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Intervention de Marc Goua

Réunion du 28 juin 2011 à 15h00
Équilibre des finances publiques — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarc Goua :

Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, le projet de loi que vous nous proposez est à l'évidence une opération électoraliste.

En effet, vous avez fait preuve d'une irresponsabilité flagrante dans la gestion de comptes publics depuis 2002, avec une accélération depuis 2007. Or, aujourd'hui, sous la pression des marchés et des agences de notation, le Président de la République vous demande d'inscrire dans la Constitution des règles contraignantes de gestion, pas contraignantes pour vous mais contraignantes pour les gouvernements à venir. Pour que votre proposition fût crédible, il eût fallu les respecter au cours des dernières années !

De plus, ces règles existent déjà : le traité de Maastricht, l'article 20 de la loi organique relative au financement de la sécurité sociale ou encore la règle de compensation de toute nouvelle dépense fiscale. Las, vous avez allègrement transgressé toutes ces règles les unes après les autres. Entre les deux lectures du texte, vous n'avez d'ailleurs pas hésité, dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2011, à relever le seuil d'assujettissement à l'ISF et à abandonner deux milliards d'euros de recettes, la contrepartie de ces mesures étant pour le moins aléatoire.

Le dernier rapport de la Cour des comptes, publié la semaine dernière, présente un bilan cruel de votre gestion et confirme les inquiétudes qu'inspirent les finances publiques de notre pays et l'avenir de la protection sociales de nos concitoyens. En son temps, votre prédécesseur, M. Woerth, que j'interrogeais lors des questions d'actualité, m'avait répondu qu'il n'était pas d'accord avec les conclusions de la Cour des comptes.

Dans son nouveau rapport, la Cour confirme les analyses précédentes et stigmatise votre gestion.

L'aggravation du déficit structurel et l'explosion de la dette, c'est vous ! En effet, le déficit structurel est passé de 3,7 % du PIB en 2007 à 4,6 % en 2009, pour atteindre 4,9 % en 2010 hors effet du plan de relance. Cette aggravation est due pour les deux tiers à votre gestion et non à la crise.

Après s'être timidement réjouie de la maîtrise des dépenses publiques en 2010, la Cour signale que « la norme de croissance zéro du volume des dépenses n'a en réalité pas été respectée, malgré les charges d'intérêts inférieures aux prévisions ».

De plus, l'impact du ralentissement des dépenses, représentant 0,5 % du PIB, a presque été compensé par des baisses d'impôts qui représentent 0,4 % du PIB. Le facteur essentiel qui explique ce ralentissement est la diminution de 1,9 % des dépenses publiques locales ; cela représente effectivement les deux tiers de la baisse. Or ce sont ces collectivités qui ont subi à plusieurs reprises les critiques du Président de la République et de sa majorité pour une gestion jugée irresponsable.

La conclusion de la Cour des comptes est que « l'effort structurel a été quasiment nul en 2010 ».

La Cour compare les résultats de notre pays à ceux de nos voisins européens et aux pays de l'OCDE. Le constat est accablant : dans la plupart des pays, la reprise économique a permis de réaliser des résultats meilleurs que les prévisions grâce à une augmentation des recettes. Ce n'est pas le cas chez nous. Les cadeaux fiscaux destinés aux plus riches qui se succèdent entraînent, pour notre pays, un déficit structurel supérieur a la moyenne européenne, et la comparaison avec nos amis allemands est encore plus édifiante.

La Cour vous met en garde et dénonce votre gestion qui pourrait nous entraîner dans la spirale négative que connaissent la Grèce, l'Irlande et le Portugal.

Cette évolution et cette situation qui diverge de celle de nos voisins européens sont le fruit de vos nombreuses niches fiscales et sociales. La Cour émet des doutes à propos de leur efficacité économique et en termes d'emploi. Elle souligne des coûts exorbitants eu égard aux résultats et cite, entre autres, l'exonération d'impôt et de cotisations sociales des heures supplémentaires, le plafond des réductions sur l'aide à la personne et certaines aides à l'embauche dans le secteur marchand. Elle demande la remise à plat de l'ensemble des dépenses fiscales liées à la mission « Travail et emploi ». Rappelons que les niches fiscales et sociales représentent aux environs de 140 milliards d'euros de pertes de recettes par an pour l'État. Monsieur le ministre, la responsabilité du Gouvernement dans une dégradation de nos finances publiques qui met en difficulté notre économie et l'ensemble de nos concitoyens est avérée.

En ce qui concerne l'opportunité de ce projet de loi constitutionnel, la Cour précise ceci dans sa conclusion générale : « La réduction du déficit structurel ne viendra pas seulement des règles mais aussi de réformes d'une ampleur suffisante et poursuivies dans la durée. Elle est possible si la répartition des efforts est adéquate entre l'action sur les dépenses et les augmentations de recettes. »

Ce n'est pas d'une loi d'affichage supplémentaire que nous avons besoin, c'est d'une volonté politique, d'une gestion cohérente et d'une répartition équitable des richesses.

Nous ne pouvons adhérer à ce texte qui vise à substituer à cette volonté politique des règles contraignantes dont vous vous êtes exemptés. Vous comprendrez que nous ne voterons pas ce texte de circonstance. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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