Lorsque le groupe Bolloré a répondu, en 2001, à l'appel à candidatures du CSA, avec le projet de Direct 8, nous ne connaissions rien au secteur de la télévision. Nous entendions le discours selon lequel le marché publicitaire de la télévision, moins développé en France que dans les autres économies comparables, sans aller jusque en Inde, allait connaître une progression. Or, il n'en a rien été au cours des dix dernières années. Le marché publicitaire de la télévision s'élève toujours à un peu plus de 3 milliards d'euros et a subi un fort « trou d'air » il y a trois ans dont nous avons encore beaucoup de mal à nous relever. On peut penser qu'il s'agit d'un aspect structurel du marché de la publicité en France, qui restera durablement quelque peu sous-investi en télévision par rapport à d'autres économies comparables. Mais, depuis dix ans, il y a eu de nouveaux concurrents de la télévision qui ont absorbé beaucoup de la publicité : télévision de rattrapage et essor de la publicité sur Internet. De nouvelles chaînes ne permettraient pas à nos groupes de se développer parce que cette nouvelle offre d'espaces publicitaires entraînerait mécaniquement une baisse des prix en nous appauvrissant et en nous mettant en difficulté. Cela n'est pas un réflexe protectionniste de notre part – depuis dix ans, nous avons investi 250 millions d'euros, nous ne sommes pas encore à l'équilibre et ne gagnons pas encore d'argent – mais il est vrai que beaucoup de nos groupes peuvent être mis en danger. Au demeurant, si nous souhaitons disposer d'une autre chaîne, nous avons la possibilité d'en acheter, cela a été le mouvement que nous avons observé sur la TNT depuis dix ans avec un petit phénomène de concentration. A cet égard, si une manne publicitaire était susceptible de subvenir pour le secteur de la télévision, des acteurs comme AB ou le groupe Lagardère n'auraient pas cédé leurs fréquences sur la TNT…
J'ai été sensible au commentaire sur la presse gratuite qui est un axe de développement important pour le groupe Bolloré avec le journal Direct Matin. C'est vraiment gratifiant de voir tous ces lycéens dans le métro avec un journal gratuit sans lequel ils ne prendraient pas l'habitude de lire la presse. Il y a d'ailleurs une bonne chance que certains d'entre eux se transforment plus tard en lecteurs de la presse payante !