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Intervention de Jean-Christophe Niel

Réunion du 30 mars 2011 à 9h30
Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques

Jean-Christophe Niel, Directeur général de l'ASN :

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les parlementaires, Mesdames et Messieurs, l'année 2010 a été assez satisfaisante sur le plan de la sûreté nucléaire et de la radioprotection. De ce point de vue, elle s'inscrit dans la continuité des années précédentes.

L'ASN estime que les efforts engagés par EDF, depuis plusieurs années, en matière d'exploitation au quotidien, portent leurs fruits sur certains sites, mais doivent être poursuivis sur d'autres. Concernant la maintenance ou le remplacement des composants, certaines opérations n'ont pas été assez anticipées. Elles ont pu conduire à des opérations correctives de grande ampleur ou délicates. Ce fût notamment le cas à l'occasion du remplacement des générateurs de vapeur du réacteur de Bugey 3. Tous les ans, depuis maintenant quatre ans, nous portons une appréciation sur les sites d'EDF. Cette appréciation est basée sur nos inspections, le suivi des arrêts de tranche, l'analyse des incidents et l'instruction des dossiers en cours. Cette année, cinq sites se détachent favorablement : les sites de Bugey, Penly et Tricastin, en termes de sûreté nucléaire, et les sites de Civaux et Golfech, en termes de radioprotection. Quatre sites sont en retrait : le site de Saint-Alban, le site de Chinon, notamment en termes de rigueur d'exploitation, ainsi que les sites de Chooz et de Nogent, en termes de protection de l'environnement.

L'ASN poursuit ses examens décennaux des réacteurs ; cinquante-huit réacteurs en France sont soumis à cet exercice qu'impose la loi relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire (TSN). Après avoir rendu un avis générique sur le palier 900 MW en juillet 2009, l'ASN a donné, en novembre 2010, son accord pour la poursuite d'exploitation du réacteur de Tricastin 1, de trente à quarante ans. Bien évidemment, cette autorisation s'accompagne de la poursuite, par l'ASN, de son action de contrôle au quotidien de ce réacteur. L'ASN devrait rendre un avis, dans les prochains mois, sur les réacteurs de 900 MW suivants : Fessenheim 1, Bugey 1, Fessenheim 2 et Tricastin 2. Pour mémoire, le dernier réacteur de 900 MW à avoir sa troisième visite décennale devra attendre 2020.

L'ASN poursuit aussi le contrôle de la construction du réacteur EPR et l'instruction préalable à sa mise en service. En 2010, nous avons effectué trente-sept inspections de chantier, neuf inspections dans les services d'ingénierie et deux cents contrôles ont été pratiqués sur les composants sous pression. L'ASN poursuivra le contrôle du chantier et s'attachera à l'examen de la qualification des matériels et des études de sûreté.

Concernant le cycle du combustible - Areva et ses filiales -, l'ASN a noté, avec satisfaction, l'arrêt annoncé d'Eurodif en 2012, qui sera remplacé par une installation Georges Besse II, plus sûre, notamment eu égard à la quantité d'hexafluorure d'uranium mise en oeuvre. Par ailleurs, l'ASN est très attentive aux opérations de reprise des déchets anciens non conditionnés du site de La Hague. Areva doit procéder aux investissements nécessaires sur le sujet.

Concernant le Commissariat à l'Énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), l'année 2010 n'a été marquée par aucun événement majeur. L'ASN a constaté les progrès du CEA dans le management de la sûreté. La démarche de grands engagements doit être poursuivie avec rigueur. Cette démarche vise à protéger des aléas budgétaires des projets à fort enjeu en termes de sûreté nucléaire et de radioprotection. L'ASN est préoccupée par le report de certaines opérations de désentreposage de déchets ou de matières et de démantèlement.

La gestion des déchets est un sujet important pour l'opinion publique et pour l'ASN. La sûreté dans la gestion des déchets repose sur trois piliers. D'abord un cadre législatif, avec deux lois, portées notamment par l'OPECST : la loi sur la transparence et sécurité en matière de nucléaire, ainsi que la loi sur la gestion des déchets radioactifs, toutes deux promulguées en juin 2006. Les autres piliers sont une feuille de route, qui est le Plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs, ainsi qu'une agence en charge spécifiquement de ces dossiers. La deuxième version du plan national, pour la période 2010-2012, a été remise au Parlement. L'Office a rendu son avis, il y a quelques mois. L'ASN est préoccupée par l'absence de stockage pour les déchets à vie longue et à faible activité. Elle poursuit l'inspection des éléments fournis par l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA) sur le site de Bure, notamment en ce qui concerne les options de conception, la sûreté en exploitation et la sûreté à long terme. L'ASN est attachée à ce que l'ANDRA assume pleinement les missions que lui a confiées la loi, que ce soit sur la conception, la réalisation ou l'exploitation des stockages de déchets radioactifs.

