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Intervention de Noël Mamère

Réunion du 6 avril 2011 à 15h00
Garde à vue — Article 1er, amendement 83

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNoël Mamère :

Malgré l'importance du sujet, bien qu'il soit ici question de ce qui garantit nos libertés, du principe du contradictoire, de la présence de l'avocat, du fait que l'on jette en garde à vue des quantités de gens qui n'ont rien à y faire – l'objet de l'amendement que je présente est d'ailleurs de fixer à trois ans d'emprisonnement le seuil pour être placé en garde à vue –, nous avons le sentiment que cette deuxième lecture ne sert absolument à rien.

Certains, parmi nous, ont défendu des motions de procédure, nous nous sommes exprimés hier dans la discussion générale, et nous ne pouvons pas être d'accord avec les déclarations de notre collègue Garraud. Dans le système judiciaire français, le procureur de la République reste le procureur de la République : il dépend du garde des sceaux, qui dépend de l'exécutif. Il est donc difficile à l'une des parties de décider de qui est en liberté et de qui ne l'est pas. Nous ne sommes donc toujours pas en conformité avec les exigences de la Cour européenne des droits de l'homme.

Nous sommes d'ailleurs très en retrait par rapport à plusieurs de nos voisins de l'Union européenne pour ce qui est du rôle et de la présence de l'avocat. Vous avez beau nous dire que nous faisons un effort formidable en acceptant la présence de l'avocat, il n'a pas le même rôle auprès de son client que dans d'autres pays, par exemple l'Espagne.

Cessez de dire aux Français que c'est une belle réforme : vous réformez par obligation, pour éviter d'être pénalisés par la Cour européenne des droits de l'homme, vous réformez à reculons, en traînant des pieds, mais vous n'ouvrez pas une véritable réforme qui modifierait la garde à vue et garantirait un peu mieux nos libertés.

Si l'on ajoute à cela toute une série de projets de loi qui ont été soumis à la représentation nationale et qui marquent autant de reculs en matière de garantie de nos libertés – je pense notamment à celui concernant le Défenseur des droits, qui a supprimé la HALDE, le Défenseur des enfants, la CNDS et le Médiateur de la République –, on peut penser que cela fait beaucoup.

En réalité, notre système privilégie toujours l'aveu plutôt que la preuve. Ce projet de loi offre certes quelques avancées, mais elles ne sont pas voulues, elles sont imposées. C'est la raison pour laquelle nous ne participerons sans doute pas avec la même énergie à la discussion lors de cette deuxième lecture, puisque nous savons quel est le destin de chacun de nos amendements : le rejet. Cela ne nous empêchera pas de nous exprimer, puisqu'il y a encore une opposition dans ce pays, qui doit pouvoir s'exprimer.

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