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Intervention de Jean-Jacques Candelier

Réunion du 17 mai 2011 à 21h30
Traité entre la france et le royaume-uni relatif à des installations radiographiques et hydrodynamiques communes — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Jacques Candelier :

Nous ne pouvons pas toujours être d'accord ! Tout à l'heure, j'étais d'accord avec vous pour la chasse. Là, je ne le suis pas.

Avec ces accords, le Gouvernement fait le constat de l'incapacité du Traité de Lisbonne à poursuivre la mise sur pied d'une défense européenne.

Souvenons-nous, par ailleurs, que le sommet de Londres est chronologiquement antérieur au sommet de Lisbonne de l'OTAN.

Au cours de ce dernier, le Président de la République avait de nouveau procédé à un changement d'orientation concernant la défense antimissile et le nouveau concept de l'OTAN. Nous n'avons pu avoir un débat parlementaire qu'une fois les décisions prises.

C'est même à l'occasion d'une conférence de presse à Londres que ces accords bilatéraux de partenariat stratégique ont été présentés de façon cavalière. Ils ont en effet été annoncés sans avoir été prévus dans la loi de programmation militaire, sans que soit précisée une doctrine d'emploi, sans information ni consultation du Parlement, c'est-à-dire des élus de la République.

Cette subite relance de la coopération avec le Royaume-Uni avait, à l'évidence, été motivée par le souci de mutualiser des équipements coûteux, mais, à la différence du sommet de Saint-Malo de 1998, qui marquait une adhésion, certes toute relative, de nos alliés britanniques à l'Europe de la défense, et qui pouvait avoir un effet d'entraînement, les traités de Londres sont bilatéraux. De fait, ils ne faciliteront pas d'autres coopérations.

Les conséquences de ces accords vont également bien au-delà d'une simple mutualisation. Il ne s'agit pas uniquement de mettre en commun des capacités, des matériels, et de créer une force militaire conjointe de 5 000 hommes pour des opérations extérieures. Il s'agit également d'envisager le rapprochement de nos industries et la fusion, à terme, des moyens de recherche et de développement sur certains programmes.

La coopération sur la recherche nucléaire, en partageant ces technologies dans des laboratoires communs de simulation et de modélisation, fait craindre la fin totale de notre autonomie nationale, même si l'on me certifie le contraire.

Je rappelle que, pour le Royaume-Uni, la coopération dans le domaine nucléaire militaire n'est pas une nouveauté. Les forces nucléaires britanniques participent à la planification nucléaire de l'OTAN, contrairement aux forces stratégiques françaises pour le moment. Elles coopèrent avec les États-Unis depuis le début dans le domaine nucléaire. Un premier accord secret signé le 19 août 1943 entre les deux pays prévoyait un droit de consultation en matière d'emploi de la force atomique. Cette coopération sera reprise et approfondie par l'accord de défense mutuelle de 1958, et la formalisation du partenariat anglo-américain en matière de dissuasion nucléaire remonte à l'accord du 21 novembre 1962.

À partir de cette date, les Britanniques constituent leur outil de dissuasion en achetant des missiles Trident américains. Ils obtiennent également l'accès à un site de tests nucléaires au Nevada. Plusieurs tonnes de plutonium produites au Royaume-Uni sont envoyées aux États-Unis en échange de tritium et d'uranium enrichi américains.

Cette relation privilégiée a été renouvelée récemment, l'accord de 1958 ayant été reconduit pour dix ans en 2004.

Si le Royaume-Uni a choisi d'assurer seul la fabrication de ses futurs sous-marins nucléaires, il a annoncé en 2005 son intention de renouveler son stock de vecteurs et devrait à nouveau se tourner vers les missiles Trident américains. Ces missiles devraient emporter des têtes nucléaires dont il semble que la conception et la fabrication soient assurées par les Britanniques, avec toutefois un très grand rôle d'expertise des laboratoires et industries américains.

Contrairement au Royaume-Uni, l'ensemble des éléments de l'outil de dissuasion nucléaire de la France sont de conception et de fabrication françaises. Il faut certainement redouter l'imbrication avec les Britanniques, qui ont une stratégie de doubles clés avec les États-Unis. On ne peut pas faire le pari d'un relâchement des liens entre la Grande Bretagne et les États-Unis.

Ma critique la plus vigoureuse de ces recherches communes porte sur leur motivation.

Je ne suis pas pour un retour aux essais nucléaires, je vous rassure. Le problème est que cette coopération a pour objectif de moderniser et de renforcer notre arsenal nucléaire, non de garantir sa crédibilité. En cela, le Gouvernement interprète très largement le principe de stricte suffisance, l'un des fondements de la doctrine militaire française.

La France ne se conforme pas non plus à l'un des engagements fondamentaux du traité de non-prolifération nucléaire, qui est de ne pas procéder à la recherche de nouveaux systèmes d'armes.

Je le dis et le répète, il faut une dynamique mondiale en faveur de l'abolition des armes nucléaires. Au lieu d'une course à l'armement et à la défense loin de l'objectif de paix, il faut réduire encore le stock de nos arsenaux, faire plus d'efforts diplomatiques afin d'arriver à la réduction multilatérale, mondiale, progressive et contrôlée des arsenaux. Tout l'enjeu est en effet de mettre un terme à la prolifération des armes nucléaires.

La France a ratifié le traité de non-prolifération nucléaire, mais elle le viole régulièrement, comme quand le Président de la République inaugure les armes nucléaires miniatures de demain : les lasers mégajoule.

Le nucléaire est une arme obsolète, désuète et inadaptée à la réalité des conflits modernes. En poursuivant dans la voie d'armes toujours plus sophistiquées, la France et la Grande-Bretagne tournent le dos à cette aspiration majoritaire des peuples de résoudre autrement que par la guerre et par la force les problèmes du monde.

Sans avoir la moindre amitié pour le tyran Kadhafi, que je n'ai jamais accueilli et que je n'accueillerai jamais dans mon jardin, soyez-en sûr, monsieur Teissier (Sourires), je ne peux que déplorer les innombrables victimes des bombardements de l'OTAN en Libye. Les bombardements d'hôpitaux et de bâtiments abritant des médias sont-ils autorisés par la résolution du Conseil de sécurité de l'ONU ? Je ne le pense pas.

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