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Intervention de Françoise Hostalier

Réunion du 25 septembre 2007 à 15h00
Contrôleur général des lieux de privation de liberté — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançoise Hostalier :

Permettez-moi, madame la ministre, de vous dire toute ma satisfaction que vous ayez proposé ce projet de loi au Parlement.

Le texte qui nous est présenté ayant été largement amendé par le Sénat, il répond mieux désormais aux exigences internationales et se rapproche davantage des propositions de plusieurs institutions françaises, tout particulièrement du Médiateur de la République et de la Commission nationale consultative des droits de l'homme dont les travaux eux-mêmes faisaient référence à d'autres contributions dans ce domaine. Je mentionnerai le célèbre rapport du commissaire européen aux droits de l'homme, Gil-Roblès, rendu le 15 février 2006 après sa mission en France du 5 au 21 septembre 2005. Je précise ces dates car, si certaines mesures ponctuelles qu'il préconisait ont été prises, force est de constater que, malheureusement, la situation décrite est encore, pour une grande part, d'actualité.

Certains mots sont très durs pour la France. Il décrit ainsi la prison des Baumettes à Marseille : « De ma vie, sauf peut-être en Moldavie, je n'ai vu un centre pire que celui-là. » Il poursuit, toujours dans son rapport : « Ainsi, j'ai été choqué par les conditions de vie observées à la Santé ou aux Baumettes. Ces établissements m'ont semblé particulièrement démunis. Le maintien de détenus en leur sein me paraît être à la limite de l'acceptable, et à la limite de la dignité humaine. » Plus loin encore : « La surpopulation empêche donc de mettre en pratique une véritable politique pénitentiaire, de séparer les prévenus des condamnés, les mineurs des adultes. Elle ne permet pas la mise en oeuvre d'un traitement social, psychologique..., ni d'une action spécifique à la situation de chaque détenu. Cela a un effet totalement négatif sur le principe de réinsertion. Si on ne peut pas faire un travail dans ce sens, on touche à la sécurité future... »

Dans le monde entier et dans l'esprit de nos concitoyens, la France est la patrie des droits de l'homme ! Mais il faut se résoudre à l'évidence : nous donnons bien souvent des leçons aux autres, alors que nous devrions nous-mêmes les recevoir.

Lorsque la France a présenté sa candidature au Conseil des droits de l'homme au printemps 2006, elle s'était engagée à ratifier le Protocole facultatif à la Convention des Nations unies contre la torture élaboré en 2002, qu'elle a signé le 16 septembre 2005. Ce Protocole a pour objectif « l'établissement d'un système de visites régulières effectuées par des organismes internationaux et nationaux indépendants sur les lieux où se trouvent les personnes privées de liberté, afin de prévenir la torture, et autres peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants ».

En effet, dans les pays démocratiques, où le lien social est fondé sur les droits de l'homme, il est indispensable de veiller à ce qu'ils soient respectés s'agissant des personnes les plus démunies ou les plus vulnérables. Les personnes privées de liberté, quelle qu'en soit la raison, ont droit au respect de leur dignité et de leur sécurité, comme tout être humain. J'irai même plus loin : comment rééduquer et tenter de réinsérer des personnes qui ont parfois tant de mal à se plier aux lois, à respecter les autres et à accepter le fonctionnement normal de notre société si, pendant qu'elles sont privées de liberté, leurs propres droits humains ne sont pas respectés ?

Je suis élue du département du Nord. Je passe au moins trois fois par semaine devant la prison de Loos, qui borde le périphérique de Lille, et, chaque fois, je pense à ces hommes entassés à trois ou quatre dans des cellules de dix mètres carrés. Certes, il y a maintenant la prison ultramoderne de Sequedin, mais Loos est toujours en usage !

La situation dont vous héritez, madame la ministre, est catastrophique. Dans le contexte budgétaire si difficile, les arbitrages en faveur de la rénovation et de l'humanisation des lieux privatifs de liberté ne seront pas faciles à obtenir. Cependant, je peux vous assurer de mon soutien car il y va de l'honneur de la France.

L'instauration du contrôleur des lieux privatifs de liberté sera pour vous un outil précieux, qui vous permettra d'obtenir chaque année une photographie exacte de la situation dans les prisons, mais aussi dans les autres lieux de détention, comme les hôpitaux psychiatriques, les centres éducatifs – fermés ou renforcés –, les centres de rétention des étrangers, et peut-être aussi ceux situés à l'extérieur du territoire national. De nombreux rapports ont déjà été rédigés à ce sujet, notamment par des ONG, mais ils n'ont pas la valeur officielle de celui du Contrôleur général.

Dans le texte qui nous est soumis, largement amendé par le Sénat, il ne reste à mon avis que quelques points à préciser, comme la situation des personnes détenues lors d'opérations militaires. Nos débats devraient nous donner l'occasion d'éclairer ce point.

Pour conclure, je vous redis ma satisfaction de voir enfin examiné ce texte dont nous attendons avec impatience l'application et je rappelle que beaucoup de pays, devenus récemment des démocraties, sont attentifs à la façon dont la France va mettre en place cette institution. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

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