Il s'agit d'un point extrêmement important, et vous conviendrez avec moi, monsieur Urvoas, que la commission a beaucoup travaillé sur ce texte qui nous vient du Sénat, puisqu'elle a tout de même adopté deux amendements visant à restreindre les possibilités de reports de visite.
Un premier amendement tend ainsi à compléter la qualification des motifs pouvant conduire au report de la visite du Contrôleur, pour préciser, en reprenant la terminologie internationale, qu'il ne peut s'agir que de motifs « graves et impérieux ». Il ne s'agit donc plus simplement de motifs graves – cela va beaucoup plus loin.
Un second amendement fait obligation aux autorités responsables des lieux à visiter de prévenir le Contrôleur général dès que les circonstances justifiant le report ont pris fin.
Aux deux bouts de la chaîne, il y a donc des restrictions à ces reports de visite, lesquels, je le souligne, ne sont pas des annulations. Les motifs de ces reports reprennent ceux mentionnés à l'article 14-2 du Protocole facultatif, effectivement applicables aux visites du sous-comité de prévention, mais cela n'exclut pas qu'ils le soient aussi au mécanisme national de prévention.
Je cite l'article 14-2 : « L'objection à la visite d'un lieu de détention déterminée suppose des raisons pressantes et impérieuses » – c'est-à-dire des motifs graves et impérieux – « liées à la défense nationale, à la sécurité publique, à des catastrophes naturelles ou à des troubles graves là où la visite doit avoir lieu. » Je pourrais aussi citer la Convention européenne pour la prévention de la torture, dont l'article 9 évoque « des motifs de défense nationale ou de sûreté publique ou en raison de troubles graves dans les lieux où des personnes sont privées de liberté », mais également « l'état de santé d'une personne ou d'un interrogatoire urgent, dans une enquête en cours, en relation avec une infraction pénale grave ».
Je passe sur les catastrophes naturelles. S'agissant de la défense nationale, il peut y avoir un certain nombre de restrictions, même si les cas sont assez rares. Quant aux motifs liés à la sécurité publique, ils peuvent concerner une manifestation autour de l'établissement pénitentiaire, qui en empêche l'accès, ou des troubles sérieux dans l'établissement tels qu'une mutinerie ou un refus de retour en cellule après la promenade, car les personnels sont entièrement mobilisés pour régler l'incident. Il peut s'agir aussi d'une évasion – je pense à l'évasion par hélicoptère, comme à Grasse, où l'on tirait dans tous les sens. Ce sont des exemples tout à fait objectifs. Et je rappelle que le Contrôleur n'a pas dans sa mission d'assurer la médiation pour mettre fin à des troubles dans l'établissement.
Reconnaissez, mon cher collègue, que, même si nous ne sommes pas aussi jusqu'au-boutistes que vos amendements, nous limitons et nous encadrons néanmoins de façon très forte…