Monsieur le ministre, qu'est-ce que le Grand Paris, cet objet politique non identifié qui vogue d'hémicycle en hémicycle depuis les déclarations du Président de la République ? Je dois dire que nous n'avançons pas beaucoup, ni sur la dimension, c'est-à-dire sur le territoire sur lequel ce Grand Paris doit s'appliquer, si sur les compétences qu'exercerait cet OPNI, ni sur les questions démocratiques. Il aura fallu toute votre science, monsieur le ministre, vous qui êtes le Red Adair du Grand Paris, celui qui éteint incendie après incendie (Sourires), qui permet aux gens de discuter les uns avec les autres, ce qui n'était absolument pas le cas, je dois le dire, avant votre nomination, pour que nous avancions petit à petit et que nous défaisions les noeuds que d'autres avant vous avaient noué avec constance et une certaine efficacité.
En tant que législateurs, nous nous trouvons aujourd'hui face à un texte « visant à faciliter la mise en chantier des projets des collectivités locales d'Île-de-France », pour reprendre le titre de la proposition de loi de notre excellente collègue sénatrice Nicole Bricq. Cela prouve bien le blocage politique et non juridique dans lequel nous nous trouvions : le SDRIF de 1994 refusé par tous, jamais appliqué et mis en révision en 2004, adopté dans sa première mouture en février 2007 puis définitivement en septembre 2008, l'ensemble du processus ayant été remis en cause par l'actuel Président de la République, alors qu'avant 2007 l'État était complètement associé à la procédure, notamment par l'intermédiaire du préfet de région de l'époque.
C'est une certaine forme de chantage qui a prévalu. « Nous proposerons l'adoption du SDRIF, sa transmission au Conseil d'État si vous acceptez de financer notre réseau de transport » : voilà le discours qui a été tenu pendant très longtemps par l'État. Le projet a donc été bloqué, non en raison de son contenu, mais parce que l'État avait décidé d'outrepasser ses prérogatives, comme l'a indiqué Jean-Yves Le Bouillonnec. Finalement, l'État s'est pris lui-même les pieds dans le tapis par cette délibération du Conseil d'État qui remettait à plat l'ensemble du processus et qui nous oblige, par une voie un peu biaisée, à voter cette proposition de loi.
Sans recommencer le débat sur l'utilité du Grand Paris, je poserai quelques questions simples qui ont déjà été abordées par Annick Lepetit et Jean-Yves Le Bouillonnec. Nous avons bien compris que nous étions en régime transitoire. Mais en régime de croisière, qui décidera l'aménagement global de la région ? Le conseil régional d'Île-de-France, quelle que soit sa majorité ? La Société du Grand Paris, bras armé de l'État avec à sa tête André Santini ou quelqu'un de plus malveillant qui pourrait lui succéder ?