Vous mettez le doigt sur une question essentielle pour notre industrie, et pas seulement pour elle. Les grands groupes ont plus de facilité à recruter que les PME, ce qui leur donne une responsabilité particulière. Le groupe Safran accueille par exemple environ 1 400 apprentis, c'est-à-dire 4 % de ses effectifs, cette proportion devant bientôt passer à 5 %. Ces apprentis sont aussi bien des ouvriers que des techniciens supérieurs et des ingénieurs en alternance. Leur formation professionnelle donne à ces personnels des références de très grande qualité. Ils trouvent ensuite très facilement un emploi, soit chez Safran, soit ailleurs.
Nous devons faire plus, c'est-à-dire procurer de la visibilité y compris pour les emplois dans les PME. Les personnels ont besoin d'avoir la certitude que l'industrie française a un avenir et que les talents manuels ont autant de valeur que les autres. Il faut néanmoins que les Français acceptent que la vie, c'est le mouvement. À condition de faire fructifier nos talents, nous pouvons non seulement conserver notre rang mais accroître notre activité dans un monde plus global. Le réservoir de main-d'oeuvre dont nos disposons est tout à fait spécifique. La comparaison de la productivité horaire par opérateur entre General Electric et Safran nous est nettement favorable. Il est vrai, en revanche, que la comparaison des coûts du travail conduit à une conclusion différente. Mais changer de modèle global ne me paraît guère réalisable. Nous devons créer la certitude que, même s'il peut être fait de mobilité, géographique comme de métier, il y a un avenir dans les métiers industriels.
Nous voulons essayer de développer une vraie gestion prévisionnelle de l'emploi et des compétences à l'échelle de la filière, de la PME aux grands donneurs d'ordres. Il est invraisemblable que dans une société de mécanique de haute technologie de 200 personnes à Valence, 30 postes, dont la moitié d'agents de maîtrise de niveau BTS, soient vacants parce que la direction n'arrive pas à les pourvoir. Même si dans dix ans, les personnes recrutées ne seront peut-être plus à Valence ni dans cette société, leur savoir-faire continuera à valoir de l'or. Notre déficit de communication, dont j'accepte la co-responsabilité, est considérable. Nous allons y remédier.