR, mais aussi les universités et des organismes comme l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) ou l'Institut de santé publique, d'épidémiologie et de développement (ISPED).
Indépendant, l'ONISR publie d'une part un baromètre mensuel de la sécurité routière, en général le 6 ou le 7 d'un mois pour le mois précédent, d'autre part un bilan annuel, désormais mis en ligne, à l'automne pour l'année précédente. Le bilan de la sécurité routière pour 2009 a ainsi été publié en octobre 2010. Nous venons d'arrêter la base des données statistiques d'accidentalité à partir du fichier national des accidents corporels de la circulation routière de 2010, après vérification et contrôle. Le bilan définitif devrait paraître fin octobre-début novembre.
L'ONISR mène également diverses études thématiques. Il établit ainsi tous les deux ans des statistiques pluriannuelles par grandes catégories d'usagers : poids lourds, deux roues motorisées, piétons, etc.
Avant de vous présenter en détail les chiffres, quelques remarques générales. Les statistiques d'accidentalité n'ont pas grande valeur en soi. Il faut les compléter à la fois par des statistiques d'exposition afin de pouvoir calculer les sur-risques et par des statistiques de contexte, entendues au sens large. L'évolution de l'accidentalité doit ainsi être rapportée à celle de la mobilité. Quand le trafic diminue, quelle qu'en soit la raison, le nombre d'accidents diminue lui aussi, immédiatement et de façon mécanique, sans que cela ne traduise une quelconque amélioration de la sécurité routière. Les données relatives au trafic sur certains réseaux font, hélas, cruellement défaut. Pour des raisons qui tiennent à la décentralisation, il n'existe quasiment plus de bases de données, coordonnées et harmonisées, concernant le trafic sur le réseau départemental. Et il n'y a jamais eu de statistiques cohérentes relatives au trafic en milieu urbain.
Nos baromètres mensuels sont très suivis – trop peut-être. Cette périodicité est extrêmement rapprochée pour des statistiques, qui n'ont de sens véritable que sur un temps plus long. Les chiffres d'accidentalité, même agrégés au niveau national, sont extrêmement volatils et difficiles à interpréter. L'ONISR est le seul organisme à publier aussi vite des chiffres en matière de sécurité routière, ce qui pose d'ailleurs un problème, car ceux-ci ne peuvent être correctement interprétés que couplés à des données de contexte. Or, lors de la publication du baromètre, on ne dispose pas encore des données concernant le trafic, qui ne seront disponibles que quatre mois plus tard, non plus que des bulletins complets de Météo France, qui le seront, eux, plus tard dans le mois. Enfin, il n'existe plus maintenant que des données annuelles, et non plus mensuelles, relatives aux différentes consommations de carburant.
Un mot de l'élaboration de nos statistiques. Le baromètre mensuel est établi à partir des remontées rapides du terrain. Les unités de police ou de gendarmerie appelées sur le lieu d'un accident cochent des cases sur des fiches-types, qui sont concentrées au niveau des préfectures puis remontent au ministère de l'intérieur, qui nous les transmet. Les données ainsi recueillies se limitent au nombre d'accidents corporels, de personnes tuées – sur le coup ou dans les trente jours qui suivent l'accident –, blessées et blessées hospitalisées (données dites ATBH). Ce sont des chiffres bruts fin de mois, éclatés par département, donnant la répartition des tués par catégorie d'usagers, par tranche d'âge – on en distingue quatre – et par motif présumé d'accident – vitesse, alcool, refus de priorité et autres. Nous retravaillons ces données brutes, qui peuvent comporter des omissions ou des doublons, avant d'en extrapoler des estimations au niveau national, qui constituent le baromètre mensuel. Nous les corrigeons notamment en y appliquant les écarts constatés entre ces remontées brutes et les chiffres finals du fichier national des accidents corporels, sur les douze derniers mois pour lesquels nous disposons des deux séries. Cela donne de très bonnes estimations en base annuelle pour le nombre de tués, moins bonnes pour le nombre d'accidentés et de blessés. Pour ce qui est des blessés hospitalisés, la comparaison n'est pas encore possible puisqu'on ne disposait pas de cette donnée en remontée rapide il y a encore quelque temps. Le baromètre offre diverses comparaisons : d'un mois au même mois de l'année précédente, des n premiers mois de l'année aux mêmes n mois de l'année précédente. Un suivi de tendance est également établi sur la base de douze mois glissants.
