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Intervention de Hervé Mariton

Réunion du 27 juin 2011 à 21h30
Projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour l'année 2010 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHervé Mariton :

J'approuve totalement votre analyse sur le déroulement du semestre européen. Le dépôt avant la transmission du programme de stabilité à Bruxelles d'un projet de loi de programmation me paraît en effet absolument essentiel. Il y a quelques semaines, j'avais d'ailleurs demandé ici même, à l'occasion d'un autre débat, ce qui se passerait si, d'aventure, le Gouvernement voulait prendre en compte un certain nombre d'observations que nous présentons.

J'ajoute immédiatement, en cohérence avec mon propos précédent, que le rôle du Parlement n'est pas uniquement de présenter des observations et de discuter aimablement et courtoisement avec le Gouvernement. Il est aussi, éventuellement, de voter ce qui pourrait être, demain, des amendements au programme de stabilité par le biais d'amendements au projet de loi de programmation. Cela me paraît important dans une démocratie.

Notre débat ce soir est éclairé par un certain nombre d'observations de la Cour des comptes, sur lesquelles je m'attarderai quelques instants.

Elle a tout d'abord dénoncé les dysfonctionnements de Chorus. Monsieur le ministre, vous qui avez en charge la politique de réforme de l'État, on ne rappellera jamais assez combien les enjeux des systèmes d'information sont sous-évalués au moment de la prise des grandes décisions de politique publique, qu'il s'agisse de la gestion ordinaire de l'État ou des grandes réformes sur lesquelles nous nous engageons. S'il est important de débattre des grands principes, il est tout aussi important que les systèmes d'information soient au rendez-vous pour que les projets du Gouvernement tout comme la volonté nationale que nous exprimons puissent effectivement être mis en oeuvre.

La Cour des comptes a ensuite fait des observations importantes sur le zéro volume, les risques de la débudgétisation et les difficultés d'appréciation. En d'autres termes, elle a exprimé des doutes sur la réalité d'une application impeccable du zéro volume. Je crois – et je le regrette – que la Cour des comptes a raison et que des distances ont été prises avec cette règle, ce qui est dommage, d'autant que le sérieux nécessaire à la gestion de nos comptes publics passe par un respect plus strict de cette règle du zéro volume.

Sans remettre en cause la stratégie des investissements à venir, la Cour attire aussi notre attention sur les difficultés d'une nomenclature budgétaire. Au fond, elle insiste sur la nécessité qu'il y a à ne pas multiplier à l'excès les souplesses que ce concept permet d'introduire dans la nomenclature budgétaire, les agrégats budgétaires et notre discussion.

La stratégie qui est derrière, ou plus exactement, devant les investissements d'avenir est assurément judicieuse. Elle ne nous dispense pas d'intégrer cette ambition à ce que doit être notre discipline budgétaire.

Je m'arrêterai maintenant quelques instants sur les rapports annuels de performance.

Vous avez aimablement cité, monsieur le ministre, les propositions que les différents rapporteurs spéciaux ont exprimées à l'occasion de ces travaux et à l'occasion du débat d'aujourd'hui.

Bien sûr, le Gouvernement pensera ce qu'il veut des propositions que les rapporteurs spéciaux se sont donné la peine de formuler ; il est libre de les prendre en compte ou de les rejeter, mais, même si ce n'est pas prévu par les textes, il pourrait être intéressant, judicieux, stimulant pour la discussion parlementaire – qui aborde volontiers les recettes, mais pas assez les dépenses – que le Gouvernement prenne l'engagement de répondre point par point à ces propositions.

En tant que rapporteur spécial des crédits des transports, de la nature, des paysages et de la biodiversité, j'ai quelques observations à faire à cet égard, monsieur le ministre. Ainsi, en ce qui concerne l'AFITF, on peut estimer que, d'ici à 2014, 24 milliards d'euros resteront à payer, sans assurance de financement. D'ores et déjà, aujourd'hui, pour le financement des infrastructures de transports, il y a, au titre des engagements pris par l'AFITF, des restes à payer de 7 milliards d'euros. Nous nous sommes engagés dans une impasse, ce qui est grave pour la réalité de notre politique d'infrastructures – il faut se donner les moyens de ses ambitions – et représente en même temps une réelle difficulté budgétaire.

Dans le domaine de l'urbanisme, de la nature et des paysages, certains financements croisés ne sont pas heureux. Ainsi, le caractère du fonds d'aide à l'acquisition de véhicules propres – avec son dispositif de bonus-malus – est structurellement déséquilibré, son déficit se montant à plus de 500 millions d'euros en 2010. J'ai proposé la suppression de ce fonds totalement inadapté à une politique, sans doute intelligente, de subventionnement, pour laquelle l'outil budgétaire n'est pas approprié.

J'ai déjà dit que je regrettais que le compte d'affectation spéciale, qui depuis huit ans assurait la traçabilité des amendes de radars automatiques, ait été confondu dans un compte d'affectation spéciale qui n'est plus ni affecté ni très spécial, et qui reçoit l'ensemble des contraventions – radars automatiques, radars ordinaires, amendes majorées. Nous aurions été armés tout autrement pour répondre aux malencontreuses polémiques qui se sont développées, il y a quelques semaines, à propos de la politique de sécurité routière.

Enfin, en l'écoutant et en lisant son rapport, je me disais que le rapporteur général s'était montré assez sévère pour l'année 2010, aimable pour 2011 et optimiste pour 2012. Tout cela nous rappelle que notre effort en matière de maîtrise de la dépense doit être constant et soutenu. Vous connaissez mon analyse : pour le rétablissement de nos comptes publics, notre priorité principale doit être, en 2012, de consentir un effort nettement plus important que les années précédentes, et passant d'abord par la maîtrise de la dépense. Certains ont critiqué, peut-être avec raison, le mouvement qui a conduit l'Allemagne à rouvrir ces derniers jours un débat sur la baisse des impôts. Il ne me semble pas que cela fasse aujourd'hui partie des engagements que doit prendre le Gouvernement. Toujours est-il que, dans notre débat sur la manière d'assainir les comptes, sur la priorité à donner à l'augmentation des prélèvements obligatoires ou à la maîtrise de la dépense, je me situe résolument du côté de la maîtrise de la dépense.

Il est vrai que les prélèvements obligatoires n'augmentent pas seulement du fait de vos propositions et de nos décisions : ils augmentent aussi parce qu'il en est ainsi, mécaniquement, quand il y a reprise. Nous souhaitons qu'il y ait reprise – il semble d'ailleurs que nous soyons sur la bonne voie –, mais nous devons veiller à ce que nos décisions budgétaires et politiques n'aggravent pas la situation. L'augmentation des prélèvements obligatoires ne figure ni dans la philosophie ni dans le programme de notre majorité. Notre vertu budgétaire, c'est d'abord la maîtrise de la dépense.

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