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Intervention de Charles de La Verpillière

Réunion du 26 mai 2011 à 9h30
Nomination d'un député en mission temporaire — Examen d'un projet de loi adopté par le sénat après engagement de la procédure accélérée

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCharles de La Verpillière, rapporteur :

de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le président de la commission des lois, chers collègues, ce projet de loi, que le Sénat a adopté sans modification, ouvre la possibilité de maintenir temporairement à leur poste, bien qu'ils aient atteint la limite d'âge, les fonctionnaires occupant un emploi supérieur pour lequel la nomination est laissée à la décision du gouvernement.

C'est l'article 25 de la loi Le Pors du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de L'État qui a créé cette catégorie d'emplois, dont la liste a été dressée par un décret du 24 juillet 1985, signé par le président Mitterrand lui-même. C'est dire l'intérêt qu'il y portait. (Mouvements divers.)

Il s'agit d'environ six cents emplois, notamment ceux de secrétaire général de ministère, de directeur d'administration centrale, de préfet, d'ambassadeur, de recteur. Il est rare que l'on y nomme des contractuels. La plupart du temps, les personnalités choisies sont des hauts fonctionnaires placés en position de détachement.

En application de l'article 68 de la loi du 11 janvier 1984, ces hauts fonctionnaires doivent, le jour même où ils atteignent la limite d'âge de leur corps d'origine, quitter leur emploi en même temps qu'ils prennent leur retraite de fonctionnaire. Ils partent donc, pour la plupart, à l'âge de 65 ans, ou de 66 ans s'ils ont eu trois enfants ou plus ; ces limites seront repoussées progressivement de deux ans avec l'entrée en vigueur de la loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites.

Ce départ automatique le jour où est atteinte la limite d'âge ne touche que les hauts fonctionnaires et non les contractuels qui peuvent pourtant occuper les mêmes emplois supérieurs. Il crée donc une inégalité de traitement sans justification.

Surtout, il peut s'avérer très gênant pour le service, en raison des circonstances, de la personnalité du fonctionnaire ou de la mission qui lui a été confiée. Ce sera le cas, comme le secrétaire d'État l'a rappelé, pour un ambassadeur en poste dans un pays en crise ou en guerre. On peut penser aussi à un directeur d'administration centrale chargé de rédiger une réforme législative ou réglementaire importante ou de mener à bien la fusion de deux directions, ou encore à un haut fonctionnaire que son expérience et ses compétences ont désigné pour redresser une situation difficile.

Dans tous ces cas, il peut se révéler utile, voire indispensable, de maintenir le haut fonctionnaire en place pour lui permettre d'achever sa mission dans l'intérêt du pays. Tel est l'objet du projet de loi qui nous est soumis. Son article unique ouvre au Gouvernement la possibilité de maintenir le fonctionnaire dans son emploi nonobstant la limite d'âge. Mais le texte encadre très strictement cette faculté. Quatre conditions devront en effet être respectées, sous le contrôle du juge administratif.

La mesure devra rester exceptionnelle et être prise dans l'intérêt du service, au vu des critères que je viens d'énumérer.

L'intéressé devra, bien entendu être d'accord.

La durée de la prolongation sera fixée dans la décision ; elle sera plus ou moins longue, mais ne pourra jamais excéder deux ans.

Il pourra y être mis fin à tout moment.

Étant donné ces conditions très strictes, cumulatives de surcroît, la loi ne trouvera probablement pas à s'appliquer très fréquemment. Chaque année, quelques dizaines de hauts fonctionnaires atteignent la limite d'âge alors qu'ils occupent un emploi supérieur à la discrétion du Gouvernement ; et très rares, sans doute, seront les cas dans lesquels le Gouvernement jugera qu'une prolongation est à la fois possible et justifiée. C'est d'ailleurs cette considération qui a entraîné le rejet du projet par la commission des lois, contre l'avis de votre rapporteur.

Les orateurs inscrits dans le débat présenteront, mieux que je ne saurais le faire, les raisons qui ont conduit à ce rejet. Cependant, je ne crois pas déformer la pensée de mes collègues en disant qu'ils ont formulé trois critiques qui se recoupent en partie : un texte de circonstance, une loi ad hominem, une prolongation purement discrétionnaire. M'exprimant maintenant à titre personnel, je dois dire qu'aucun de ces arguments ne m'a convaincu.

En premier lieu, une loi est par définition un texte de portée générale qui régit des situations individuelles. Le fait que celle qu'il nous est proposé de voter soit susceptible de s'appliquer, dans les jours, les mois ou les années qui viennent, à tel ou tel préfet, recteur ou ambassadeur, ne la disqualifie aucunement. C'est la vocation de toutes les lois.

En deuxième lieu, ce n'est pas un texte de circonstance. Il restera en vigueur après sa première application, et ceux qui le critiquent aujourd'hui, s'ils exerçaient un jour des responsabilités gouvernementales, seraient bien aise d'en disposer lorsque les conditions seraient remplies.

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