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Intervention de Hervé Grimaud

Réunion du 5 avril 2011 à 17h00
Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

Hervé Grimaud :

Le lien entre les pouvoirs publics et les éco-organismes est très fort ; je dirais même que nous ne sommes pas loin de la cogestion. Nous sommes des sociétés commerciales à but non lucratif, des sociétés privées, mais avec un censeur d'État au sein de nos conseils d'administration. Certains qualifient les éco-organismes de trait d'union entre le monde des producteurs, où la concurrence fait rage, et la mission d'intérêt général que nous assurons en bonne intelligence avec le corps social. La transparence est totale : nous faisons l'objet d'audits réguliers des pouvoirs publics et d'audits par tierces parties ; nous rendons compte à travers les rapports annuels, nous faisons des présentations devant la commission d'agrément, qui représente l'ensemble du corps social.

Les producteurs, qui supportent un coût supplémentaire, le répercutent à leurs clients, qui eux-mêmes le répercutent. C'est pourquoi l'éco-contribution a plusieurs mérites : d'une part, dans la mesure où la transparence qu'elle induit garantit l'absence de prise de marge depuis le producteur jusqu'au distributeur de proximité, elle permet de limiter l'effet inflationniste des filières; d'autre part, en créant une prise de conscience de l'existence de notre filière, elle a une vertu pédagogique forte.

En dehors du contrôle des pouvoirs publics, nos organes de gouvernance sont assez structurés et ne souhaitent pas que l'argent mis dans les éco-organismes soit dilapidé. Les règles de gestion sont strictes. En matière de gestion de trésorerie, je crois que tous les éco-organismes ont à peu près les mêmes pratiques : des placements sous forme de bons de Trésor, qui ont pour objet de limiter le risque en capital mais dont le rendement est en général très faible.

Un éco-organisme n'a pas vocation à devenir logisticien de collecte ou entreprise de traitement. Nous devons définir de bonnes pratiques dans des cahiers des charges et nous assurer que les opérateurs du marché, dont la majorité sont de bons professionnels, s'efforcent de recycler correctement les produits. Notre responsabilité ne se limite pas à la livraison d'équipements à un prestataire : nous avons un droit de regard sur les filières en aval pour nous assurer que le prestataire qui sépare les fractions les remet ensuite à un opérateur qui sera capable soit de les purifier, de les affiner et de les remettre sur le marché, soit de les détruire définitivement si elles sont non réutilisables ou dangereuses. Le choix des prestataires répond à des critères autant qualitatifs qu'économiques, notre rôle étant de bien faire, mais au juste prix.

S'agissant du « 1 pour 1 », les distributeurs ont joué le jeu dès le départ. Aujourd'hui, 13 000 magasins sont équipés de bacs de collecte. Cette initiative d'Eco-systèmes fait énormément sens, car elle permet d'aller au-delà du « 1 pour 1 », les consommateurs pouvant déposer une lampe usagée sans avoir besoin d'en acheter une neuve. Nous accompagnerons Eco-systèmes autant que nous le pourrons dans la réalisation de ces espaces multi-filières. Actuellement, plus de 40 % de notre collecte est issue de celle des distributeurs – les collectivités locales, à travers les déchetteries, collectant environ 10 % à 11 % des flux.

Monsieur Sermier, la transparence vis-à-vis des pouvoirs publics et des commissions d'agrément permet une approche consolidée des comptes des éco-organismes. Nos données sont très régulièrement mises à disposition des pouvoirs publics par le biais de l'ADEME. Aujourd'hui, ces données sont consolidées par filière ; à l'avenir, une consolidation multi-filières pourra éventuellement être envisagée dans le cadre du Conseil national des déchets (CND).

Monsieur Fruteau, nous collectons les lampes dans tous les DOM qui relèvent de la réglementation en la matière. Ils jouent mieux le jeu que certaines îles plus proches de la métropole…

Monsieur Pancher, nous contrôlons deux types de producteurs.

D'abord, les producteurs adhérents. Nos arrêtés d'agrément nous obligent à faire contrôler par une tierce partie indépendante ces producteurs – qui pourraient éventuellement sous-déclarer des quantités, ne serait-ce que par erreur. C'est ainsi qu'un expert-comptable indépendant que nous missionnons tire au sort chaque année des adhérents. En outre, nous avons l'obligation de contrôler 75 % des tonnages déclarés par nos adhérents sur une période de trois ans.

Ensuite, les producteurs non adhérents. Nous avons l'obligation d'informer les pouvoirs publics de l'identité des producteurs qui ne remplissent pas forcément, voire pas du tout, leurs obligations. Nous comptons sur l'évolution du corpus réglementaire récent pour que les pouvoirs publics s'emparent de ce problème et aillent jusqu'à la sanction à chaque fois qu'un producteur défaillant sera identifié. Sinon, je crains que les producteurs qui jouent le jeu finissent par être démotivés.

Monsieur Demilly, les industriels prennent conscience du problème grandissant de l'accès aux matières premières. En effet, la Chine prend actuellement sa revanche sur la veille économie occidentale en accaparant ses propres ressources et en préemptant celles des autres territoires afin d'alimenter ses usines… qui fabriquent des produits manufacturés contenant ces matières et étant achetés par l'Occident. En moins de trois ans, la Chine a réussi à avoir une emprise immense sur les ressources minières dans le monde (Australie, sud de l'Afrique, sud de l'Amérique, nord de l'Amérique du Nord). Face à elle, l'Europe a encore beaucoup à investir en matière de recherche pour développer des savoir-faire et mettre en place une industrie capable de récupérer du gallium dans des lampes à LED, de l'indium dans des écrans et des terres rares dans des poudres fluorescentes. Notre rôle en tant qu'éco-organismes est de faire monter le taux de collecte et de concentrer les déchets pour que les opérateurs affineurs soient en mesure de disposer de volumes de déchets suffisants. Avant la structuration de la collecte en France, les poudres fluorescentes n'étaient pas recyclées – aujourd'hui, un éco-organisme existe dans chaque État membre. Nous sommes donc en mesure de demander aux entreprises qui broient les lampes pour séparer le verre du reste de massifier les poudres fluorescentes, de les stocker et de les mettre à disposition d'un opérateur capable de les recycler, en l'occurrence Rhodia. Car, aujourd'hui, des fabricants européens de lampes fluo compactes, notamment français et anglais, sont en rupture d'approvisionnement de terres rares.

Le problème va d'ailleurs bien au-delà des terres rares. En 2010, la DG entreprise et industrie de la Commission européenne a identifié – la liste étant loin d'être exhaustive – 34 matières qui deviennent stratégiques : les 17 terres rares, une douzaine de platinoïdes, et des métaux comme le vanadium, le tantale ou le lithium. Ces matières sont aujourd'hui indispensables pour fabriquer des objets aussi banals que des outils coupants pour l'industrie d'usinage en Europe. Les Chinois ont compris qu'en préemptant ces ressources, ils pourraient développer chez eux une industrie de haute technologie à forte valeur ajoutée.

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