La CSPE va connaître une augmentation de 300 % à horizon 2020, selon les projections de la CRE qui se fondent sur la situation actuelle du marché de l'énergie. Il faut que la puissance publique montre la réalité des choses et affirme ses choix, même si les neuf années qui viennent produiront immanquablement leur lot d'impondérables. Car augmenter les tarifs de l'électricité impose la plus grande prudence : depuis 50 ans, les augmentations successives ont eu lieu dans des conditions économiquement et socialement acceptables. Cela risque de ne plus être le cas dans les années qui viennent. Or la contrepartie de cette acceptabilité pour le consommateur – la création d'emplois, la contribution à la croissance, chaque énergie assurant l'essor d'une filière industrielle – ne pourra plus être garantie.
M. Henri Proglio indiquait hier au journal le Monde que la hausse des tarifs de l'électricité allait se poursuivre jusqu'en 2015 à un rythme annuel de 2,5 %. Jugez-vous que ces propos soient réalistes ? Cette hausse couvrira-t-elle seulement l'augmentation de la CSPE ou est-elle destinée à financer les besoins des réseaux en matière de transport et de distribution ? Il me semble que la mission d'information à laquelle j'ai participé avait dégagé un consensus sur les échéances à venir.
Les tarifs réglementés vont subir une augmentation : à quel rythme, à quelle échéance et dans quelle proportion ? Jusqu'à présent, la puissance publique a conservé la maîtrise de cette évolution, mais jusqu'à quand ?
L'éolien off-shore va donner naissance à deux projets en Normandie : celui de Fécamp, qui est bien accepté, et celui du Tréport, qui devrait compter 141 éoliennes, qui ne l'est pas. Dans ce secteur, seuls des grands groupes, comme EDF et GDF Suez, et non de jeunes entreprises qui n'y ont pas leur place, vont se tailler la part du lion, sachant qu'in fine le consommateur réglera toujours la note de leurs investissements. Ces groupes ont cependant fait la preuve de leur capacité à mener à bien de grands projets.
Stéphane Demilly. L'énergie solaire photovoltaïque a suscité un engouement certain, puisque la progression de l'équipement en panneaux solaires a largement dépassé les attentes du Gouvernement, qui a dû, fin 2010, remettre tous les dispositifs à plat, ceux-ci ayant généré un effet d'aubaine. Le balancier n'est-il pas revenu trop loin en sens inverse ? Les professionnels de la filière ont dû faire face à un changement de règles et se trouvent aujourd'hui dans une situation difficile, parfois critique. Il s'agit d'un secteur auquel on a brisé les ailes et qui doit de surcroît affronter la concurrence internationale et notamment chinoise. Les agriculteurs ont également vu les tarifs de rachat faire l'objet de modifications substantielles : il s'agit pour eux d'un véritable drame, dont ni la CRE ni le ministre n'ont semblé prendre la mesure.
Dans le secteur du biogaz, les installations poussent en Allemagne « comme des champignons » : 1 200 en 2010, près de 6 000 prévues en 2020, soit l'équivalent en production de deux centrales nucléaires. Un tissu industriel, qui a abouti à un maillage cohérent du territoire – le biogaz constitue outre-Rhin un élément déterminant de la compétitivité des entreprises agricoles – a permis un tel essor. En France les installations restent rares, bien qu'un décret récent ait augmenté le tarif de rachat consenti aux agriculteurs. Ne faudrait-il pas trouver un moyen d'inciter plus fortement au décollage de ce secteur ?
La biomasse, si l'on en croit le rapport remis fin 2009, et qui porte sur la période 2009-2020, semble promise à un bel avenir : de 520 MW en 2006, la production devrait passer à 2 300 MW en 2021. En 2010, un appel d'offre a porté sur une puissance de 200 MW. Pour ma part je suis avec la plus grande attention les projets Cogeban 1 et Cogeban 2.
Jean-Pierre Nicolas. J'exprime pour ma part quelque réserve sur l'idée d'un marché européen de l'énergie. En matière d'énergies renouvelables, tous les États membres de l'Union européenne ne sont pas logés à la même enseigne. Existe-t-il une étude communautaire sur les différents tarifs de rachat de l'électricité produite au moyen des EnR, par exemple à partir de l'énergie solaire photovoltaïque ?
Jean-Paul Chanteguet. L'année 2010 étant écoulée, pouvez-vous nous donner le montant définitif de la CSPE, ainsi que la part respective des différents types d'EnR ? À combien s'élève la contribution de chaque foyer ?
Un appel d'offres sur les centrales solaires au sol – chaque région devant disposer de la sienne – a été lancé pour une mise en service en 2011. Où en est-on ?
L'arrêté relatif aux tarifs de rachat de l'électricité issue de la méthanisation vient d'être publié. L'avis rendu au préalable par la CRE n'a manifestement pas été suivi. Pouvez-vous nous faire part des motivations de cet avis ?
Jean Dionis du Séjour. En matière d'énergie hydroélectrique, il me semble qu'une erreur se soit glissée dans les documents remis par la CRE. En effet, l'hypothèse de puissance installée en 2020 – 1 910 MW – ne fait pas bon ménage avec la puissance installée en 2010 – 13 900 MW, dont 2 077 sous obligation d'achat. En somme, que veut-on faire de ce secteur ? Ne faudrait-il pas relancer la micro-hydroélectricité, et mettre l'accent sur la création de ressources en eau, conformément à l'accord unanime exprimé par la loi de 2006 sur l'eau et les milieux aquatiques ? Il s'agit d'une énergie sobre.
Le CRE avait recommandé la fixation du tarif d'accès à l'ARENH entre 36 et 39 euros le MW. Le Gouvernement a tranché à 42 euros, mais personne ne croit à son argument du surcoût lié au renforcement de la sécurité du parc de centrales nucléaires.
François Loos. La production d'électricité fait partie intrinsèque de la compétitivité de notre économie. Or les EnR génèrent une part croissante de cette production : ne faudrait-il pas valider le chemin choisi, en d'autres termes la CSPE est-elle efficace ou « plombe-t-elle » le prix de l'électricité ? On peut s'interroger également sur la rationalité du prix auquel on rachète l'électricité produite à partir du biogaz : s'agit-il d'une réponse à une demande en expansion ou d'un signal destiné à orienter le développement du marché ? Une comparaison internationale pourrait s'avérer utile pour déterminer si nos tarifs de rachat sont pertinents.