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Intervention de Arnaud Bosom

Réunion du 8 juin 2011 à 10h00
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Arnaud Bosom, directeur général adjoint de TF1 chargé de la stratégie, de l'organisation et du marketing groupe :

La création ou non de nouvelles chaînes n'épuise pas la question que vous nous avez posée concernant notre stratégie face à l'arrivée des acteurs de l'internet. Nous avons soulevé les uns et les autres bien des points et, maintenant, le débat se focalise sur cette seule question. Je crains qu'effectivement prospèrent ces nouveaux acteurs si nous nous en tenons à des questions de cette nature. Croyez-vous que les autres pays européens qui comptent une offre élargie avec dix-huit à vingt-cinq chaînes ne craignent pas l'arrivée de la télévision connectée pour la seule raison qu'ils disposeraient aujourd'hui de suffisamment de chaînes ? Cela n'est pas très sérieux.

La création de nouvelles chaînes « thématisées » est à mon sens une vue de l'esprit. En effet, très fréquemment, et cela s'est produit depuis l'arrivée des chaînes de la TNT, on assiste à un repositionnement des chaînes qui rapidement souhaitent se situer sur le marché publicitaire captif. Nous allons voir fleurir ici et là des nouveaux projets séduisants qui s'adressent à des publics que l'on peut estimer insuffisamment couverts par les programmes actuels. La réalité est que les contraintes publicitaires exigent ensuite que les chaînes se situent sur le segment des chaînes généralistes comme M6 ou TF1 pour chercher la valeur publicitaire. Cela est visible à l'analyse des grilles de programmes des chaînes de la TNT sur la durée. On a oublié de dire que le marché publicitaire n'est pas extensible à l'infini. Il croît en moyenne de 3 % par an, pour ce qui est du marché médias qui est d'environ trois milliards d'euros. De plus, internet est venu capter une part de cette valeur.

Une question fondamentale a été posée concernant la protection de l'enfance. Nous nous rejoignons tous pour dire que la réponse à l'arrivée de la télévision connectée n'est ni de se plaindre, ni de freiner ce qui est inéluctable. En revanche, puisque la question de la protection de l'enfance rejoint celle de la réglementation, il faut raisonner en termes simples et binaires : ou bien nous jouons avec la même règle du jeu et les nouveaux acteurs doivent être régulés de manière équitable et dans une compétition loyale – et nous avons le talent et les moyens de nous battre dans une telle compétition –, ou bien il faut nous déréguler pour ne pas nous handicaper. Voici la véritable question, qui a trait à la protection du consommateur. Le fait que des programmes puissent se retrouver sur le téléviseur entourés de publicités pour l'alcool, le tabac, alors que ce sont des secteurs interdits aujourd'hui, ou d'affichages parasites pendant les programmes à destination des enfants, tel est le sujet majeur auquel il faut apporter une réponse. Par ailleurs, d'un point de vue strictement économique, nos groupes et nos chaînes ne pourraient pas vivre si certains acteurs viennent en « coucou » sur notre signal pour venir aspirer l'audience et, en conséquence, des revenus.

Notre préoccupation ne doit donc pas être exclusivement de savoir si Canal + doit créer une chaîne en clair ou si les nouveaux entrants doivent disposer d'une nouvelle chaîne. Plus globalement, le nombre total de chaînes n'est pas déterminant : que nous ayons dix-neuf ou vingt-cinq chaînes, de toute façon, YouTube proposera les siennes. Il faut reconnaître que la compétition est devant nous. C'est pourquoi il faudra notamment des moyens pour les programmes. Aujourd'hui TF1 met environ un milliard d'euros dans sa grille chaque année, ce qui explique que la contribution à la production à la fois du cinéma et de la fiction est au rendez-vous. J'indique que par comparaison, pour une chaîne de la TNT, le coût de la grille de programmes est sensiblement inférieur, vingt à trente millions d'euros, même si des progressions sont possibles.

Enfin, si nous voulons résister à ces groupes internationaux puissants, il faut que nous le soyons également. A cet égard, la dispersion de nos forces ne nous est pas favorable, contrairement à la situation dans d'autres pays d'Europe où les groupes de médias sont au nombre de trois ou quatre. En France, le paysage audiovisuel s'est construit ces dernières années différemment, je ne suis pas certain que ce soit une force collective suffisante.

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