Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, les relations entre la France et le Brésil sont traditionnellement fortes, mais elles ont pris, depuis quelques années, une nouvelle dimension avec le renforcement du partenariat des présidences française et brésilienne.
Ce rapprochement nouveau entre les deux pays permet la création de liens novateurs dans de nombreux domaines : je pense, bien sûr, à la concertation politique, à la sécurité et à la défense, mais aussi aux échanges en matière de sciences et de technologies, à l'éducation et à la culture. Il se traduit également par une augmentation des échanges commerciaux et des investissements.
Ce rapprochement, il convient de le saluer, car il est porteur de réalisations tangibles pour la Guyane française. J'en veux notamment pour preuve les négociations en cours autour du projet de construction d'un pont sur l'Oyapock, qui délimite une grande partie de la frontière entre l'Amapa et la Guyane française. Cette perspective démontre qu'un véritable saut qualitatif a été réalisé dans la coopération franco-brésilienne.
Mais revenons à notre sujet du jour : l'accord France-Brésil de lutte contre l'exploitation aurifère illégale dans les zones protégées ou d'intérêt général. En 1996, déjà, nous avions signé des accords primordiaux : les accords de coopération judiciaire dans les domaines civil et pénal, qui définissent le cadre légal permettant aux deux parties de s'entendre sur certains aspects des relations transfrontalières.
Aujourd'hui, il est question de la lutte contre un fléau économique, sanitaire et environnemental pour ces régions : l'orpaillage illégal. En effet, annoncé en février 2008 par le Président de la République, Nicolas Sarkozy, et son homologue brésilien Lula, l'accord entre la France et le Brésil, dans le domaine de la lutte contre l'exploitation aurifère illégale dans les zones protégées ou d'intérêt patrimonial, a pour but de renforcer la coopération entre les deux pays pour lutter contre l'orpaillage clandestin.
L'orpaillage clandestin sur le terrain est synonyme de déforestation, de pollution des fleuves, de destruction des écosystèmes, d'exposition des populations au mercure. Car pour opérer, les orpailleurs clandestins utilisent du mercure pour amalgamer l'or, quand bien même cette technique est interdite en France depuis le 1er janvier 2006. En 2005, 5 tonnes de mercure ont été rejetées dans le milieu naturel et 1,5 tonne dans les cours d'eau. Ce mercure infecte les populations amérindiennes et l'INSERM relevait en 1998 que, chez plus de 70 % des enfants amérindiens du Haut-Maroni, les taux d'imprégnation au mercure étaient supérieurs à la norme OMS. Or une absorption importante de mercure par l'homme peut entraîner des troubles du système nerveux et des malformations, particulièrement chez la femme enceinte et l'enfant.
Si les populations sont touchées, c'est que leur biotope l'est tout autant : 1 333 kilomètres de cours d'eau seraient directement impactés par le mercure, indiquait l'ONF en 2006. À titre de comparaison, la Loire, de sa source à son embouchure, couvre 1 000 km de linéaire. Contrairement aux opérateurs légaux, les clandestins ne réhabilitent pas les zones orpaillées, ce qui provoque un grave problème de déforestation et de très importantes modifications du lit des cours d'eau.
Cet orpaillage illégal est aussi synonyme de criminalité collatérale : trafic de stupéfiants, prostitution, homicides, trafic d'armes, etc. Les zones de non-droit ont surgi un peu partout au coeur de la forêt amazonienne, malgré les opérations menées par les gendarmes et les militaires. Le rapport est d'ailleurs très éclairant sur le sujet – madame la rapporteure, je vous en remercie –, et les forces publiques doivent faire face à des réactions de violences systématiques lors de leurs interventions.
Selon le rapport Mansillon du ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer du 17 juin 2009, la Guyane compterait plus de 500 chantiers illégaux et 5 000 à 8 000 travailleurs clandestins auraient été recensés.
À ce titre, pour le groupe centriste, la nécessité de l'approbation de cet accord est claire. Trois objectifs le sous-tendent.
D'abord, l'accord vise à introduire une réglementation globale et transversale et un suivi de toutes les phases de l'activité d'orpaillage à travers une coopération renforcée entre les autorités française et brésilienne. Et au regard des difficultés auxquelles doivent faire face les autorités dans leur lutte contre ce fléau, un renforcement de l'arsenal juridique et une simplification du dialogue administratif entre la France et le Brésil sont souhaitables.
Ensuite, le deuxième objectif est environnemental. Alors que nous faisons des efforts conséquents en métropole et en outre-mer, nous ne pouvons fermer les yeux sur les poisons rejetés par ces pratiques illégales. La qualité de l'eau en dépend. La diversité de la faune et de la flore locales en dépend. La santé des populations locales en dépend. Le sujet est donc d'importance.
Enfin, le troisième objectif de cet accord est d'ordre économique et social.
Il s'agit de renforcer l'exploitation légale et déclarée, de renforcer les flux reconnus entre Guyane et Brésil, d'encourager l'embauche de main-d'oeuvre déclarée. Pour le groupe Nouveau Centre, cette question est cruciale. En effet, la Guyane recèle encore un potentiel aurifère important : 120 tonnes en or primaire, et encore quinze à vingt ans de gisement alluvionnaire au rythme de son exploitation actuelle. Il s'agit clairement d'un secteur porteur pour la région. Mais force est de constater que, pour une tonne d'or produite et déclarée légalement, trois tonnes sont exportées de Guyane illégalement !
Aussi le groupe Nouveau Centre votera-t-il ce projet de loi autorisant l'approbation de l'accord France-Brésil de lutte contre l'orpaillage clandestin.