En ce qui concerne l'exploitation des gaz de schiste, je constate les événements, mais je n'ai pas à les juger. À titre personnel, je regrette que la rationalité ne l'ait pas emporté, car il aurait été préférable que la mission parlementaire, comme les conseils généraux, aillent au bout de leurs travaux. Cela dit, je prends acte de certaines initiatives. Des propositions de loi ont été déposées, de part et d'autre de l'hémicycle, et l'opinion publique s'est mobilisée, ce qui a permis la discussion actuelle.
J'espère que la CMP retiendra la position que défend Mme Nathalie Kosciusko-Morizet au Sénat. Il y a accord sur l'abrogation des trois permis, non d'exploitation, mais d'exploration, qui ont été accordés. En effet, selon le Premier ministre, les industriels ne sont pas en état de prouver que l'exploitation respecterait des normes environnementales que nous considérons comme minimales. Des divergences demeureront peut-être entre ceux qui veulent fermer définitivement la porte à l'exploitation des gaz de schiste et ceux, dont je fais partie, qui considèrent qu'il faut toujours laisser une fenêtre ouverte sur le progrès. Rien ne dit que, le moment venu, la science ne permettra pas d'exploiter proprement ce potentiel. Les États-Unis, d'abord décriés à juste titre, imposent de nouvelles normes aux industriels. D'autres pays, qui viennent de se découvrir un important potentiel en gaz de schiste, les imitent. En France, le Premier ministre a demandé que les études soient encore poursuivies pendant un an, pour que nous disposions de références plus complètes.
M. Martin et M. Chassaigne m'ont interrogé sur la dépendance énergétique. Du fait des gaz de schiste, les États-Unis acquièrent en ce moment une autonomie impressionnante et révisent en permanence leur potentiel d'exploitation. Avant même l'accident de Fukushima, ils avaient différé la relance de leur programme nucléaire en constatant que leur potentiel d'exploitation des gaz de schiste était en forte augmentation. D'autres pays, comme le Royaume-Uni, en font autant. La France va en geler l'exploitation, non sans poursuivre le travail scientifique qui permettra peut-être un jour d'exploiter dans des conditions favorables à l'environnement un potentiel que personne ne connaît réellement.
Selon des experts qui ont comparé la nature géologique de la France à celle d'autres pays de structure équivalente, où l'on a trouvé des réserves, notre potentiel représenterait un siècle de consommation, mais nul n'est capable de l'affirmer. Seule une exploration au moyen de sondes, menée de manière transparente, publique et maîtrisée, permettrait d'évaluer sa réalité. Le président de Total n'a pas tort de déclarer, sous forme de boutade, que tout le monde s'écharpe sans aucune certitude. Je souhaite que la CMP abroge les permis d'exploiter, mais retienne la possibilité d'une exploration maîtrisée.