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Intervention de Gilles Cocquempot

Réunion du 28 juin 2011 à 17h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGilles Cocquempot, rapporteur :

L'accord avec le Vietnam qu'il est proposé de ratifier a été signé à Hanoï entre nos deux gouvernements le 12 novembre 2009 et a été ratifié par la partie vietnamienne qui l'a notifié le 11 février 2010.

Il s'inscrit dans la continuité d'une politique de négociation et de conclusion d'accords en matière de sécurité intérieure, sur la base d'un modèle élaboré en 2007, dans le but d'harmoniser et de renforcer la cohérence de la coopération en matière de sécurité intérieure que conduit la France avec de nombreux pays. La commission s'est ainsi déjà prononcée sur des accords élaborés sur cette base avec huit pays (Croatie, Slovénie, Albanie, Israël, Libye, Grèce, Arabie Saoudite et île Maurice) et devrait examiner prochainement ceux passés avec la Géorgie et la Bosnie-Herzégovine.

L'accord a pour objet de consolider une coopération technique de bon niveau, d'élargir les domaines de coopération et d'approfondir une coopération opérationnelle, reposant sur l'échange d'informations, permettant de mieux lutter contre les réseaux criminels. Le Vietnam est en effet situé dans une zone où circulent de nombreux trafics, soit que le Vietnam en soit un pays de destination, soit qu'il en soit un pays de transit ou même un pays source.

Il s'agit d'abord du trafic de stupéfiants, pour lequel le Vietnam est un point de transit de l'héroïne produite dans le triangle d'or et des drogues synthétiques. En 2009, les autorités vietnamiennes ont saisi 213 kilos d'héroïne et plus de 520 000 comprimés de drogues synthétiques.

Il s'agit ensuite du trafic de femmes et d'enfants aux fins de travail forcé et d'exploitation sexuelle, orienté essentiellement vers la Chine et le Cambodge, également vers la Thaïlande via le Laos et la Malaisie. Ces activités criminelles sont le fait de ressortissants vietnamiens en contact avec des groupes criminels situés dans les pays de la région, voire en Europe, en Australie et aux Etats-Unis. Depuis 20 ans, plusieurs dizaines de milliers de femmes et enfants auraient été envoyés en Chine. Entre 2004 et 2010, 65 % des cas identifiés de trafic de femmes en Chine était d'origine vietnamienne. On estime qu'un tiers des prostitués cambodgiens sont des mineurs vietnamiens.

La troisième catégorie d'activités criminelles transnationales est la contrefaçon, qui affecte directement notre pays. En 2010, 70 % des produits contrefaits saisis par les douanes françaises provenaient d'Asie. Le Vietnam constitue avant tout un pays de transit de la production chinoise représentant 80 % de la contrefaçon mondiale. Il est aussi un pays « producteur » de médicaments contrefaits, notamment de marque française. Des faux génériques circulent. Ce trafic pose un problème majeur de santé publique et de protection des citoyens.

Enfin, il ne faut pas oublier l'immigration illégale en provenance du Vietnam. Je connais particulièrement le sujet étant élu du Pas-de-Calais. Ce département est le réceptacle d'une grande communauté de migrants vietnamiens qui cherchent par tous les moyens à rejoindre le Royaume-Uni. 4 614 interpellations ont été réalisées en France en 2009, soit un triplement en deux ans seulement. Cette vague importante de migrants s'est accompagnée de la mise en place de filières mafieuses.

Le Vietnam a conscience des activités criminelles présentes sur son territoire. L'administration vietnamienne est centralisée, hiérarchisée et organisée avec rigueur. Les quelques 90 000 hommes de la direction générale de la police bénéficient de formations régulières et s'apparentent à une police de « proximité », avec des policiers de quartiers et des correspondants citoyens qui les renseignent. Cet encadrement très prégnant impose par exemple aux citoyens d'en référer préalablement aux forces de police pour certaines démarches. En contrepartie, il assure une grande efficacité.

Cependant, les matériels et outils pédagogiques sont obsolètes et relativement inadaptés à l'évolution rapide de la criminalité organisée. C'est pourquoi le Vietnam s'est ouvert à la coopération bilatérale, prioritairement avec les pays limitrophes mais aussi avec certains de ses partenaires privilégiés, parmi lesquels la France, premier partenaire européen du Vietnam dans tous les domaines.

Nos relations bilatérales se sont ainsi enrichies en mars 1999 d'un volet sécurité intérieure avec la création, au sein de l'Ambassade de France, de la délégation du service de coopération technique internationale de police (SCTIP). Un service de sécurité intérieure a été créé et est dirigé par un attaché de sécurité intérieure ayant compétence pour le Vietnam et le Laos. Une antenne a été aussi créée à Ho Chi Minh Ville en septembre 2003.

Notre coopération est à la fois technique, avec la promotion de l'organisation policière et des techniques françaises d'enquête, incluant des formations et des visites d'études en France, et opérationnelle, particulièrement en matière de lutte contre l'immigration illégale et de la lutte contre les contrefaçons. A ce sujet, il convient de souligner que la France a lancé un projet de Fonds de solidarité prioritaire pour la région du Mékong, qui concerne donc le Vietnam, le Laos et le Cambodge, qui devrait démarrer prochainement.

Pour conclure, je soulignerai que le Vietnam occupe une position stratégique et que ce n'est pas pour rien qu'il s'ouvre progressivement depuis plusieurs années déjà. En ce sens, cet accord est aussi important parce qu'il participe de l'objectif de stabilité de l'ensemble de l'Asie du sud-est, au travers d'un pays avec lequel la France entretient des liens étroits.

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