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Intervention de Jean-Jacques Candelier

Réunion du 7 avril 2011 à 9h30
Accords instituant des partenariats de défense — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Jacques Candelier :

Je n'ai jamais soutenu Kadhafi et il n'est jamais venu chez moi planter sa tente !

Vingt-huit années, disais-je, que de nombreuses associations estiment marquées par le déni des libertés fondamentales et de la démocratie, par le règne de l'impunité et par la corruption. Le Cameroun est classé parmi les pays les plus corrompus du monde. De nombreuses ONG, de même que des organismes internationaux comme la commission des droits de l'homme des Nations unies, dénoncent régulièrement les violations flagrantes des droits humains. C'est dans ce contexte que ce pays connaîtra cette année une élection présidentielle à haut risque.

Pour pouvoir se représenter, M. Biya a procédé à une modification de la Constitution, après que ses forces de l'ordre eurent réprimé les opposants en février 2008. La commission chargée de l'organisation des élections semble totalement contrôlée par des militants du parti au pouvoir. Dans ces conditions, il est à craindre que ces élections ne soient pas du tout transparentes et qu'elles soient entachées de graves violences.

Des ONG ont déjà tiré la sonnette d'alarme ; des militants de la société civile et des opposants au régime demandent la création d'une commission d'enquête internationale, afin de faire toute la lumière sur les exactions commises contre des opposants en février 2008. J'ajoute que les services de sécurités de M. Biya se sont fait remarquer le 23 février 2011 en séquestrant le probable challenger aux élections présidentielles.

La situation actuelle en République centrafricaine n'est guère plus réjouissante. Dans le domaine humanitaire, elle est même critique. C'est l'héritage de plusieurs années de conflits et de coups d'État. Malgré ses ressources minières en or et diamants et ses exploitations forestières, le pays figure parmi les plus pauvres de la planète.

Depuis quelques années, il ressent durement les effets de la crise mondiale. Fortement dépendant de l'exploitation de ses matières premières, il subit de plein fouet la chute du cours de ces dernières, ce qui a poussé les entreprises exploitantes à licencier leurs salariés, désormais sans ressources.

Une crise alimentaire est survenue suite à l'abandon, depuis des années, de la culture vivrière au profit des cultures d'exportation et de l'exploitation diamantifère. Selon les ONG présentes sur place, 7 % d'enfants seraient en état de malnutrition sévère aiguë, le seuil d'urgence de l'OMS étant de 2 %. Malgré cette situation d'urgence, l'aide humanitaire des États est quasi inexistante et les rares ONG présentes sur place peinent à faire face, avec leurs seuls moyens, aux demandes des populations. Là encore, un accord de défense n'est pas prioritaire.

Enfin, après des décennies d'une dictature soutenue par la France, le Gabon n'arrive pas à jouir d'un système démocratique apaisé. Les opposants contestent la régularité et la sincérité des scrutins organisés et dénoncent la corruption et le népotisme du régime. Les dernières élections présidentielles font figure de mascarade électorale visant à confirmer la prise de pouvoir d'Ali Bongo, en succession de son père.

Après les multiples infractions et fraudes électorales, le Gouvernement français et les autorités locales ont appelé au respect des voies légales de contestation des résultats. Encore faudrait-il que les candidats puissent faire valoir des recours devant des institutions indépendantes, démocratiques et transparentes.

Tout cela pour dire que, en matière d'accords de défense, il faut faire attention où l'on met les pieds. Le risque existe d'être déconsidéré, en vertu du fameux syndrome tunisien précité. Actuellement, les atteintes aux biens symbolisant la France témoignent du rejet par les populations des pays africains de la politique qu'elle conduit.

La realpolitik doit laisser sa place à de nouvelles relations avec l'Afrique, débarrassées des compromissions et arrangements coupables du passé. Le printemps des peuples arabes bouleverse le cours de l'histoire et offre un cinglant démenti aux formules inacceptables du discours de Dakar.

Le soulèvement populaire est l'expression d'une opposition massive à des régimes autoritaires, prédateurs et corrompus. Il pourrait bien faire tache d'huile dans de nombreux pays africains en proie aux mêmes difficultés. Un développement librement choisi par les peuples est la condition pour qu'ils vivent et s'épanouissent dans leur pays.

Ne soyons pas à la remorque de l'histoire en faisant comme si rien ne se passait dans le monde, comme si tout pouvait continuer comme avant. Nous voterons contre ces accords de défense.

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