Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur général, chers collègues, à défaut de pouvoir réellement influer sur les projets de loi de finances, au moins avons-nous l'honneur de pouvoir débattre et de nous prononcer sur le projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion de l'année écoulée. Je veux à cette occasion revenir sur plusieurs points.
Tout d'abord, et il serait bon qu'en la matière la majorité et le Gouvernement abandonnent toute autosatisfaction, faisons un retour sur la période 2002-2010. Je reprends la synthèse produite par la Cour des comptes : Résultats et gestion budgétaire de l'État – Exercice 2010. Le graphique de la page 33, très parlant, montre l'évolution des résultats budgétaires au regard de ce qui était initialement prévu dans les projets de loi de finances : on constate un basculement très net en 2007. Entre 2002 et 2007, en tout cas à partir de 2003, le déficit réalisé a été à plusieurs reprises un peu moins important que prévu. Il est à noter, nous l'avions dit en 2008 lors de l'examen de l'exécution de la loi de finances pour 2007, qu'on était arrivé en loi de finances initiale à 34,7 milliards d'euros de déficit, soit une réduction par rapport au début du quinquennat de Jacques Chirac, et qu'il y a eu une brusque dégringolade au cours de l'année, c'est-à-dire bien avant le déclenchement de la crise, puisque le déficit a atteint 56,3 milliards d'euros. C'est évidemment nettement plus que ce qui avait été prévu.
Avec la loi pour l'emploi, le travail et le pouvoir d'achat, la fameuse loi TEPA, que nous avions rebaptisée le « paquet fiscal » puisque c'était vraiment un paquet de cadeaux fiscaux, le déficit a été brusquement aggravé de près de 22 milliards d'euros. On en retrouve évidemment ensuite les effets, d'une ampleur beaucoup plus importante, en 2008, en 2009 et en 2010. Il faut noter que, toujours dans sa synthèse, la Cour des comptes souligne que l'exercice 2010, contrairement à ce que vous déclarez souvent, monsieur le ministre, a été marqué par le dynamisme de certaines dépenses. En effet, vous dites qu'il y a beaucoup de déficits, mais que vous essayez vraiment de contenir les dépenses. Or, selon la Cour, la dépense la plus « dynamique », c'est la charge de la dette, qui a cru de 7,7 % en 2010 par rapport à 2009. On voit bien là les résultats directs de cette politique qui consiste à laisser filer les déficits et la dette puisqu'on en retrouve directement les effets dans les dépenses de l'État : les dépenses liées au financement de la dette explose.
J'en viens au bilan de ce qu'on a appelé soit la réforme, soit la suppression de la taxe professionnelle. Nous, nous n'y étions pas favorables sous cette forme car il s'agit en fait d'un nouveau cadeau fiscal non financé. Certes, au début, un tour de passe-passe était prévu : le Gouvernement avait imaginé alléger la taxe professionnelle, mais tout en créant un nouveau prélèvement sur les entreprises à travers la taxe carbone. Il s'agissait de reprendre d'une main ce qui était donné de l'autre. On sait ce qu'il est advenu de la taxe carbone : vous l'avez abandonnée en rase campagne après la décision du Conseil constitutionnel, décision qui avait été largement anticipée du côté de l'opposition puisque nous avions pointé les risques de cette formule fiscale. On se retrouve donc aujourd'hui avec un bilan très lourd après la réforme de la taxe professionnelle. Il y a d'ailleurs une querelle de chiffres entre vous et le rapporteur général ; en tout cas, la Cour des comptes estime qu'« une incertitude subsiste sur la charge financière supplémentaire nette supportée par le budget de l'État ».
Pour finir, je veux dire un mot sur une donnée un peu cachée de votre bilan, en tout cas une donnée sur laquelle vous ne vous étendez pas, monsieur le ministre : le fameux non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux dans la fonction publique. La Cour des comptes en a chiffré les gains à 808 millions d'euros, mais en précisant que cette économie a été rétrocédée aux agents – ce que nous ne contestons pas forcément – à hauteur de 47 %. L'économie pour le budget se monte donc à peine à 420 millions d'euros alors que, pour nos concitoyens, c'est une mesure très difficile à supporter au vu de la situation dans l'éducation nationale, dans la justice, dans la police ou dans la fonction publique hospitalière.
C'est pour toutes ces raisons et bien d'autres encore que le groupe GDR votera contre ce projet de loi de règlement. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur de nombreux bancs du groupe SRC.)