Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, parce qu'« une société, disait Albert Camus, se juge à l'état de ses prisons », il est devenu urgent d'agir et de sortir enfin l'univers carcéral de la profonde crise dans laquelle il se trouve enfermé depuis plus de trente ans.
Je n'étais pas encore née, mes chers collègues, que déjà des associations, des avocats, des hommes et des femmes politiques s'engageaient en faveur de l'amélioration des conditions de détention et se mobilisaient pour le retour de la dignité humaine aussi bien derrière les barreaux des prisons que derrière les murs des hôpitaux psychiatriques.
Mais force est de constater que, depuis, la situation dans ces établissements n'a cessé de se dégrader – elle est, du reste, régulièrement dénoncée. On ne compte plus les rapports qui dressent tous le même constat accablant. L'un des derniers en date est celui du commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe, qui, en 2006, plaçait la situation de nos prisons au premier rang des atteintes aux droits de l'homme en France. Il rejoignait ainsi les conclusions des sénateurs Hyest et Cabanel, qui, en 2000, avaient rédigé un rapport au titre éloquent : « Prisons : une humiliation pour la République ».
Madame le garde des sceaux, combien de temps encore allons-nous faire l'économie d'une grande loi pénitentiaire accompagnée de l'ambition et des moyens nécessaires ? Un projet de loi est annoncé pour bientôt : pourquoi alors ne pas y avoir inclus le contrôle indépendant des lieux de privation de liberté ?
Vous appartenez à une majorité qui, depuis plus de cinq ans, trouve toujours du temps pour faire voter des lois sur la récidive et la délinquance qui accroissent inexorablement la surpopulation carcérale, mais vous n'en avez jamais pour présenter devant le Parlement la grande loi pénitentiaire attendue depuis des années sur tous les bancs de cet hémicycle. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)