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Intervention de Bernard Accoyer

Réunion du 24 mai 2011 à 15h00
Éloge funèbre de patrick roy

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBernard Accoyer, président :

Madame Roy, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, c'est avec une grande tristesse et beaucoup d'émotion que nous avons appris, le 3 mai dernier, la disparition de notre collègue Patrick Roy. Son courage dans son dernier combat restera pour nous un exemple.

La République a perdu un législateur, un élu toujours disponible pour défendre ses valeurs. L'Assemblée nationale a perdu un député à la fois combatif et estimé.

Ce qui nous rassemble aujourd'hui, au moment de saluer une dernière fois celui qui fut des nôtres pendant neuf ans, c'est le respect. Le respect, sur tous les bancs de notre Assemblée, pour un élu dévoué à celles et à ceux qui lui faisaient confiance, pour un homme de coeur et de conviction qui s'est battu tout au long de sa vie battu.

Avec cette force qui anime ceux qui savent pourquoi ils marchent sur le chemin qu'ils ont choisi, il s'est battu pour les autres, pour ses concitoyens de Denain et d'ailleurs, pour l'égalité des chances, pour une société plus humaine.

Optimiste et généreux, Patrick Roy était aussi un réaliste, un de ces hommes scrupuleux et précis qui ne se paient pas de mots.

À l'issue de ses études universitaires, il était contrôleur de gestion. Son altruisme, son sens civique l'ont conduit à mettre ses capacités au service de la collectivité. En 1982, il choisissait de devenir instituteur et, neuf ans plus tard, il siégeait au conseil municipal de Denain et au conseil général du Nord. En 2002 enfin, il entrait dans cet hémicycle, avec cette sincérité, cette combativité qui, chez lui, n'ont jamais faibli.

Enfant de la méritocratie, fils de la République, il a voulu rendre à tous ce qu'il avait reçu d'elle.

Patrick Roy était de ceux pour qui la politique n'est pas séparable de la morale, d'une morale laïque et exigeante, faite de loyauté et de responsabilité. Député, Patrick Roy l'était donc avec passion, avec fougue, et même parfois avec excès.

Élu d'une circonscription durement éprouvée par les crises, il ne se sentait pas le droit de composer, de relativiser, de s'abandonner au scepticisme. Il protestait, il réclamait, et nous tous ici avons connu ces moments où « un homme en colère », comme il se définissait lui-même, venait présenter ses doléances et ses propositions. Un tel élu, un tel militant ne pouvait laisser indifférent.

En bon républicain, toutefois, Patrick Roy connaissait aussi les vertus de l'écoute. Il aimait la confrontation des idées, mais dans le dialogue et le respect d'autrui. Toujours prêt à l'échange, à l'échange contradictoire, mais toujours la fraternité au coeur, Patrick Roy n'avait nullement le goût des vaines polémiques.

La politique, chez lui, avait pour synonyme l'argumentation. Il savait ce qu'il voulait, il connaissait les dossiers, il ne parlait jamais sans avoir examiné le problème avec attention. Sous sa veste rouge, le contrôleur de gestion était toujours là, voulant des chiffres, des faits, se montrant précis et capable de défendre pied à pied d'impressionnantes séries d'amendements.

Au Palais-Bourbon, l'instituteur qu'il fut pendant plus de vingt ans compta parmi les défenseurs inlassables de l'école républicaine. « L'école est le ciment qui unit chaque Français », déclarait-il dans l'hémicycle le 20 janvier 2004.

Ses plaidoyers pour l'école ne laissaient personne indifférent, parce qu'ils étaient pleins de vie et de verve, bien sûr, mais aussi parce que cette école que défendait Patrick Roy se situe au croisement de nos préoccupations les plus fondamentales : la laïcité, l'égalité des chances, l'éducation à la citoyenneté.

Et je ne voudrais pas, dans cette énumération, oublier la diversité culturelle, car Patrick Roy, c'était aussi la musique, le rock métal en particulier, qu'il aimait avec ardeur et qu'il aura fait découvrir à bien des députés.

Travailleur acharné, Patrick Roy était aussi assidu en commission que dans l'hémicycle. En 2007, il présidait le groupe d'études parlementaire sur l'amiante, puis, en 2009, la mission d'information de la commission des affaires sociales sur la prise en charge des victimes de ce matériau toxique dont il avait étudié les effets dévastateurs.

Attentif à la vie, à l'avenir et à la santé des autres, Patrick Roy fut lui-même frappé, en pleine maturité, au milieu de ses combats, par l'injustice de la destinée.

Au moment de lui rendre hommage, je ne peux évoquer son nom sans admirer son courage devant la maladie, ce courage qu'il a eu à coeur de transmettre à ceux de nos concitoyens souffrants qui suivent nos travaux.

Fidèle à lui-même, il a lutté avec ses armes – sa fermeté, sa solidité, son optimisme –, jusqu'au bout de la route. Avec sa force de caractère, que nous saluons tous ici, il a su un moment inverser le sort. Avec lui, nous avons voulu espérer quand, sorti de l'hôpital, ce député au courage exemplaire est revenu au Palais-Bourbon, exercer son mandat d'élu de la Nation.

Le 15 mars dernier, ici même, à la place qui était la sienne, alors qu'il côtoyait la souffrance depuis de longs mois, ce n'était pas la révolte, ni l'amertume, qui se lisaient sur son visage, mais quelque chose d'infiniment humain.

Avec sincérité, avec dignité, c'est au nom de « millions de victimes » qu'il avait tenu à témoigner. Avec des mots simples, et d'autant plus touchants qu'ils étaient simples, Patrick Roy nous a rappelé la vraie nature de l'Assemblée nationale, ce lieu de pouvoir qui est aussi un lieu d'ouverture et d'humanité où l'on peut être, tel qu'il se définissait, « un opposant farouche » sans renoncer à dire : « Je vous aime, toutes et tous ».

Je voudrais maintenant donner une dernière fois la parole à Patrick Roy, pour que nous sachions nous souvenir de son dernier message. « La vie est vraiment belle », nous a-t-il dit, avant d'ajouter : « Je suis très fier d'appartenir à cette belle démocratie française. »

Patrick Roy, nous sommes fiers de vous avoir connu.

À vous, madame, à son fils Kevin, à toute sa famille, à ses camarades du groupe socialiste, radical et citoyen, à tous les siens, j'adresse, au nom de tous les députés de l'Assemblée nationale et en mon nom personnel, mes condoléances attristées.

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