Cinq jours après l'audition publique du 19 mai dernier sur la protection des installations nucléaires contre les risques majeurs, nous voici à nouveau réunis pour examiner un nouvel aspect de la sûreté nucléaire. Cette fois, il s'agit de faire le point sur les protections des systèmes névralgiques des réacteurs.
La succession rapide des auditions publiques, une autre devant avoir lieu dès le mardi 31 mai, illustre le degré de mobilisation de l'Office parlementaire dans le cadre de l'étude sur la sécurité nucléaire et l'avenir de cette filière, diligentée conjointement par les présidents de nos deux assemblées, MM. Bernard Accoyer et Gérard Larcher, à la suite des événements intervenus au Japon, dans la centrale nucléaire de Fukushima.
Je rappelle que l'OPECST fonctionne pour cette mission en configuration élargie, puisque huit députés et huit sénateurs ont été désignés par les commissions permanentes de l'Assemblée nationale et du Sénat, compétentes dans le domaine de l'énergie, pour être associés à nos travaux. Cette mission élargie mène l'étude selon un schéma similaire à celui d'une commission d'enquête, par dérogation aux pratiques de l'Office qui confie d'habitude l'investigation aux seuls rapporteurs.
Nos travaux se concentreront jusqu'à la fin juin sur la sûreté et la sécurité nucléaires, et seront conclus par la publication d'un rapport d'étape ; le second volet concernera, à partir de juillet, la place de la filière nucléaire dans le système énergétique français.
Après nous être interrogés, lors de la précédente réunion, sur la possibilité qu'un événement de l'ampleur de celui qui a frappé la centrale japonaise de Fukushima se produise dans notre pays, nous nous efforcerons aujourd'hui de faire le point le plus complet possible sur les dispositifs constitutifs de ce qu'on appelle la « défense en profondeur » des réacteurs nucléaires, c'est-à-dire, notamment, sur l'ensemble des mécanismes, fondés sur la redondance ou sur la diversification, qui permettent le maintien du réacteur en fonctionnement malgré la défaillance de l'un de ses composants.
De là, le titre assez large de l'audition, « les protections des réacteurs nucléaires », le pluriel soulignant la multiplicité des fonctions concernées et des techniques mobilisées.
Les dispositifs concernant spécifiquement la protection contre les risques majeurs ayant déjà été évoqués, il s'agit de mettre aujourd'hui l'accent sur la protection des circuits névralgiques en tant que tels, celle-ci pouvant concerner plusieurs types d'atteintes, dont celles dues aux risques majeurs. Par exemple, il est évident qu'une barrière d'étanchéité protège aussi bien contre une inondation provoquée par un accident climatique externe que contre les écoulements résultant de la fuite d'une conduite d'eau interne.
Nous n'aborderons cependant pas la question perverse du terrorisme. Comme nous avons déjà eu l'occasion de le préciser lors de la présentation du programme de la mission, le 14 avril dernier, il n'est pas question de dire en audition publique quelles atteintes terroristes sont, ou peuvent être, envisagées et quelles parades sont prévues. Il faut être totalement naïf, ou totalement de mauvaise foi, pour penser que cette question puisse être traitée publiquement. Il est, en tout cas, hors de question que le prochain rapport de l'Office comporte un manuel du terrorisme nucléaire « pour les nuls ».
Nous allons examiner les efforts de recherche destinés à améliorer la protection des circuits névralgiques : c'est un aspect essentiel de la sûreté nucléaire telle que nous la concevons en France, c'est-à-dire dans une perspective dynamique, avec un effort permanent pour l'améliorer. J'ai souvent l'occasion d'évoquer ce sujet avec des interlocuteurs étrangers, qui me demandent si la sûreté nucléaire est optimale en France. Je leur réponds toujours qu'il s'agit d'une matière vivante, qui se nourrit de la recherche ainsi que de la confrontation des idées entre l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), les appuis techniques et scientifiques et l'opérateur. C'est de cette discussion que viennent les progrès. La sûreté nucléaire se conquiert par un travail de tous les jours et l'on ne peut espérer atteindre un sommet d'où l'on pourrait enfin contempler nos centrales avec une entière confiance. En la matière, les améliorations doivent être permanentes.
Les interventions ont été regroupées en deux sessions, présidées chacune par un des deux corapporteurs de la mission parlementaire : la première, consistant en l'analyse des mécanismes de défense en profondeur, par notre collègue sénateur Bruno Sido, premier vice-président de l'OPECST ; la seconde, une présentation des efforts de recherche en vue d'améliorer la protection des circuits névralgiques, par notre collègue député Christian Bataille.
Je propose à M. Thomas Houdré, directeur des centrales nucléaires à l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), qui a présenté jeudi dernier un panorama de la situation à Fukushima, de s'attacher spécifiquement aujourd'hui au problème de la nature et de la portée des rejets radioactifs, ainsi qu'à la question de l'évacuation des populations habitant les zones à risque.