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Intervention de Pierre-Alain Muet

Réunion du 6 juin 2011 à 17h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2011 — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre-Alain Muet :

J'en viens à cette réforme de la fiscalité du patrimoine. Quel est son sens ? J'en comprends bien la raison politique. Vous essayez, depuis plus d'un an, de vous débarrasser d'un boulet : le bouclier fiscal. Dans un contexte où les revenus du patrimoine augmentent énormément, où les salaires stagnent, voire baissent, surtout les plus modestes, on aurait pu s'attendre à ce que vous procédiez à un rééquilibrage pour introduire un peu de justice fiscale. Eh bien non ! Vous faites une réforme aussi injuste, sinon plus, que le bouclier fiscal, une réforme qui ne répond à aucun critère d'efficacité économique et qui, une fois de plus, n'est pas financée.

J'ai bien entendu le rapporteur général, mais je l'ai aussi lu et je sais quels sont ses doutes sur le financement. J'ai entendu le président de la commission des finances rappeler à combien avaient été évaluées certaines mesures en 2007 et donner l'évaluation actuelle de la suppression de ces mêmes mesures : le rapport est de un à dix.

La réforme que vous nous présentez est injuste, inefficace et non financée. Quel est son sens dans le contexte actuel ? La France taxe-t-elle trop le capital ? En commission des finances, nous avons eu connaissance des comparaisons internationales réalisées par l'OCDE en matière de taxation du capital. Nous savons ainsi qu'en France l'imposition du capital représente 9,8 % de l'ensemble des impôts, ce qui n'est pas très éloigné de la moyenne européenne, puisque celle-ci se situe à 9 %. La taxation du capital en France est bien plus faible qu'au Royaume-Uni, où elle est de 12,6 %, ou qu'en Norvège, où elle est de 15 %.

Le patrimoine immobilier est beaucoup plus taxé dans les pays anglo-saxons, aux États-Unis ou en Angleterre, qu'en France. Et l'ISF, avec un peu plus de 4 milliards d'euros, paraît bien peu de chose comparé à l'autre grande composante de la taxation du patrimoine des ménages, à savoir la taxe foncière, qui rapporte 14 milliards d'euros.

Une telle réforme est-elle justifiée dans la situation actuelle qui se caractérise, depuis plusieurs années, par une explosion des revenus du patrimoine, par une déformation du partage de la valeur ajoutée en faveur de ces revenus du patrimoine et par une stagnation des salaires, voire par une baisse de leur pouvoir d'achat ? Au cours des dernières années, un quart des salariés ont en effet enregistré une baisse de leur pouvoir d'achat.

Il aurait été possible de profiter de la suppression du bouclier fiscal pour alléger la taxation des salaires et renforcer celle du patrimoine, mais ce n'est pas du tout ce que vous proposez. J'écoute avec intérêt le rapporteur général défendre la taxation du patrimoine, mais c'est un discours nouveau. Cela fait des années, en effet, que nos collègues de la majorité nous expliquent que l'ISF est une catastrophe économique, alors que c'est un impôt juste et efficace. Il est juste de taxer le patrimoine parce que, comme le dit le Conseil constitutionnel, c'est une faculté contributive, et parce que les inégalités de patrimoines sont sans commune mesure avec les inégalités de revenus. Le patrimoine des 10 % plus gros contribuables à l'ISF représente 400 fois celui des 10 % de nos concitoyens les plus modestes. L'écart est donc non pas de un à trois, comme pour les revenus, mais de un à 400. Il est par conséquent juste de taxer le patrimoine. Rappelons aussi que le patrimoine médian des Français est de l'ordre de 100 000 euros.

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