Le souci de la commission des finances se résume à un seul objectif : protéger au mieux le droit d'initiative parlementaire. Tel a été le fil conducteur de ses travaux.
En effet, le monopole conféré aux seules lois de finances et de financement réduit considérablement la marge de manoeuvre des parlementaires. D'abord, les lois de finances et de financement sont exclusivement d'initiative gouvernementale. Ensuite, elles ne peuvent comporter que des mesures financières, et vous savez tous à quel point le Conseil constitutionnel est vigilant pour annuler les rares cavaliers budgétaires qui ont pu passer. Enfin, les lois de finances et de financement sont totalement contraintes dans le temps : il est systématiquement fait recours à la procédure d'urgence et les délais sont extrêmement réduits.
Pour ces raisons, nous avons estimé qu'il fallait tenter de préserver un peu de marge de manoeuvre pour les parlementaires, malgré l'objectif – que nous partageons – de mettre de l'ordre dans nos finances. D'où l'idée d'introduire au sein de ce monopole, à côté de textes qui sont uniquement d'initiative gouvernementale, des lois ordinaires, autrement dit des lois que n'importe lequel d'entre nous peut proposer. Ces lois, que nous appellerions « lois de prélèvements obligatoires », porteraient sur les recettes.
Si l'un d'entre nous, par exemple, souhaite présenter une proposition de loi sur l'amélioration de la gestion de l'eau en France, elle traitera de l'organisation des agences de bassin, de la qualité de l'eau, bref de sujets qui, pour 90 % d'entre eux, ne sont pas d'ordre financier. Mais pour être opérationnel, il faudra peut-être y greffer une petite majoration de la redevance des agences de l'eau. Or, dans le cadre d'un monopole strict des lois de finances et de financement, un parlementaire ne pourra pas présenter une telle proposition.
En revanche, avec la solution proposée par la commission des finances, ce parlementaire pourra présenter sa proposition de loi sur l'amélioration du régime de l'eau et lui adjoindre une proposition de loi de recettes portant sur la petite augmentation de la redevance. Ainsi, il conservera, en toute cohérence, son droit d'initiative.
Comme vous pouvez le constater, nous sommes très scrupuleux. Il est exact que si tout est concentré dans les lois de finances, cela augmente forcément les responsabilités de la commission des finances, puisque c'est elle qui est compétente en la matière. Nous nous sommes donc dit qu'il fallait respirer un peu en dehors des lois de finances et maintenir le droit d'initiative à tous nos collègues. D'où cet amendement qui, certes, peut donner le sentiment d'une certaine complexité…