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Intervention de André Schneider

Réunion du 28 juin 2011 à 17h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndré Schneider, rapporteur :

L'objet modeste du protocole additionnel n° 6 à la convention révisée pour la navigation du Rhin, signé le 21 octobre 1999, est d'augmenter le montant maximal des amendes punissant les infractions aux prescriptions de police en matière de navigation du Rhin.

Avec environ 310 millions de tonnes de marchandises transportées chaque année, le Rhin constitue l'axe fluvial majeur européen. Il concentre en effet à lui seul près des deux tiers du trafic fluvial réalisé en Europe. Les bateaux qui y circulent sont soumis à une réglementation spécifique édictée par la Commission centrale pour la navigation du Rhin, doyenne des organisations internationales regroupant les Etats Rhénans (Pays-Bas, France, Allemagne, Suisse, Belgique).

Prévue par l'acte final du congrès de Vienne qui consacrait, en 1815, le principe de la liberté de navigation sur les cours d'eau internationaux, sa première réunion se tient le 15 août 1816 à Mayence. D'abord implanté à Mannheim, le siège de la CCNR est depuis 1920 à Strasbourg.

Le 31 mars 1831 est adoptée la convention de Mayence qui rassemble les règles applicables à la navigation du Rhin. Elle est rapidement révisée pour tenir compte de l'apparition des bateaux à vapeur et de la concurrence des chemins de fer. C'est donc la convention de Mannheim, signée le 17 octobre 1868, qui instaure le véritable statut international de la navigation du Rhin.

L'acte de Mannheim, qui a été modifié à sept reprises en plus du présent protocole, définit les principes qui régissent la navigation rhénane : liberté de la navigation, égalité de traitement des bateliers et des flottes, exemption de taxes sur la navigation, simplification du dédouanement, obligation des Etats de maintenir et d'améliorer l'état du fleuve, prescriptions uniformes relatives à la sécurité du bateau et au trafic fluvial, juridiction commune pour les affaires de la navigation, tribunaux de la navigation du Rhin, possibilité de recours devant la Commission centrale en vue du respect des dispositions de la convention et des mesures prises en son exécution.

La commission centrale pour la navigation du Rhin s'assigne deux objectifs essentiels : favoriser la prospérité de la navigation rhénane et européenne et garantir un haut niveau de sécurité pour la navigation et son environnement.

Cette dernière préoccupation est à l'origine du sixième protocole soumis à la commission des affaires étrangères qui a pour unique objet d'augmenter le montant maximal des amendes punissant les infractions aux prescriptions de police en matière de navigation rhénane. 600 infractions sont constatées en moyenne chaque année sur le Rhin français.

Il faut rappeler que la sanction de ces infractions obéit à un régime juridique original puisque les Etats membres et la CCNR partagent la compétence de leur détermination. En effet, l'article 32 de la convention dispose que « les contraventions aux prescriptions de police en matière de navigation, établies pour le Rhin d'un commun accord par les gouvernements des États riverains, seront punies d'une amende d'un montant correspondant au minimum à 3 et au maximum à 2 500 droits de tirage spéciaux sur le fonds monétaire international [...] ». Or, traditionnellement, les textes internationaux laissent le soin aux législateurs nationaux d'édicter les infractions et les peines correspondantes, sans prévoir de plafond pour ces dernières.

La difficulté qui pourrait résulter de la contradiction entre la compétence de la commission pour fixer le plafond des sanctions et celle de l'Etat membre pour déterminer lesdites sanctions est en pratique surmontée : en effet, le règlement de police pour la navigation du Rhin qui établit les prescriptions de police s'inspire très largement du règlement général de police de la navigation qui s'applique en France, favorisant ainsi l'uniformité du régime de sanction ; en outre, un catalogue de peines très précis, mais à valeur seulement indicative, a été élaboré par la Commission du Rhin à l'intention des juridictions nationales, afin de guider utilement celles-ci et d'harmoniser les peines prononcées pour les infractions commises sur l'ensemble de la voie fluviale ; enfin, le respect du droit rhénan est assuré, en application de l'acte de Mannheim, par un ordre juridictionnel spécifique, qui comporte des « tribunaux rhénans » dans chaque État membre, constituant un premier degré de juridiction, et une chambre des appels de la Commission du Rhin, intervenant en appel. Le tribunal d'instance de Strasbourg est ainsi juge rhénan de premier degré et la juridiction d'appel est la cour d'appel de Colmar.

L'importance du trafic fluvial européen (environ 520 millions de tonnes, + 13,5 % sur la période 1995 -2006) et le développement important du transport spécialisé (plus de 60 millions de tonnes de matières dangereuses transportées chaque année par la voie fluviale) ont conduit à un renforcement progressif des règles de sécurité applicables sur le Rhin. Parallèlement, la législation des différents pays riverains relative à la police de la navigation est devenue plus rigoureuse, en particulier en ce qui concerne la sécurité des personnes, les atteintes à l'environnement se produisant en navigation et le transport de matières dangereuses.

Pourtant, aucun relèvement du montant des amendes n'avait été effectué depuis 1979 par la CCNR. Il s'agit donc aujourd'hui de mettre la convention en conformité avec des législations nationales souvent plus pénalisantes.

A cette fin, le sixième protocole modifie l'article 32 de la convention pour porter le plafond de 2500 droits de tirage spéciaux (soit environ 2 700 euros) à 25 000 euros et supprime le plancher jusqu'alors de 3 droits de tirage spéciaux.

Si ce relèvement du montant maximal des amendes est nécessaire au regard de sa législation, la France a néanmoins tardé à ratifier le protocole en raison d'une incertitude sur la portée de la modification qu'il propose.

Le plafond actuel de 2 700 euros pour les amendes est en effet insuffisant puisque les différentes lois applicables au transport fluvial en France prévoient des sanctions plus lourdes pour certaines infractions.

Par ailleurs, il est apparu nécessaire, pour respecter le principe de proportionnalité des délits et des peines, de préciser, par une déclaration interprétative adoptée à cet effet par les Etats parties, que l'objet du protocole n° 6 est bien de fixer un plafond, qui s'applique sans préjudice du droit interne, lequel détermine seul les délits et les peines. Par conséquent, le droit interne continuera à déterminer les sanctions selon la gravité des infractions commises, sous la seule réserve que les peines infligées par les juridictions compétentes ne puissent dépasser le plafond fixé. Cette interprétation est d'ailleurs conforme à celle qui a toujours été donnée par les juridictions ayant à appliquer l'article 32 de l'Acte de Mannheim.

En conclusion, le sixième protocole à la convention de Mannheim révisée, de portée limitée, permettra d'améliorer le respect des règles de navigation rhénane.

Alors que la France est le seul Etat membre de la Commission centrale de navigation sur le Rhin à n'avoir pas encore ratifié le présent protocole, je vous propose d'adopter le présent projet de loi.

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