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Intervention de Jacques Grosperrin

Réunion du 9 juin 2011 à 15h00
Lutte contre le décrochage scolaire — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJacques Grosperrin :

…ainsi que la question des apprentissages effectifs, source de développement harmonieux de nos enfants. Non, à trois ans, tout n'est pas joué, et fort heureusement !

Une interrogation demeure cependant, lorsqu'on sait que dans des pays voisins où les résultats de PISA sont bien meilleurs que les nôtres, l'école obligatoire ne commence qu'à sept ans. Les raisons de l'échec sont à chercher ailleurs que dans l'âge de la scolarisation. Et ce n'est pas parce qu'il y a obligation scolaire qu'il y a réussite scolaire. Ainsi, relier la réussite scolaire à l'obligation scolaire dès trois ans peut sembler une erreur, alors qu'il est primordial de réfléchir sur la place de la maternelle dans notre société et sur le rôle de l'école primaire.

Les politiques de lutte contre le décrochage scolaire doivent comprendre trois volets : prévention, intervention et compensation.

La prévention, c'est le programme personnalisé de réussite éducative, avec une prise en charge de ceux que l'on a appelés « les orphelins de seize heures ».

L'intervention, c'est la loi Ciotti, qui a instauré un dispositif gradué et proportionné pour alerter, accompagner et, le cas échéant, sanctionner par la suspension des allocations familiales. Les résultats sont éloquents. M. le ministre nous les a décrits tout à l'heure. Mais donnons-nous du temps pour mieux évaluer cette loi. C'est à long terme que nous pourrons, peut-être, revenir sur certaines de ses dispositions.

Je suis d'ailleurs surpris du fait que certains puissent prôner un rôle dit innovant des collectivités locales. Je ne suis pas sûr que, même s'il en avait l'obligation, le département de Seine-Saint-Denis aurait la capacité financière qu'ont d'autres départements pour mener des actions d'accompagnement à hauteur de 400 000 euros, et même si l'Union européenne participe à hauteur de 200 000 euros. Ou alors, mesdames et messieurs les socialistes, êtes-vous favorables à une proximité plus forte entre le ministère de l'éducation nationale et les collectivités locales ?

Nous pensons que c'est au ministère de l'éducation nationale qu'il revient de gérer tout cela, et nous y sommes très attachés.

Je voudrais revenir sur quelques articles de cette proposition de loi.

L'article 1er prévoit d'abaisser l'âge de l'inscription obligatoire de six à trois ans. C'est un grand débat de société, qui n'a peut-être pas vocation à être traité au détour d'une proposition de loi.

L'article 3 expose le mode de prise en charge des élèves exclus temporairement. Mais le dispositif de classes et d'ateliers relais propose déjà un encadrement renforcé autour d'un large partenariat entre l'éducation nationale, la protection judiciaire de la jeunesse, les collectivités locales, les associations agréées complémentaires de l'enseignement public et les fondations reconnues d'utilité publique. Ces dispositifs relais ont prouvé leur efficacité, puisque 70 % des élèves qui en ont bénéficié ont été rescolarisés.

L'article 4 prévoit la désignation d'un tuteur pour cinq élèves. C'est une proposition intéressante, mais il faut peut-être aller plus loin et réfléchir au statut des enseignants. Ce statut de 1950 mérite peut-être d'être amendé afin de répondre à cette difficulté de l'accompagnement de nos élèves.

L'article 5 propose la création d'une cellule de veille éducative. C'est aussi intéressant, mais les plateformes de suivi et d'appui aux décrocheurs sont en cours de généralisation sur l'ensemble du territoire.

L'article 6 prévoit l'intervention d'un enseignant de RASED, mais la communauté éducative met déjà en place un suivi spécifique via les groupes d'aide à l'insertion, ou les cellules de veille.

L'article 7 prévoit d'abroger la loi du 28 septembre 2010 qui vous gène tant. Or, renforcer la lutte contre l'absentéisme scolaire, c'est responsabiliser les parents et c'est donc un moyen essentiel pour lutter contre le décrochage scolaire. La suppression de la loi renforcerait les difficultés des élèves et rendrait l'État responsable de l'accroissement des inégalités culturelles et ne serait-ce que pour cet article, nous ne pouvons voter votre proposition de loi.

Le Gouvernement a lancé des réformes pour lutter contre le décrochage scolaire : amélioration de la formation des CPE ; création, dans les établissements sensibles, de 5 000 postes de médiateurs de réussite scolaire en contrats aidés ; la mallette des parents, dispositif original et peu coûteux qui est étendu dans un grand nombre d'académies ; l'application informatique Sconet, qui permet de repérer les décrocheurs en rupture ; la plateforme de coordination et des crédits supplémentaires de près de 120 millions d'euros pour les missions locales ont été attribués. Ces efforts doivent être poursuivis.

Le débat sur cette proposition de loi peut nous rapprocher. Le clivage politique s'estompe sur le domaine de l'éducation, et le groupe UMP reconnaît l'intérêt d'en discuter aujourd'hui.

Yves Durand, m'a qualifié d'alibi intelligent de l'UMP, mais beaucoup d'autres parlementaires de mon groupe, dont Michèle Tabarot, partagent votre vision des choses, parce que vous vous rapprochez aussi de nous. Mais il nous semble inopportun d'adopter à ce jour un texte qui pourrait perturber tous les nouveaux dispositifs existants.

C'est la raison pour laquelle nous voterons contre cette proposition de loi qui pourrait troubler et rendre plus difficile le débat qui nous attend pour 2012. Nous espérons bien que le débat sur l'école sera le débat majeur de la campagne présidentielle.

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