Je voudrais rappeler le rapport de Gilles Carrez sur l'application de la loi fiscale. Il est désormais établi que, depuis 2002, ce sont 100 à 120 milliards d'euros de recettes fiscales, soit entre six et sept points de PIB, que deux majorités successives – les vôtres, mes chers collègues – ont décidé d'abandonner. Si la perspective de la dette publique n'était pas de 86 % du PIB, mais était comprise entre 75 et 80 % du PIB, l'alerte que vous croyez détecter sur les marchés et dans les agences de notation serait peut-être moins inquiétante que, en dépit de votre prudence, vous ne semblez l'admettre.
Nous discutons donc d'un processus de réforme des travaux parlementaires qui ne garantit en rien l'équilibre des finances publiques. Permettez-moi de vous faire part de mon incompréhension. Vous nous proposez d'adopter cette réforme constitutionnelle dans l'urgence, dès cet été, mais sa mise en oeuvre est renvoyée sine die. Personne ne sait quand elle sera appliquée. Ne devriez-vous pas, par cohérence, adopter dans la foulée les textes qui lui permettraient de l'être dès l'année 2012 ? Si ce processus est indispensable à la maîtrise des dépenses publiques, au nom de quoi pourriez-vous vous affranchir de cette contrainte en 2012, au motif qu'il s'agit d'une année électorale ? Vous nous garantissez que, cette année-là, vous veillerez soigneusement à l'équilibre des finances publiques. S'il en est ainsi, la réforme constitutionnelle est inutile : n'allez-vous pas vous en passer en proposant au Parlement une loi de finances initiale et une loi de financement de la sécurité sociale respectueuses de ces principes ? Je ne vois donc pas comment vous pouvez expliquer cette contradiction et répondre à mes interrogations que d'autres doivent partager.
Si la réforme constitutionnelle est adoptée, nous vous demandons de veiller à ce que ces dispositions s'appliquent dès 2012 ; mais si vous estimez qu'elle n'est pas nécessaire pour assurer la maîtrise des dépenses publiques en 2012, nous vous demandons d'attendre que les échéances électorales aient eu lieu pour – dans l'hypothèse où vous convaincriez les Français de la justesse de votre projet – faire adopter cette réforme pour la prochaine mandature. C'est bien une cote mal taillée que vous proposez en réformant la Constitution dans l'urgence mais en prévoyant des dispositions qui ne s'appliqueront qu'à une date indéterminée, et en tout cas pas en 2012.