Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Julien Dubertret

Réunion du 10 mai 2011 à 11h00
Mission d’évaluation et de contrôle de la commission des finances

Julien Dubertret, directeur du Budget :

Incontestablement, aligner des chiffres fait partie de mon travail. Cela dit, je considère celui-ci, tant dans mes fonctions actuelles que précédemment, comme devant me conduire à m'interroger sur les missions de service public et, même si la décision appartient à l'arbitre politique, sur leur utilité et leur efficacité. J'ai été particulièrement frappé dans ma carrière par l'extraordinaire changement de mode d'approche entre l'avant et l'après RGPP – plus même qu'entre l'avant et l'après LOLF – s'agissant des effectifs et des missions de l'État. Avant, il s'agissait de discussions à l'aveugle entre des ministères gestionnaires demandant en conférence budgétaire des moyens supplémentaires selon eux indispensables et un ministère du Budget exigeant qu'ils travaillent avec moins, ce qui se terminait le plus souvent par une sorte de jugement de Salomon. Un tel résultat, insatisfaisant tant du point de vue de l'action de l'État que de celui de la maîtrise de sa masse salariale, conduisait à une sorte d'asymétrie, avec des bouffées soit de créations soit de suppressions d'emplois, dans des proportions d'ailleurs jamais très importantes, mais sans que l'on s'interroge sur la question de savoir si l'État faisait bien ce qu'il entreprenait sans entrer suffisamment dans l'évolution des politiques publiques.

Sans la loi organique, cette démarche d'évaluation des politiques publiques n'aurait à mon avis jamais été possible. Avec la LOLF, l'ensemble des administrations – mais également des ministres et de leur cabinet – a compris qu'il y a une performance de l'action publique, qu'elle doit être mesurée et qu'il doit en être rendu compte. Pour autant, le volet performance des projets de loi de finances ne constitue pas en lui-même une évaluation des politiques publiques et n'est pas suffisant pour mobiliser les acteurs dans le dialogue budgétaire. Mais c'est un point de passage obligé – le point de non-retour a même été atteint – qui a permis d'habituer les acteurs à l'idée qu'un exercice de type RGPP est légitime, ce qui signifie que l'on ne travaille plus à l'aveugle.

Pour mettre les choses en perspective, le non-remplacement d'un départ sur deux à la retraite constitue un moteur très puissant pour nous obliger collectivement à nous questionner sur la façon dont nous travaillons et à mener un travail de fond avec l'aide d'équipes d'audit - qui ont à la fois du recul et une vraie connaissance des politiques considérées – afin d'avoir une discussion informée et non plus de chiffonniers autour des missions, les décisions sur les effectifs étant prises en fonction des réformes qu'on souhaite mettre en oeuvre. De ce point de vue, la pluriannualité nous a énormément aidés, en ce sens qu'elle justifie, puis qu'elle engage publiquement devant le Parlement pour plusieurs années, un travail de plusieurs mois au lieu d'une conférence budgétaire de quelques heures.

S'agissant, au total, de la manière dont je conçois ma fonction aujourd'hui, je dirai que je suis sans doute beaucoup plus heureux que nombre de mes prédécesseurs qui étaient peut-être davantage réduits à des logiques arithmétiques. Le travail budgétaire trouve au contraire son plein développement dans une approche qui s'intéresse au fond des politiques et qui s'inscrit dans une logique de dialogue entre les administrations et une contre-administration avec l'aide d'une expertise, et qui nous permet de donner un vrai sens, en termes de politique publique, à la réduction des effectifs.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion