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Intervention de Sylvia Pinel

Réunion du 25 septembre 2007 à 15h00
Contrôleur général des lieux de privation de liberté — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSylvia Pinel :

Faut-il rappeler que ce contrôle est réclamé par l'Observatoire international des prisons depuis 1998 et que différentes propositions de loi sur le sujet, toutes tendances confondues, attendent d'être adoptées depuis des années ?

L'instauration nécessaire d'un Contrôleur général des lieux de privation de liberté sera un outil supplémentaire nous permettant de mieux connaître encore la triste réalité de nos prisons, de nos centres de rétention ou de nos hôpitaux psychiatriques. Mais la mission d'alerte du contrôleur ne suffira pas à changer en profondeur la situation, a fortiori s'il ne dispose pas d'un pouvoir d'injonction. C'est pourquoi, dans l'attente d'une loi globale sur l'enfermement dans notre pays, nous pouvons nous interroger sur les conditions d'efficacité de ce contrôle et chercher comment en améliorer le dispositif.

En premier lieu, si l'indépendance du Contrôleur général semble assurée par son statut d'autorité administrative indépendante, il reste à renforcer son autorité véritable en encadrant davantage sa nomination. Des amendements aussi bien de notre commission que du groupe SRC vont dans ce sens.

Deuxièmement, au-delà de son autorité morale et de ses qualités personnelles irréprochables, le contrôleur devra bénéficier de pouvoirs larges et étendus. C'est ainsi qu'il devra disposer du pouvoir de se rendre quand il le souhaitera dans les établissements de son choix, de même qu'il devra pouvoir s'entretenir avec toute personne susceptible de l'éclairer et avoir accès à tous les documents qu'il jugera utiles de consulter. C'est pourquoi je suis opposée aux trop nombreuses formes de restriction contenues dans le texte. Le Contrôleur et ses collaborateurs devront évidemment être soumis au secret professionnel, comme le prévoit du reste l'article 4 : dès lors l'accès au secret médical serait très utile pour renforcer l'efficacité du contrôle. Ne serait-il pas possible de l'autoriser dans des cas bien précis, la notion de « secret partagé » offrant des garanties en la matière ?

Le projet de loi prévoit un contrôle trop restreint, en deçà de ce qui serait nécessaire. Il manque d'ambition, mais, pire encore, il témoigne d'une très grande méfiance à l'égard de la future institution. C'est pourquoi j'ose espérer que notre assemblée adoptera certains amendements de suppression. De même, en matière de saisine du Contrôleur général, c'est bien le droit d'amendement des parlementaires qui peut permettre son élargissement. Les sénateurs ont fort utilement ouvert la saisine du Contrôleur aux autres autorités indépendantes : il nous reste, mes chers collègues, à offrir au contrôleur la possibilité réciproque de saisir ces mêmes institutions.

En troisième lieu, après la question de l'indépendance et celle des pouvoirs du Contrôleur, demeure celles des moyens dont il disposera et de la suite qui sera donnée à ses contrôles. Il est indispensable qu'il dispose, dès son installation, des crédits adaptés lui permettant de recruter un nombre suffisant de contrôleurs pour visiter, chaque année, les 6 000 lieux relevant de sa compétence.

Enfin, comment faire en sorte que le travail du Contrôleur aboutisse à de véritables améliorations ? En rendant tout d'abord automatique la publicité de ses avis et de ses propositions. À cette fin, les parlementaires doivent pouvoir, au même titre que le Gouvernement, servir de relais aux recommandations du Contrôleur afin de les traduire dans la loi.

Toutefois, la publicité suffira-t-elle ? Non, c'est la raison pour laquelle il est nécessaire de doter le contrôleur d'un véritable pouvoir d'injonction pour les atteintes les plus graves aux droits de l'homme, faute de quoi son rôle serait amoindri. Car le risque est grand de voir le Contrôleur général rejoindre ces nombreuses autorités administratives indépendantes dont on se demande parfois à quoi elles servent.

Puisque ce risque est grand, le doute est permis. Madame le garde des sceaux, existe-t-il de la part du Gouvernement une réelle volonté politique d'instaurer un contrôle des lieux de privation de liberté ? N'est-ce pas plutôt le besoin formel de satisfaire à une exigence internationale qui nous réunit aujourd'hui ?

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