Mais le libre exercice des cultes est inclus dans la liberté de conscience, qui est le socle de la laïcité. Vouloir ajouter la liberté religieuse à la suite de la laïcité ne peut être interprété que comme une atteinte à l'intégrité de la laïcité, à son universalité. C'est une restriction de son champ d'influence dans l'organisation de la République. C'est faire de la laïcité la religion de ceux qui n'en ont pas.
La laïcité serait pour ceux qui ne croient pas, et la religion pour ceux qui croient. Il y a là un point de rupture avec les fondateurs de la République. Le point de rupture que vous mettez sur le devant de la scène vient en écho aux propos tenus par le Président de la République le 20 décembre 2007 au Latran : « l'instituteur ne pourra jamais remplacer le curé ou le pasteur, (…) parce qu'il lui manquera toujours la radicalité du sacrifice de sa vie », propos lourds de signification. Comme si le sacrifice de sa vie pour une cause noble n'était l'apanage que du seul curé !
Plus subtilement, le Président de la République, et vous à sa suite, instillez l'idée selon laquelle une personne qui n'aurait pas de religion ne serait qu'un croyant qui s'ignore.
Mes chers collègues, la laïcité n'a pas besoin d'adjectif, elle est par essence positive. Aujourd'hui, parler de laïcité « équilibrée » sonne une nouvelle fois comme un coup majeur porté à son adresse. Équilibrée par rapport à quoi ? Par rapport à qui ?
Par son universalité, la laïcité est par essence équilibrée. La loi de 1905, en son article 1er, pose : « La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes (…) »
Vous l'aurez compris avec ce rappel : les socialistes défendent l'universalité de la laïcité, une laïcité sans adjectif et sans fard. Nous vous appelons, vous les républicains, vous les défenseurs de la laïcité, vous, monsieur le ministre, à ne pas laisser engager la République dans cette voie funeste qui serait, en empruntant le chemin de la défense de la laïcité, de remettre en cause son sens même dans notre république.
C'est pourquoi les socialistes ne voteront pas cette résolution. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)