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Intervention de George Pau-Langevin

Réunion du 21 juin 2011 à 22h00
Participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et jugement des mineurs — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGeorge Pau-Langevin :

…elle concerne surtout les moyens alloués à l'administration pénitentiaire. Le budget de la protection judiciaire de la jeunesse est, lui, en diminution. Et le maintien des moyens des services ne leur permet évidemment pas d'absorber le surcroît d'activité que vous leur demandez en multipliant les incriminations de toute nature.

Récemment encore, dans la loi de finances rectificative, vous avez su trouver deux milliards d'euros afin d'alléger les impôts des contribuables les plus riches. Ces deux milliards vous auraient été particulièrement utiles si vous aviez voulu augmenter les moyens de la justice.

Vous nous proposez aujourd'hui un projet de loi qui part d'une idée avec laquelle tout le monde ne peut qu'être d'accord : augmenter la participation des citoyens au jugement des délits, c'est évidemment une idée à laquelle on ne peut pas s'opposer. Mais quand on entre dans le détail du texte, on voit que les choses deviennent beaucoup plus floues.

Le périmètre de cette participation des citoyens est très flou. Les infractions économiques et financières, notamment, qui causent pourtant un trouble important à l'ordre public, n'en font pas partie. Nous constatons également que le mode de désignation des assesseurs est tout à fait hybride. D'un côté, on nous dit qu'on va les choisir en les tirant au sort sur les listes électorales. Mais de l'autre, on leur fait passer un petit examen sous la forme d'un recueil d'informations qui semble destiné à apprécier dans quelle mesure ils seront capables de remplir la mission qu'on va leur confier. On peut également se demander si la commission chargée de recueillir ces renseignements ne va pas tenter de savoir si ces personnes tirées au sort n'auraient pas des idées subversives, des idées sur la justice qui ne conviendraient pas à ceux qui les ont choisies.

On ne comprend pas non plus pourquoi, s'agissant des mineurs, vous supprimez des assesseurs qui avaient été choisis parce qu'ils étaient compétents et intéressés par les questions concernant les mineurs, et ce pour pouvoir les remplacer par des gens tirés au sort, qui n'y connaissent rien.

Un autre problème se pose, qui est assez surprenant. L'un des reproches que l'on fait le plus souvent à la justice est sa lenteur. Or, cette nouvelle procédure allongera considérablement les délais de jugement en correctionnelle, puisque les magistrats devront non seulement s'acquitter de leur travail, mais aussi expliquer en permanence à des novices les raisons pour lesquelles on doit procéder à telle ou telle décision, que ces raisons tiennent à la jurisprudence ou à des règles de procédure. Les « élèves » qui seront à leur côté ne pourront évidemment pas avoir des réflexes aussi rapides que les magistrats professionnels.

Vous avez également prévu que les décisions devront se prendre séance tenante, ce qui obligera le jury, après chaque affaire, à s'interrompre pour délibérer. Cela conduira à allonger considérablement les procédures. À cela s'ajoute le fait que nous passerons, en matière correctionnelle, d'une procédure sur dossier à une procédure orale, qui sera manifestement plus longue.

S'agissant de la participation des citoyens au jugement des crimes, vous dites vouloir éviter la correctionnalisation. C'est là un argument que nul ne peut recevoir. Car la meilleure manière d'éviter la correctionnalisation, c'est de mettre les moyens suffisants pour que les cours d'assises puissent être plus nombreuses et siéger plus longtemps.

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