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Intervention de Marietta Karamanli

Réunion du 25 septembre 2007 à 15h00
Contrôleur général des lieux de privation de liberté — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarietta Karamanli :

Mesdames, messieurs, le texte qui nous est soumis poursuit un objectif essentiel : garantir la dignité des personnes privées de liberté, quel qu'en soit le motif. Françoise Hostalier l'a rappelé, selon les termes du Protocole facultatif de la Convention des Nations unies sur la torture, il s'agit de « l'établissement d'un système de visites régulières, effectuées par des organismes internationaux et nationaux, indépendants... ».

Je m'attacherai à trois expressions reprises par ce Protocole : « organismes nationaux indépendants », « prévenir la torture, les traitements cruels, inhumains et dégradants » et « lieux où se trouvent les personnes privées de liberté ».

De la combinaison des articles 1 et 6, il résulte que toutes les personnes privées de liberté, et tous les lieux où elles se trouvent peuvent être contrôlés. Conformément aux engagements internationaux, sont donc concernés les prisons, les centres de rétention, les zones d'attente, les établissements dépendant des forces de l'ordre et des forces armées, les lieux d'internement et les hôpitaux, les centres éducatifs fermés – qui abritent plusieurs centaines d'enfants et d'adolescents : M. Perben prévoyait la création de 600 places pour 2007 – et toute structure assimilable. C'est donc à juste titre que le Médiateur de la République avait estimé, dans un travail préparatoire au projet d'un contrôle général, que les lieux institutionnels concernés étaient au nombre de 6 000 à 8 000. Mme la garde des sceaux a parlé, quant à elle, de quelque 5 700 sites.

Je voudrais faire trois observations, qui sont autant de contre-propositions au texte gouvernemental.

Premièrement, il aurait fallu, dans l'article 6 qui concerne les personnes privées de liberté par décision d'une autorité publique, privilégier la formule du Protocole des Nations unies, qui précise : « sur l'ordre d'une autorité publique ou à son instigation, ou avec son consentement exprès ou tacite ». Cette formulation engloberait les cas où la décision serait prise par une personne autre que l'autorité publique, mais avec le consentement explicite ou implicite de celle-ci. Les droits fondamentaux sont d'autant mieux garantis que les organismes destinés à leur sauvegarde s'adaptent mieux aux situations sans qu'il faille changer leurs statuts ou leurs missions. Pour paraphraser le Président de la République, il faut faire en sorte que les institutions interviennent et préviennent tôt.

Deuxièmement, le texte aurait pu, comme cela a été évoqué antérieurement, prévoir un collège de spécialistes entourant le Médiateur et dont les compétences professionnelles et les qualités reconnues auraient permis de prendre en compte la diversité des lieux d'enfermement. C'est d'ailleurs une idée qui va dans le sens de l'avis de la Commission nationale consultative des droits de l'homme, qui s'est saisie du projet ! Elle estime que « compte tenu de la diversité des lieux privatifs de liberté et de la spécificité de chacun d'eux, il serait nécessaire de prévoir des organes spécialisés et des procédures adaptées pour certains d'entre eux ». Il est bon de rappeler que le candidat, devenu aujourd'hui Président de la République, s'est prononcé en faveur du renforcement des pouvoirs du Parlement, lequel devrait, selon lui, être associé à la désignation des autorités administratives. J'ajoute que, lors de l'allocution qu'il a prononcée lors de l'installation du Comité de rééquilibrage des institutions de la Ve République, au mois de juillet dernier, Nicolas Sarkozy a déclaré qu'il était important, à ses yeux, que les pouvoirs du Président de la République s'exercent dans la transparence et qu'ils soient encadrés par de réels contre-pouvoirs, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.

Troisièmement, il faut s'attacher aux moyens. Eu égard à la diversité et au nombre de lieux concernés, cette question se pose aussi bien en termes de qualité que de quantité. Des compétentes suffisantes doivent être mises à la disposition de celui ou de celle qui aura cette lourde et précieuse mission. Il semble donc important de réfléchir aux moyens du contrôleur, qu'il s'agisse de ses prérogatives, du personnel sous sa responsabilité, ou de ses moyens matériels.

Pour conclure, si l'on veut que ce projet soit une véritable réussite, il faut que le mandat confié au contrôleur soit aussi complet que possible, de sorte que tous les lieux, toutes les personnes privées de leur liberté, puissent être visités à tout moment. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la gauche démocrate et républicaine, ainsi que sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

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