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Intervention de Jean-Christophe Thiery

Réunion du 8 juin 2011 à 10h00
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Jean-Christophe Thiery, président de Bolloré Média :

La télévision connectée est effectivement déjà une réalité, notamment chez les plus jeunes téléspectateurs qui n'ont d'ailleurs pas besoin d'un téléviseur puisqu'ils disposent de téléphones intelligents et de tablettes. La télévision connectée va dans le sens de l'histoire, c'est une certitude ; s'y opposer serait faire preuve d'aveuglement, il suffit de rappeler ce qu'il est advenu des éditeurs de musique qui ont préféré ignorer les évolutions des consommations numériques.

En revanche, une incertitude existe sur la vitesse de généralisation de la télévision connectée. Une partie de la population, notamment en raison de son âge, ne devrait pas s'y intéresser. Par ailleurs, le plaisir de la télévision passe aussi par la non connexion… Enfin, la télévision connectée a déjà connu des échecs.

En tout état de cause, l'activité des éditeurs va être bouleversée. Pour les plus importants d'entre eux, les modèles vont nécessairement changer, par exemple pour les acquisitions de programmes qui, aujourd'hui, peuvent être générateurs de beaucoup d'audience. La question est encore plus cruciale pour les plus petits opérateurs qui ont déjà du mal à se faire une place parmi les deux cents chaînes du câble et du satellite. Pour tous, un risque pèse sur les revenus : d'une part, il est impossible de savoir si les espaces publicitaires seront proposés au même prix sur les offres délinéarisées que sur les offres traditionnelles ; d'autre part, ces revenus pourraient être cannibalisés par les nouveaux acteurs.

Nous avons donc besoin d'une certaine protection afin d'assurer une concurrence équitable avec ces nouveaux acteurs. La situation est différente de celle de la naissance de la TNT, lorsque les nouveaux entrants pesaient peu par rapport aux acteurs historiques. Aujourd'hui, la valorisation des nouveaux acteurs peut atteindre 300 milliards de dollars, contre 2 à 3 milliards d'euros pour les groupes français. Un exemple de règle à harmoniser concerne la diffusion des films : pourquoi interdire une case horaire à un diffuseur traditionnel sans que les autres acteurs soient soumis aux mêmes obligations ?

Le changement des conditions de concurrence va obliger les éditeurs à modifier leur modèle, à travailler sur davantage d'exclusivités monnayables, à développer leurs marques et à diversifier leurs activités pour ne plus dépendre principalement des recettes publicitaires. Un groupe jeune comme Bolloré Média peut trouver sa voie dans ce nouvel univers concurrentiel en se situant aux différentes étapes de la chaîne de valeur. Il s'agit bien sûr de l'édition de chaînes, avec Direct 8 et Direct Star, mais aussi des efforts fournis en matière de production, dans le magazine et le cinéma notamment, en matière de communication et d'études pour être au plus près des téléspectateurs. Dans le contexte de convergence qui se dessine, il nous paraît également important d'être présent dans la technologie, d'où le développement du groupe Bolloré dans les télécommunications et la téléphonie de quatrième génération.

S'agissant de la problématique de la création ou non de nouvelles chaînes, il faut rappeler la crise de 2008 et la chute très importante des recettes publicitaires des chaînes historiques dont le secteur se relève à peine maintenant. Pour Direct 8, les investissements consentis atteignent 250 millions d'euros depuis 2005 et la chaîne arrivera enfin à l'équilibre à la fin de l'année. A ce moment même de notre histoire, il nous paraîtrait dangereux pour notre équilibre et notre avenir de créer de nouvelles chaînes, surtout gratuites, qui proposeraient une nouvelle offre publicitaire et conduiraient à une pression à la baisse sur les prix par un effet purement mécanique.

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