Mais il est des moments où il faut accepter d'être battu. C'est ce que le Gouvernement a fait. D'ailleurs, le Sénat a confirmé la position de l'Assemblée nationale. Le délai d'attente qui a été instauré permet de garantir l'effectivité de la réforme sur l'ensemble du territoire. L'audition de la personne gardée à vue ne pourra pas débuter avant l'expiration de ce délai, c'est-à-dire avant l'arrivée de l'avocat. Je veux souligner que celui-ci ne sera pas un avocat « taisant ». Il jouera un véritable rôle d'assistance et d'aide pour son client. Il pourra s'entretenir avec ce dernier, consulter le procès-verbal de notification et d'audition, l'assister durant l'audition. L'Assemblée nationale a utilement précisé les règles d'assistance de l'avocat par rapport au texte initial. Ainsi, l'avocat pourra poser des questions à la fin de chaque audition.
Vos débats ont aussi permis de préciser les motifs pouvant fonder des dérogations au droit à l'assistance d'un défenseur, celles-ci étant justifiées, selon les termes mêmes de la Cour de cassation, par des « raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l'enquête ». La décision du procureur de la République sera lourde de sens puisque, en vertu de l'article 1er A que vous avez adopté, les déclarations recueillies hors la présence d'un avocat ne pourront fonder, seules, une condamnation.
En ce qui concerne les situations de conflits d'intérêts, l'Assemblée nationale a soulevé le problème des auditions simultanées de plusieurs personnes placées en garde à vue lorsque celles-ci ont le même avocat. Le texte adopté par le Sénat prévoit que le procureur de la République, d'office ou saisi par l'officier de police judiciaire, saisisse le bâtonnier afin que soient désignés plusieurs avocats.
Dans les cas de conflits d'intérêts entre plusieurs personnes mises en cause dans une même affaire, le Sénat a prévu que l'avocat dénonce le conflit d'intérêts qu'il serait amené à constater. En cas de divergence d'appréciation avec l'avocat, le procureur de la République ou l'officier de police judiciaire peut saisir le bâtonnier afin que celui-ci désigne, le cas échéant, un autre défenseur.
Ces points apportés en complément au texte initial sont particulièrement importants. Ils donnent à l'équilibre construit par les deux chambres du Parlement une force et une assise particulières, qui seront nécessaires pour la réussite de la réforme.
L'équilibre auquel nous sommes parvenus préserve tant les droits de la défense que les besoins opérationnels des services d'enquête sur l'ensemble du territoire. Cet équilibre, je le souligne, a été très largement approuvé par l'Assemblée nationale puis par le Sénat en première lecture. Le texte qui vous est soumis aujourd'hui en deuxième lecture n'a été que très partiellement modifié par le Sénat. C'est la raison pour laquelle je partage tout à fait la position de votre commission des lois, qui vous propose de l'adopter en l'état. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)