La véritable base de données, que gère l'ONISR, est le fichier national des accidents corporels. Chaque unité des forces de l'ordre intervenue lors d'un accident de la circulation établit sur le terrain, par voie électronique, un bulletin d'analyse d'accident corporel de la circulation, dit bulletin BAAC. Tous les services de police le saisissent désormais grâce au logiciel Procea. Ce bulletin comporte une soixantaine d'items, relevant de diverses spécialités – médicales, techniques relatives aux infrastructures routières, aux véhicules… Il est impossible que ceux appelés à le remplir soient des experts chevronnés en tous ces domaines. Pour quantité d'items, se retrouve donc la mention « indéterminé ».Avec 70 000 à 80 000 bulletins chaque année, on mesure le travail que représente leur traitement ultérieur !
Les bulletins sont concentrées à Juvisy pour la police et l'étaient jusqu'à présent à Rosny-sous-Bois pour la gendarmerie. Les données sont vérifiées une première fois, sous leur propre responsabilité, par la police ou la gendarmerie, puis versées sur le portail web « Accidents » de l'ONISR. Les forces de l'ordre ayant beaucoup à faire et l'établissement de statistiques ne figurant pas parmi leurs premières priorités, la qualité de la saisie de ces bulletins demeure médiocre. Il faut donc vérifier, corriger, compléter les données qu'ils livrent. C'est un travail lourd qui s'opère d'abord à l'ONISR puis dans les observatoires départementaux de sécurité routière (ODSR), qui travaillent souvent en liaison avec les collectivités – ce travail peut aller jusqu'à la consultation du procès-verbal d'accident pour confronter les indications. La variable qui manque le plus souvent est l'endroit précis où est survenu l'accident. Certaines incohérences sont facilement repérées et corrigées. D'autres ne peuvent l'être que par un dialogue avec les forces de l'ordre qui ont saisi les données sur le terrain. Pour une année n, le gel de la base intervient entre mi-mai et mi-juin de l'année n+1 : les chiffres définitifs pour 2010 seront ainsi annoncés dans quelques jours par le ministère de l'intérieur.
La base de données établie à partir des BAAC est réputée complète. Elle l'est pour les accidents mortels, pas pour les accidents corporels sans tués. Elle comporte d'autres défauts, avec lesquels nous composons pour l'instant. Des indications importantes comme de savoir si un conducteur tué téléphonait au moment de l'accident n'y apparaissent pas – cette précision n'est d'ailleurs donnée nulle part. N'y figurent pas non plus la vitesse, sauf si les forces de l'ordre ont eu l'impression qu'elle a pu être un facteur déterminant et en ont expressément fait mention. L'une de mes préoccupations actuelles est de défendre cette base et d'enrayer la dégradation de la qualité de ses informations.
Des mesures du comportement des usagers sont également effectuées quadrimestriellement. Elles concernent les vitesses pratiquées par les différentes catégories d'usagers, et d'autres comportements des conducteurs.
Un travail beaucoup plus fin est effectué sur un très petit nombre d'accidents, d'une part par une unité de l'IFSTTAR, basée à Salon de Provence, qui réalise des études détaillées sur une cinquantaine d'accidents par an, avec utilisation de logiciels pour en reconstituer la dynamique et en procédant à une étude approfondie de l'état des véhicules pour en déduire la vitesse à partir de l'énergie estimée du choc ; d'autre part par le centre européen d'études de sécurité et d'analyse des risques (CEESAR) sur une centaine d'accidents en région parisienne, essentiellement dans les Yvelines. Ce travail permet de beaucoup mieux comprendre les facteurs des accidents que le fichier BAAC, mais l'échantillon est extrêmement réduit.
Enfin, depuis 1995, est en service dans le Rhône un registre des victimes d'accidents de la route, qui vise à recenser de la manière la plus complète possible les victimes d'accidents de la route dans ce département, la nature et l'évolution de leurs blessures, puis de leurs éventuelles séquelles. Des extrapolations sont ensuite effectuées à partir de ces données. Il serait très utile que d'autres départements, de profil différent, soient dotés d'un tel registre.