Le deuxième grand domaine que contrôle l'ASN est le nucléaire de proximité, en particulier le domaine médical. Les progrès enregistrés, en 2009, par la radiothérapie en matière de sécurité des patients se confirment, notamment grâce au renforcement des effectifs en radiophysique médicale. Il y avait 430 radiophysiciens en fin d'année 2010, et l'objectif consiste à porter leur nombre à 600 fin 2012. En outre, les procédures de management de la qualité et de la sécurité des soins dans les établissements ont été mises en place de manière progressive.

Toutefois, les avancées sont hétérogènes. Dans certains centres, l'organisation reste fragile. Le nombre d'événements déclarés à l'ASN dans le domaine médical est de 419, soit 50 % de plus qu'en 2008 : 265 concernent la radiothérapie, 7 ont été classés au niveau deux et cent soixante et onze au niveau un.

L'ASN considère que la baisse du nombre de centres qui n'ont pas déclaré d'évènements, de 29 en 2009 à 20 en 2010, traduit une prise de conscience des professionnels quant à l'importance de la déclaration.

L'imagerie médicale est un autre domaine de préoccupation de l'ASN. Il s'agit des examens à visée diagnostic. L'ASN fait le constat, comme c'est déjà le cas au Japon et aux Etats-Unis, d'une augmentation des doses délivrées par ces examens, de 50 % en cinq ans, en France. Ces doses sont notamment délivrées à l'occasion des examens par scanner. Un scanner du corps entier peut délivrer une dose allant jusqu'à vingt millisieverts, soit la limite haute des travailleurs du nucléaire. Cette augmentation est donc un sujet de préoccupation. Trois actions peuvent contribuer à limiter ce phénomène : une augmentation du nombre d'Imagerie par résonance magnétique (IRM), technologie non-irradiante, le développement de l'assurance-qualité et le renforcement du nombre de radiophysiciens.

En 2010, l'activité internationale s'est poursuivie, notamment par la rédaction d'un projet de directive sur la gestion des déchets radioactifs. Ce projet vient compléter la directive sur la sûreté nucléaire adoptée en 2009. Par ailleurs, les travaux du club rassemblant les chefs d'autorité de sûreté des pays européens ont abouti à une position partagée sur les objectifs de sûreté des nouveaux réacteurs qui seraient à construire en Europe.

L'ASN a poursuivi son travail sur la mise en oeuvre de la réglementation qui découle de la loi TSN. Elle a aussi travaillé sur la maîtrise de l'urbanisation, qui est l'un des piliers de la maîtrise de la gestion du risque autour des installations nucléaires.

Enfin, l'ASN a ouvert, avec l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), le site « mesure-radioactivite.fr », lequel rassemble l'ensemble des mesures de radioactivité effectuées dans l'environnement. Il s'agit d'un outil unique en Europe. Nous avons également rendu public un livre blanc du tritium, résultat d'une démarche pluraliste consacrée à ce radioélément qui soulève quelques questions.

Pour conclure, je voudrais citer quelques chiffres. En 2010, l'ASN a effectué1 964 inspections, dont 25 % inopinées. Depuis cette année, toutes nos lettres d'inspection sont publiques. Nous avons notamment réalisé deux inspections de revue, qui sont des inspections massives, l'une sur l'installation MELOX, autour du thème de la criticité, et l'autre sur le centre de Saclay, sur le thème du management de la sûreté.

1 107 ont été classés, dont 140 au niveau un et 3 au niveau deux. Je voudrais mentionner deux pollutions radioactives : l'une dans l'installation Formetal, consécutive à la découpe intempestive d'une source de cobalt 60, et l'autre à Saint-Maur des Fossés suite à la sortie d'un centre du CEA d'un dispositif contenant du tritium, alors que ce dispositif était considéré comme non-radioactif.

Le centre de crise de l'ASN a été créé à l'occasion de la tempête Xynthia de manière préventive. Les critères de repli de la tranche du Blayais n'ont pas été atteints, donc la tranche est restée en fonctionnement.

Enfin, nous avons procédé à sept exercices de crise.

Je vous remercie de votre attention.

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