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Intervention de Anne Guillaume

Réunion du 21 juin 2011 à 17h00
Mission d'information relative à l'analyse des causes des accidents de la circulation et à la prévention routière

Anne Guillaume :

Le laboratoire d'accidentologie, de biomécanique et d'études du comportement humain, ou LAB, a été créé en 1969 par Renault et PSA – devenu depuis PSA Peugeot-Citroën –, à un moment où le nombre de tués sur les routes ne cessait de s'élever. Sa vocation est d'analyser les causes et les conséquences des accidents. En effet, ceux-ci étant le plus souvent d'origine multifactorielle, la sécurité routière doit être l'affaire de tous les acteurs, pouvoirs publics, conducteurs ou constructeurs.

En tant que laboratoire de recherche amont, le LAB produit des connaissances scientifiques pour les deux constructeurs en sorte qu'ils puissent développer des systèmes de sécurité adaptés. Nous analysons les causes des accidents à partir de bases de données et d'enquêtes que nous conduisons sur le terrain et, sur ce fondement, nous établissons des hypothèses sur lesquelles travaille le service de biomécanique. Nous sommes alors à même de fournir aux constructeurs des éléments pour la mise au point des systèmes de sécurité. Ensuite, nous vérifions l'efficacité de ceux-ci, en biomécanique, par nos enquêtes sur le terrain et via nos bases de données accidentologiques, en cherchant à identifier les dispositifs les plus prometteurs.

L'accidentologie recouvre un champ très vaste. Nous travaillons à la fois en faveur de la sécurité primaire – prévenir l'accident – et en faveur de la sécurité secondaire – réduire autant que possible les conséquences de l'accident. Nous étudions aussi les comportements des conducteurs afin de déterminer leurs besoins et de leur fournir les aides à la conduite les plus appropriées.

Nous nous appuyons sur des bases de données nationales et internationales – européennes en particulier mais nous recourons aussi à la GIDAS (German In-Depth Accident Study) allemande et à la CCIS (Co-operative Crash Injury Study) britannique. Cependant, le LAB a aussi constitué ses propres bases. Ainsi, en accidentologie secondaire, nos spécialistes examinent les véhicules accidentés pour déterminer le type de choc, sa force, pour être à même d'établir ensuite comparaisons et statistiques ; ils relèvent également les dispositifs de sécurité dont étaient dotés les véhicules impliqués ainsi que les lésions subies par les occupants, afin d'établir le lien entre choc et lésion.

Pour donner un exemple de nos conclusions, l'enquête effectuée par le LAB sur l'évolution des lésions, graves à mortelles, subies par un conducteur ceinturé lors d'un choc frontal démontre que les dispositifs dont les véhicules ont été dotés au fil des années – en premier lieu le renforcement de l'habitacle, mais avec tous les compléments indispensables que sont l'airbag, la ceinture de sécurité, les limiteurs d'efforts, etc., car la rigidité accrue des structures augmente l'énergie transmise aux passagers – ont permis de diminuer très sensiblement l'importance des lésions pour un même choc.

Dans le domaine de l'accidentologie primaire, les équipes du LAB, en coopération avec le Centre européen d'études de sécurité et d'analyse des risques (CEESAR), recueillent sur le terrain les informations labiles sur les conditions de survenue des accidents. Cela permet de déterminer les situations accidentelles et leur fréquence, d'analyser de façon très détaillée ce qu'on appelle les « pertes de contrôle », mais aussi, à partir de scénarios réels, de tester ensuite par simulation les systèmes de sécurité primaire. Nous avons ainsi, dans le cadre du projet européen TRACE, démontré que l'aide au freinage d'urgence et le système de contrôle électronique de stabilité ESC permettaient de réduire de 70 % le nombre des blessures graves ou mortelles.

La biomécanique consiste à tester de façon rigoureuse toutes les hypothèses de lésion en laboratoire, en reproduisant expérimentalement les conditions des accidents. Il s'agit d'évaluer, à l'aide de mannequins – nous en avons un pour chaque type de choc – le risque de lésions, de comprendre les mécanismes à l'oeuvre. Nous essayons également d'améliorer les mannequins utilisés par les constructeurs pour évaluer leurs systèmes de sécurité – nous espérons parvenir à dépasser le stade des modèles numériques pour arriver à un « modèle être humain ».

On a avec la ceinture de sécurité un exemple de ce que peut produire la collaboration entre le LAB et les constructeurs. Il s'agit en effet, sous une apparente simplicité, d'un dispositif extrêmement complexe comportant un bloqueur de sangle, des prétensionneurs et un limiteur d'effort thoracique, dont la mise au point a été permise par une analyse biomécanique de l'effort supporté au niveau du thorax lors d'un choc – et nos données accidentologiques ont confirmé l'efficacité d'un tel dispositif pour réduire les risques de lésions graves.

Depuis de nombreuses années, le LAB est très impliqué dans des projets européens axés sur la protection des enfants. Il a ainsi reconstitué un accident pour rechercher l'origine des lésions abdominales observées sur une fillette en dépit du dispositif de retenue, et a conclu à une mauvaise position du harnais. Plus généralement, une étude sociologique menée dans le cadre du projet européen CASPER (Child Advanced Safety Project for European Roads), a mis en évidence un taux de 70 % d'utilisation incorrecte des dispositifs de retenue destinés aux enfants, les DRE. C'est à partir de ces observations que les constructeurs ont mis au point le système ISOFIX d'ancrage de sièges qui équipe tous les nouveaux véhicules depuis 2009.

Dans l'avenir, le LAB a l'ambition d'améliorer la sécurité des nouveaux véhicules électriques, de travailler sur les véhicules « communicants » et de participer à des projets internationaux.

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