Je suis défavorable à ces trois amendements, le dernier soulevant en effet un problème de rétroactivité.
Le rendement annuel de cette mesure budgétaire, estimé à plus de 400 millions d'euros, tiendra moins aux donations qu'aux successions : on dénombre quelque 800 000 décès par an, dont seulement 30 000 seront concernés par l'allongement du rapport fiscal. Dans l'état actuel du droit, les donations ne sont pas rapportées à la succession lorsqu'elles datent de plus de six ans. Autant je suis favorable à ce qu'on porte ce délai à dix ans pour les donations à venir, autant il me paraîtrait anormal de modifier brutalement les règles du jeu pour les personnes qui ont effectué une donation en pensant que celle-ci ne serait pas rapportée à leur succession si elles venaient à mourir plus de six ans après. L'amendement CF 28 aggraverait encore la situation. Je propose, pour ma part, par l'amendement CF 175 de lisser les effets du retour à un délai de reprise de dix ans grâce à un abattement progressif en fonction de l'ancienneté de la donation entre la sixième et la dixième année, comme l'a suggéré le conseil supérieur du notariat. C'est une solution intermédiaire par rapport à l'amendement CF 16 de notre collègue Louis Giscard d'Estaing. Le mien évite tout effet de couperet en s'appliquant à toutes les donations datant de moins de dix ans, quelle que soit la date à laquelle elles ont été consenties.
Monsieur de Courson, les recettes escomptées sont incertaines. En effet, on a, encore une fois, raisonné à comportement constant. Or, en matière de donations, le contribuable adapte son comportement en fonction des règles. Avec le dispositif d'abattement progressif que je propose, la mesure ne rapporterait plus qu'environ 200 millions d'euros par an pendant ses six premières années d'application. Les 200 millions restants seraient en revanche, eux, financés de manière plus sûre par le relèvement à 2,2 % du droit de partage, lequel a été considérablement abaissé ces vingt dernières années, pour n'être plus aujourd'hui que de 1,1 %.
Lorsque vous dites que nous n'aurions pas dû ramener le délai de dix à six ans, vous avez à la fois tort et raison. Le délai de reprise avait été abaissé alors que l'abattement en ligne directe était maintenu à 50 000 euros. Dès lors que celui-ci était porté à 150 000 euros dans la loi TEPA, il aurait fallu revenir à un délai de dix ans. Nous prenons aujourd'hui la mesure équilibrée qui aurait dû être prise alors. Un couple avec deux enfants peut aujourd'hui donner en franchise de droits 600 000 euros tous les six ans, ce qui est beaucoup.