J'ai beaucoup d'estime pour mes amis du Nouveau Centre et pour la qualité de leurs productions, mais, pour la deuxième fois cet après-midi, je propose de voter contre leur proposition de loi, qui prévoit une interdiction totale de la fabrication, de l'importation, de la vente ou de l'offre de produits contenant des phtalates, des parabènes ou des alkylphénols.
Comme je l'avais souligné lors de la discussion générale, ce texte peut paraître séduisant avec la mise en place d'une interdiction totale préventive pour protéger la santé de nos concitoyens. La réalité est toutefois plus nuancée, et une interdiction totale risquerait de causer plus de problèmes qu'elle n'en résoudrait. Sommes-nous bien sûrs qu'il existe des solutions de substitution présentant de meilleures garanties pour la santé de nos concitoyens ?
Cette inconnue, ajoutée à l'existence d'un encadrement des perturbateurs endocriniens par des textes nationaux et communautaires et aux recherches en cours encore non abouties, nous pousse à voter contre l'adoption de ce texte. Il ne s'agirait pas de troquer à la hâte un mal non établi contre un péril plus important, si d'aventure les substituts étaient plus toxiques ou moins efficaces que les composés actuels. Dans le cas critique des phtalates, que j'avais déjà abordé, la difficulté majeure d'une interdiction tient à la place qu'ils occupent dans la composition des dispositifs médicaux, dont ils représentent parfois plus de 50 %. Pour avancer sur leur encadrement et leur éventuelle interdiction, il est beaucoup plus sage d'attendre les résultats des études menées par l'INSERM et les autres instituts de recherche tout en maintenant un haut niveau de vigilance.
De plus, nous ne sommes pas seuls. Nous devons consulter nos partenaires européens si nous souhaitons arriver à une décision efficace. Comme vous le savez, la mise en place du système REACH et l'évaluation de la dangerosité des différents composés chimiques par les industriels, qui doivent désormais montrer l'innocuité des substances chimiques qu'ils fabriquent ou commercialisent, va nous permettre de bien mieux protéger la santé humaine et l'environnement.
Au nom du groupe UMP, je salue la compréhension du rapporteur qui, pour répondre aux objections qui lui avaient déjà été opposées en commission des affaires sociales, avait déposé un amendement substituant à l'interdiction totale une mesure beaucoup plus ciblée.
Ce débat nous a donné l'occasion de dialoguer avec le ministre sur les études actuellement en cours, les autres substances potentiellement à risque et les différentes façons de mieux protéger nos concitoyens. L'actualité récente vient d'ailleurs confirmer ce que nous disions il y a quinze jours puisque la synthèse portant sur la reproduction et l'environnement, que l'INSERM a publiée le 13 avril dernier, conclut à une insuffisance des preuves et à la nécessité de poursuivre les études. Nous comptons sur le ministre pour renforcer les moyens alloués à ce champ de recherche et nous tenir informés dès la conclusion des travaux.
Ce qui nous conduit à rejeter ce texte, c'est notre philosophie de la gestion du risque : ce sont les expertises en cours qui, une fois menées à leur terme, fonderont scientifiquement les décisions à prendre en tenant compte des avantages et des risques des produits de substitution pour les différents produits susceptibles d'être interdits. C'est notre vision – même si cela ne l'a pas toujours été, en particulier pour certains produits de traitement des fruits et légumes – d'une gestion du risque responsable et pragmatique, qui ne doit pas se contenter d'interdire sur la base d'un danger potentiel, mais qui se doit d'aborder le problème dans sa globalité, la balance bénéfice-risque des substances ou procédés de remplacement ne devant pas, au final, être moins favorable à la santé humaine que celle du produit remplacé. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)