Nous abordons ce débat dans un esprit de responsabilité et d'ouverture.
Esprit de responsabilité, parce que c'est évidemment la responsabilité des parlementaires que de faire cesser cet amoncellement de dettes dont la charge est transférée aux générations futures. Je le dis avec d'autant plus de conviction que, comme vous le savez, durant cette législature, lorsqu'il s'est agi de transférer sur les générations futures une partie des dépenses de prestations sociales des années 2009 à 2011, à travers un emprunt sur quinze ans, votre commission des lois s'y est opposée à l'unanimité. Nous restons constants, comme en témoignent les amendements que nous avons adoptés.
Esprit d'ouverture, parce qu'il ne s'agit de faire le procès de personne, d'aucune instance. Mais le fait est que, devant une telle situation, il est légitime de poser la question à chacun de ceux qui interviennent dans la gouvernance de notre pays : n'est-ce pas le moment de modifier notre manière de travailler, notre manière de traiter les questions budgétaires, afin d'aboutir à des processus plus vertueux ?
Votre commission des lois a travaillé avec deux objectifs. Le premier, c'est de donner plus de consistance et de crédibilité au texte qui est proposé, et de l'enrichir par des amendements.
Le second, c'est de le faire en respectant la place de chacune des autorités au sein de nos institutions, et en respectant le Parlement. On n'améliorera pas la situation des finances publiques contre le Parlement. On ne l'améliorera que grâce à un meilleur travail, mené en commun.
Quels ont été les apports de notre commission ? Premièrement, la création des lois-cadres, que M. le ministre vient de présenter. C'est évidemment une mesure extrêmement positive, puisque ces lois-cadres vont fixer, comme leur nom l'indique, un cadre. Ainsi, un certain nombre de dispositions s'imposeront aux lois de finances et aux lois de financement de la sécurité sociale qui seront votées dans les années à venir.
Cependant, dans le texte qui nous est présenté, quelles sont les dispositions de ces lois-cadres qui s'imposent aux futures lois de finances et aux futures lois de financement de la sécurité sociale ? Aucune, puisque tout est renvoyé à une loi organique, qui devra les fixer. Nous avons considéré, en commission des lois, que pour donner une crédibilité au nouveau système de lois-cadres, il fallait un corpus minimum. Il nous a semblé tout à fait légitime que la loi organique ajoute des objectifs qui s'imposent aux lois de finances et aux lois de financement de la sécurité sociale, mais que, par contre, trois éléments devaient par nature s'imposer.
Le premier, c'est que les lois-cadres devaient, pour chaque année, fixer un minimum de recettes pour l'ensemble État-sécurité sociale. Le second, c'est un maximum de dépenses pour l'État. Le troisième, c'est un maximum de dépenses pour la sécurité sociale.
Nous avons donc adopté un amendement qui prévoit que ces trois chiffres s'imposeront à chacune des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale. Les lois organiques pourront ajouter d'autres données. Mais c'est cela qui nous semble être le minimum en termes de crédibilité.
Deuxième point, que se passe-t-il s'il y a un écart ? C'est là un sujet très important. Imaginons qu'en 2012, le Parlement vote une loi-cadre prévoyant que les dépenses de l'État ne devront pas dépasser un certain montant en 2013, et que, parmi les dépenses, un dispositif voté par le Parlement soit estimé à 1 milliard d'euros. Imaginons qu'au cours de l'année 2013, l'on s'aperçoive que son coût est en réalité de 5 milliards d'euros. Que se passe-t-il, donc, s'il y a un dépassement ?
La réponse qui nous est proposée aujourd'hui est celle qui consiste à dire que dans la loi de finances qui suit, si le dispositif est maintenu, on ne va pas l'estimer à 1 milliard mais à 5 milliards, puisque l'on saura, pour l'avoir appliqué pendant un an, combien il coûte. Mais cela ne suffit pas, mes chers collègues, parce que s'il n'y a rien qui vous garantit contre les écarts dans la réalisation, cela veut dire qu'il ne se passe rien, et que les dérapages éventuels seront l'occasion d'une augmentation de la dette. C'est pourquoi nous avons voté un amendement qui prévoit que la loi organique devra définir la manière dont les écarts seront gérés.
Pour dire les choses clairement, cela veut dire que si un Gouvernement a fait voter une loi-cadre qui prévoit un maximum de dépenses et s'il n'a pas été capable de le respecter, il devra, dans les lois de finances qui suivent, récupérer, par des économies ou des recettes supplémentaires, la dépense qu'il aura laissé filer. Si nous n'avons pas un mécanisme qui nous garantit contre les écarts, nous n'arriverons jamais à entrer dans un processus de réduction des déficits.