Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, nous voici réunis pour traiter, à la demande de votre assemblée, d'un sujet important, puisque l'assurance-vie est aujourd'hui le produit d'épargne préféré des Français.
Je souhaite donc saluer l'action d'Yves Censi et de Jean-Michel Fourgous, qui travaillent sur ces questions depuis longtemps et dont la proposition de loi vise à faire évoluer la législation au bénéfice de nos concitoyens. Je tiens également à saluer la concertation menée par vos commissions – celle des affaires économiques, présidée par Patrick Ollier, et celle des lois, présidée par Jean-Luc Warsmann –, concertation qui a abouti au texte présenté aujourd'hui, dont Éric Straumann est le rapporteur ; nous avons bien avancé ensemble, ces derniers jours, en totale concertation.
Il y a aujourd'hui 22 millions de contrats d'assurance-vie en France, qui représentent 38 % du patrimoine financier des Français ; 20 % des contrats se dénouent par décès. Sur ces 20 %, une fraction n'est pas réclamée par les bénéficiaires. Les professionnels estiment qu'entre 150 000 et 170 000 contrats ne seraient pas réclamés, ce qui représente une somme d'environ un milliard d'euros. Il arrive ainsi que, chez certains assureurs, des bénéficiaires soient âgés de cent trente ou cent cinquante ans…
Pourquoi ces contrats ne sont-ils pas réclamés ? Souvent, l'assureur n'est tout simplement pas informé du décès de l'assuré. Mais, surtout, les gens qui souscrivent un contrat d'assurance-vie n'informent pas toujours le bénéficiaire de l'existence de ce contrat. La législation actuelle les incite en effet au secret puisque, si le bénéficiaire accepte le contrat auprès de l'assureur, la décision est irrévocable et les sommes ne peuvent pas être récupérées par le souscripteur.
Pour régler la question des contrats non réclamés, le Gouvernement estime que nous devons travailler dans deux directions : l'information et l'incitation.
Commençons par l'information. Actuellement, l'assureur n'a pas les moyens de vérifier si un assuré est décédé. La proposition de loi de MM. Fourgous et Censi apporte une réponse aussi simple qu'efficace à ce problème, en ouvrant l'accès du fichier INSEE des décès aux assureurs. Elle donne ainsi aux assureurs tous les moyens d'identifier les contrats sur lesquels ils sont tenus de verser un capital.
Mais l'information n'est qu'une première étape. Nous devons également travailler sur les incitations. Tout d'abord, il ne faut plus que les assurés soient incités à cacher à leurs bénéficiaires l'existence d'un contrat d'assurance-vie. Tel est l'objet de l'amendement d'Yves Censi qui vise à réformer la clause d'acceptation des contrats d'assurance-vie afin que l'acceptation d'un contrat par son bénéficiaire n'empêche plus l'assuré de récupérer son capital. L'accompagnement des personnes âgées dépendantes, lié à l'allongement de la durée de vie, nécessite souvent des sommes importantes. Or, actuellement, celles de ces personnes qui ont souscrit un contrat d'assurance-vie au bénéfice d'un tiers et qui ont constitué ainsi une épargne importante – le montant moyen des contrats est de 50 000 euros – ne peuvent pas récupérer cet argent. Le Gouvernement est donc favorable à l'amendement d'Yves Censi car, quand on a travaillé toute une vie pour réunir un capital, il ne faut pas qu'on puisse se le voir retirer en raison d'une réglementation inadaptée.
Nous avons parlé des incitations pour l'assuré. Il faut également travailler sur les incitations pour les assureurs. Pourquoi voulez-vous qu'un assureur s'empresse de verser le capital d'un contrat d'assurance-vie aux bénéficiaires si la réglementation ne l'y incite pas ? Un amendement, déposé notamment par Laure de la Raudière, propose de renforcer l'obligation de moyens qui pèse sur les assureurs pour identifier les bénéficiaires et verser les sommes dues. Le Gouvernement y est favorable.
Je présenterai moi-même au nom du Gouvernement un amendement qui fixera aux assureurs un délai d'un mois pour verser le capital aux bénéficiaires à compter de la réception des pièces permettant d'effectuer le versement. Il s'agirait d'une avancée importante puisque la loi ne prévoit aujourd'hui aucun délai.