Ce faisant, ils empêchent une vraie réforme, conforme à notre idéal républicain et aux exigences constitutionnelles et conventionnelles. Ils méprisent la représentation nationale convoquée pour valider un texte rustine rédigé à la va-vite. Vous n'êtes parvenus qu'à mettre d'accord les policiers et les magistrats, mobilisés ensemble contre un projet qu'ils jugent inapplicable.
Nous avions pourtant tout le temps de réaliser une réforme d'ampleur qui mette d'accord policiers et magistrats, une réforme qui n'ouvre pas tant de possibilités de censure de la part du Conseil constitutionnel, ce qui nous contraindra à recommencer notre travail.
Mes chers collègues, une meilleure protection des droits et des libertés des citoyens passe autant par une meilleure procédure de garde à vue que par un renforcement des effectifs et des moyens de la police républicaine, de la justice sur tout le territoire. L'un ne s'oppose pas à l'autre.
Comment permettre une garde à vue dans la dignité alors que les budgets sont coupés ? L'amélioration des conditions de la privation de liberté se heurte à l'objectif désastreux de réduction des dépenses publiques et de suppression d'un poste de fonctionnaire sur deux. Ces coupes claires, ces suppressions de postes et ces politiques de rabotage budgétaire sont en train de créer de la violence au sein de la société. Si le Gouvernement met beaucoup de zèle à déposséder les services publics, il en met bien peu à faire progresser les libertés.
En effet, le ministre de l'intérieur, Claude Guéant, quand il ne déclare pas que les musulmans sont trop nombreux, que les Français ne se sentent plus chez eux ou qu'il est urgent de mener des croisades, prend publiquement la parole pour contester toute réforme de la garde à vue, car cela compliquerait le travail de la police. C'est dire le degré de motivation du Gouvernement pour appliquer les principes constitutionnels et conventionnels.
Comment s'étonner, dès lors, que le dispositif que nous examinons ne soit pas financé ? L'absence des budgets nécessaires à l'application de cette réforme a été soulignée au cours de la discussion, aussi bien par les syndicats de policiers, par les syndicats de magistrats que par le président de la commission des lois, Jean-Luc Warsmann. Vous-même, monsieur le garde des sceaux, l'avez reconnu au cours des débats.
Voter ce texte, c'est accepter de légiférer en pure perte, pour une durée limitée, au mépris de ce que nous savons et des valeurs que nous entendons défendre. Les députés communistes, républicains et du parti de gauche ne donneront pas quitus au Gouvernement. Par souci de cohérence avec notre vote à l'issue de la première lecture, face au mépris avec lequel est traité le législateur et pour hâter une vraie réforme d'ampleur de la garde à vue et de la chaîne pénale tout entière, nous voterons contre ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)