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Intervention de Serge Blisko

Réunion du 10 mai 2011 à 15h00
Immigration intégration et nationalité — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSerge Blisko :

Monsieur le ministre, c'est toujours avec angoisse que nous voyons arriver un nouveau texte. On se demande à chaque fois ce que le Gouvernement a bien pu inventer. Et je dois dire que nous avons été très surpris, une fois de plus, par votre imagination : après le mariage blanc, vous avez inventé le « mariage gris » ; après la présomption d'innocence pour les employeurs qui emploient des clandestins et ne vérifient pas leurs papiers, vous avez inventé l'impunité absolue, l'auto-amnistie pour ces personnes.

Mais ce qui nous blesse le plus, comme l'ont dit MM. Touraine et Roman, c'est cet acharnement sur les plus fragiles : les demandeurs d'asile. Vous leur rendez la vie difficile. Pour ma part, je me réjouis qu'il y ait de nombreuses demandes d'asile en France : on sait que c'est la patrie des droits de l'homme. Mais l'examen est sévère. La première et la deuxième instance ne sont pas des filtres faciles. L'examen de la demande par l'OFPRA et par la Cour nationale du droit d'asile est un moment difficile pour les demandeurs d'asile.

On ne peut pas invoquer les bouleversements du monde, en Europe, au Proche-Orient ou dans des pays qui sont de l'autre côté de la Méditerranée, pour dire qu'il y a trop de demandeurs d'asile. On pourrait le dire si le système était vraiment une passoire, ce qui n'est pas le cas. Seulement 20 à 22 % des demandeurs d'asiles bénéficient finalement du statut de réfugié. Et ce chiffre ne peut que diminuer car, si la demande augmente, la sévérité est également accrue. N'oublions pas en outre que les variations sont à la fois géographiques et saisonnières. En effet, les gens arrivent massivement par moment du Proche-Orient, d'Afghanistan ou du Kurdistan – ce pays n'a pas d'existence légale mais on connaît le sort des populations kurdes.

Mme Mazetier a fait allusion, une fois encore, à l'arrivée, en janvier 2010, de 700 personnes sur une plage en Corse. Finalement, on a appris qu'il s'agissait de Kurdes qui auraient dû avoir la nationalité syrienne. Mais la Syrie, dont on découvre aujourd'hui que c'est un État dictatorial, leur avait retiré la nationalité, voire jamais donné. Ces personnes étaient donc étrangères dans leur propre village, leur propre pays. Voilà ce que recouvre aujourd'hui la demande d'asile.

Je le répète, vous mettez en danger les plus fragiles, et la démonstration que vient de faire M. Touraine est éclatante à cet égard. Le débat sur les étrangers malades est un débat de casuistique absolue. Il est évident que tous les traitements sont disponibles dans la pharmacie centrale de la capitale d'un pays mais seul un nombre infime de personnes y a accès. Les 99 % restants de la population ne savent même pas ce que c'est que d'aller dans une pharmacie. En France, les personnes qui se retrouveront dans des centres d'hébergement risquent par ricochet de mettre en danger leur entourage parce qu'ils ne pourront pas soigner par exemple une tuberculose, maladie dont on constate la recrudescence dans ces milieux.

J'en viens maintenant à cette défiance extraordinaire à l'égard des juge des libertés et de la détention qui, on le sait, ne sont pas toujours extrêmement laxistes. Mais qui est le garant de la liberté d'aller et de venir, ce qui est l'un des fondements de notre démocratie ? Vous avez introduit, à juste titre, une disposition qui prévoit l'intervention du juge des libertés dans les hôpitaux psychiatriques au bout de quinze jours en cas d'hospitalisation sans consentement – ce délai de quinze jours répond à un problème médical, n'ayez crainte madame Mazetier. C'est l'un des rares point que nous avons approuvé. Du reste, tout le monde s'en est félicité, y compris ceux qui, dans le milieu psychiatrique, sont opposés à ce projet de loi, considérant qu'il est bon qu'il y ait un regard judiciaire ce qui ne veut pas dire une judiciarisation.

En l'occurrence, nous demandons la même chose. Mais vous vous y opposez, craignant que le JLD ait un regard plus protecteur des libertés que le juge administratif dont le rôle n'est pas de protéger les libertés mais de vérifier que la loi a bien été appliquée.

Ce texte est donc mauvais. Il inspire la méfiance, et il est peu protecteur, notamment de ceux que nous devrions protéger encore plus, c'est-à-dire les plus fragiles. Comme le disait tout à l'heure Julien Dray, nous sommes les adeptes raisonnables et résolus d'une régulation de l'entrée et des flux. Contrairement à ce que vous faites, nous ne devons pas être seulement dans la répression. Du reste, cet appel à la répression ne profite qu'à vos voisins – mais la porosité devient extrême – du Front national.

Voilà toutes les raisons pour lesquelles le groupe SRC rejettera ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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