Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Gérard Cherpion

Réunion du 15 juin 2011 à 21h30
Alternance et sécurisation des parcours professionnels — Discussion après engagement de la procédure accélérée d'une proposition de loi

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGérard Cherpion, rapporteur de la commission des affaires sociales :

Monsieur le président, monsieur le ministre du travail, de l'emploi et de la santé, madame la ministre chargée de l'apprentissage et de la formation professionnelle, mes chers collègues, je voudrais, en propos liminaire, appeler votre attention sur quelques réalités statistiques qui me paraissent impressionnantes.

Chaque année, pour une entreprise de cent personnes, on a désormais, en moyenne, quarante-cinq embauches et autant de départs. Ce niveau de rotation de la main-d'oeuvre est encore plus important si l'on s'en tient aux ouvriers non qualifiés, aux employés ou aux jeunes salariés en général. Pas plus que quiconque, je ne me réjouis de cette instabilité de l'emploi, mais c'est une réalité que nous devons prendre en compte : il n'est plus envisageable de garantir au plus grand nombre un emploi, voire un métier, à vie.

Dès lors, le développement des politiques de sécurisation des parcours professionnels est déterminant, l'objectif étant de construire pour tous des parcours valorisants, avec des périodes de recherche d'emploi limitées et des opportunités de promotion ou de reconversion professionnelle et d'ascension sociale. La formation professionnelle tout au long de la vie est naturellement un outil qui peut être très puissant dans ce domaine, mais là aussi, les statistiques nous apprennent qu'il reste beaucoup à faire : l'INSEE a observé que seulement 61 % des actifs de quinze à cinquante-cinq ans ont une spécialité de formation professionnelle, et surtout que, parmi eux, seuls 40 % ont un emploi en adéquation avec cette spécialité.

Le troisième fait établi par les évaluations est que l'alternance sous statut de travail, dans le cadre de l'apprentissage ou des contrats de professionnalisation, constitue l'une des voies les plus efficaces d'insertion dans l'emploi. Les analyses récentes du Centre d'études et de recherches sur les qualifications, le CEREQ, à propos de l'insertion des jeunes sortis du système de formation démontrent un réel avantage pour ceux qui sortent de l'apprentissage, à niveau de diplôme égal, par rapport aux jeunes restés dans le système scolaire : à terme, plus de chances d'avoir un emploi, plus de chances d'obtenir un emploi à durée indéterminée, de meilleurs salaires, avec des écarts importants. L'alternance, en apportant un revenu salarial, est aussi un mode de financement des études. Bref, c'est « un métier, un diplôme, un revenu ».

Enfin, je dirai quelques mots des résultats d'une expérience à laquelle je suis très attaché, celle du contrat de transition professionnelle, le CTP, dans le bassin d'emploi de Saint-Dié, que je connais plus particulièrement. Grâce à l'implication de tous les acteurs, en particulier des services de l'État, de la filiale de l'AFPA Transitio CTP et des OPCA financeurs de la formation professionnelle, nous avons réussi, sur les dernières cohortes de bénéficiaires, à obtenir plus de 68 % de reclassement en emploi durable, dans un bassin d'emploi où il y a plus de 13 % de chômage, avec une population de bénéficiaires massivement constituée de salariés de l'industrie souvent relativement âgés.

C'est la prise en compte de tous ces faits qui explique la proposition de loi que Bernard Perrut, Jean-Charles Taugourdeau et moi-même avons l'honneur de vous présenter. Toutes les dispositions de ce texte sont centrées sur la sécurisation des parcours.

En premier lieu, il s'agit de développer les formations en alternance, suite au discours prononcé à Bobigny, le 1er mars dernier, par le Président de la République. La promotion de l'alternance doit nécessairement passer par plusieurs canaux : des incitations financières aux entreprises certes, mais également des aménagements de la réglementation pour lever certaines limitations juridiques et ouvrir de nouveaux champs aux formations par ce moyen, ainsi que des mesures de simplification administrative, et surtout des mesures, à la fois de principe et pratiques, de reconnaissance des jeunes qui s'y engagent autant que des entreprises qui s'y impliquent. Telle est la panoplie de propositions que ce texte s'efforce de mettre en place.

En commission des affaires sociales, nous avons largement enrichi le texte initial, par exemple en instituant un label pour les entreprises qui s'impliquent dans l'alternance, en ouvrant la voie à l'expérimentation de l'apprentissage dans le cadre du travail temporaire ou encore en proposant des mesures pour faciliter la transition entre le système scolaire et l'apprentissage, en particulier pour adapter le système de l'apprentissage à la mise en place du baccalauréat professionnel en trois ans. Ces apports ont notamment été inspirés par la soixantaine d'auditions que j'ai réalisées à Paris et à Épinal, qui m'ont permis de recueillir des suggestions de toutes origines, parfois en provenance de groupes d'intérêt que nous connaissons tous, mais souvent aussi consécutives à l'expérience de terrain de personnes qui n'ont pas fréquemment l'occasion de s'exprimer sur un texte législatif – je pense ainsi à des chefs d'entreprise, des directeurs de CFA, des fonctionnaires territoriaux ou de l'État, des syndicalistes ou des représentants professionnels locaux.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion