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Intervention de Xavier Darcos

Réunion du 13 avril 2011 à 10h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Xavier Darcos, président de l'Institut français :

Nous avons déjà eu l'occasion avec votre Commission, lors d'une réunion conjointe avec une autre, d'évoquer la création de l'Institut français. Aussi, je ferai plutôt un point d'étape. La mise en place de l'Institut, une fois n'est pas coutume, s'est faite dans un délai relativement bref, qu'il s'agisse de traduire la loi de 2010 en décrets d'application ou de prendre les dispositions nécessaires pour le démarrage puis pour le fonctionnement de cette lourde machine dès le 1er janvier 2011. Cependant, même si l'établissement public est déjà en action – mon propre agenda est là pour le prouver ! –, nous sommes dans une période de transition puisqu'il nous faut encore organiser la première tenue du conseil d'administration – j'espère avant l'été, le 18 juin – et que nous attendons la nomination de plusieurs représentants, ceux des ministères des affaires étrangères et européennes et de la culture et de la communication et ceux des départements et régions. Le décret du 30 décembre 2010 relatif à l'Institut français prévoit à cet égard que le conseil d'administration comprend, outre son président, vingt-neuf membres : deux députés et deux sénateurs – je me félicite d'y voir siéger pour ce qui vous concerne deux bons connaisseurs du réseau culturel extérieur, M. Didier Mathus et M. Hervé Gaymard –, treize représentants de l'État, cinq personnalités qualifiées, quatre représentants des collectivités territoriales et trois représentants du personnel de l'établissement.

Il conviendra également de réunir avant l'été, si possible au mois de juin, le conseil d'orientation stratégique. Bien que l'institut n'ait qu'une tutelle – le Quai d'Orsay –, le président de ce conseil – le ministre des affaires étrangères – est assisté d'un vice-président en la personne du ministre chargé de la culture. Là aussi, un député et un sénateur doivent être désignés par leur assemblée respective.

Toujours parmi les obligations administratives nécessaires au bon fonctionnement de l'établissement public, nous aurons à finaliser la conclusion d'une convention triennale d'objectifs et de moyens. La logique de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) nous obligeant à rédiger un texte relativement complexe, de nombreuses réunions y sont consacrées sous la direction du secrétaire général du Quai d'Orsay. Ce document sera non seulement signé par les ministères des affaires étrangères et de la culture, mais aussi par celui du budget.

Par ailleurs, nous avons des discussions compliquées – dues notamment à la Révision générale des politiques publiques (RGPP) – pour achever le transfert de la masse salariale des agents des deux ministères concernés : si nous avons pratiquement conclu le transfert des sept agents du ministère de l'éducation nationale, je dois rencontrer le ministre de la culture dans dix jours s'agissant de ses six agents transférés. Dans l'esprit de la loi, l'Institut devait être doté à Paris pour son fonctionnement national de 200 emplois. Nous en comptons aujourd'hui environ 150, et il faudra absolument que les emplois complémentaires soient transférés car nos missions sont très lourdes, bien au-delà de celles de CulturesFrance – je pense notamment à l'expérimentation du rattachement à l'Institut français de treize antennes du réseau culturel de la France à l'étranger.

Je rappelle en effet, concernant cette expérimentation, qu'à moyen terme la totalité des centres et instituts devrait être rattachée à l'Institut français sous un logo unique. C'est un sujet difficile, qui a fait l'objet de nombreuses discussions, voire de résistances, certains de nos représentants locaux ayant le sentiment d'être dépossédés d'une partie de leurs responsabilités. Pour autant, si l'on veut que l'Institut français soit crédible et comparable à ses homologues étrangers tels que le British Council ou le Goethe Institut, la mise en réseau est nécessaire. Un rapport, remis par nous sur ce sujet le 31 mars, sera d'ailleurs transmis au Parlement sur ce point.

Les difficultés sont d'ailleurs d'ordre moins théorique – car tout le monde comprend bien l'intérêt d'un réseau unique – que technique, du fait des nombreux problèmes que cela pose en termes de rattachement administratif ou encore de contrats locaux, surtout dans les petits postes. Notre ambassadeur à Belgrade me faisait ainsi part hier de sa difficulté, en raison de la faiblesse de son service de coopération culturelle, à faire en sorte qu'une partie de ses cadres se partage entre les compétences liées à la gouvernance et celles liées à la culture.

La situation comptable de l'Institut repose sur un budget initial de 45 millions d'euros, qui sera porté, si l'expérimentation réussit, à 67,3 millions d'euros au 1er janvier 2012 puisque ces postes représentent aujourd'hui 22,3 millions dont 10 de recettes. La montée en puissance du réseau unique changera donc notre budget, ce qui exigera d'ailleurs un changement de notre système comptable – ce qui est un très grand défi – pour le rendre compatible avec celui des établissements à autonomie financière (EAF), lesquels sont soumis au régime de la comptabilité publique.

Si l'expérimentation réussit, nous procéderons, au 1er janvier 2013, à l'organisation du réseau unique. Cette réussite tient à deux éléments : d'abord que l'expérimentation soit réversible – si elle ne marche pas –, ensuite qu'elle soit représentative, et c'est pourquoi nous avons choisi des postes extrêmement différents qui vont de ceux de l'Inde et du Chili, à ceux du Koweït, du Ghana, de Singapour, du Sénégal, de Serbie ou d'Abu-Dhabi. Ce dernier exemple est d'ailleurs caractéristique des pays dans lesquels la diplomatie française a fait le choix de renforcer notre action, sachant que les Émirats sont eux-mêmes très demandeurs : il existe à Abu-Dhabi une Sorbonne et un Louvre, dotés de budgets de 500 millions d'euros, et il serait dommage que l'action culturelle française proprement dite soit en retrait vis-à-vis de ces établissements publics qui créent des lieux nouveaux. L'Institut français doit venir en complément et en appui. Tel devra être aussi le cas à Shanghai où les acteurs culturels devront contribuer à donner vie au pavillon français de l'Exposition universelle – conservé, contrairement à l'immense majorité des autres. Peut-être même faudra-t-il y installer notre Institut – solution que j'ai examinée avec le consul général.

Je cite ces deux exemples pour montrer combien il faut faire du cousu main, en s'adaptant aux divers lieux et situations locales. En Inde, où le réseau repose essentiellement sur celui des Alliances françaises, faire entrer ce dernier dans une logique unique mérite ainsi une attention spécifique.

Je suis convaincu de l'utilité de cette mise en réseau. Elle constitue une valeur ajoutée en rendant beaucoup plus lisibles les actions de la France dans le monde, en permettant une économie de moyens, et surtout en promouvant un projet commun de diplomatie culturelle française : les valeurs portées par la France ne peuvent être différentes selon les pays, qu'il s'agisse de l'idée que nous nous faisons de la gouvernance, des droits de l'Homme, du rapport à l'environnement, du dialogue Nord-Sud ou encore de la répartition des richesses. Au-delà de la marque unique « Institut français », il faut une stratégie commune dans ces domaines. L'Institut constitue à cet égard un appui à la diplomatie française par les voies de l'influence culturelle, bien évidemment sous la tutelle du ministère des affaires étrangères et européennes.

Pour en revenir aux problèmes matériels, nous comptons nous installer dans les deux mois qui viennent dans nos locaux propres en rapatriant nos personnels travaillant aujourd'hui dans différents lieux : rue de la Convention, où se trouve le ministère chargé de la coopération, dans les anciens locaux de CulturesFrance et dans différents ministères. Nous avons à cet effet loué, sous le contrôle de France Domaine, les 3 500 mètres carrés qu'occupait le Commissariat à l'énergie atomique, rue de la Fédération.

Nous avons par ailleurs récupéré 99 salariés de CulturesFrance et recruté 41 équivalents temps plein (ETP) supplémentaires, soit une équipe relativement serrée, je le répète, pour des projets aussi immenses, sachant que nous avons recruté une directrice du département communication et nouveaux médias, Mme Catherine Briat, et que nous allons recruter deux directeurs, un pour le département du mécénat et des partenariats – car il faut évidemment lever des fonds – et un pour celui de la Langue française.

La panoplie d'activités qui est devant nous est énorme, qu'il s'agisse de fournir de l'offre culturelle à nos représentants dans les divers postes, de gérer de grands événements tels que le Pavillon « Les Cinémas du Sud » au Festival de Cannes ou la Biennale de Venise, ou de mettre en oeuvre des décisions déjà prises, par exemple l'organisation des Saisons croisées comme celle décidée par le Président de la République et par son homologue Jacob Zuma avec une saison française en Afrique du Sud en 2012 et une saison sud-africaine en France en 2013. C'est vous dire à quel point ces activités sont variées et immenses, mais également passionnantes pour le président que je suis.

J'insisterai plus particulièrement sur l'une de nos compétences nouvelles, à savoir la professionnalisation des acteurs culturels appartenant au réseau, qu'il s'agisse de la formation ou du suivi des carrières. Nos agents dans les services culturels ont en effet des origines et des formations d'une très grande disparité – sachant que tous sont des passionnés qui, avec peu de moyens, accomplissent des miracles. Nous tiendrons à Marseille, dans la deuxième quinzaine de juillet, un premier séminaire de formation.

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